La route de demain dépend de nos actions passées. Nous avons un vaste réseau d'un million de kilomètres, avec un problème de riches : comment l'entretenir ? Ce réseau, auparavant irréprochable, faisait la fierté de notre pays ; nous l'avons constaté en allant voir les réseaux routiers au Royaume-Uni et au Danemark. La France a pu ainsi désenclaver ses territoires et faire une vraie décentralisation grâce aux routes. Mais il y a quelques années, le Grenelle de l'environnement a été un drame pour l'entretien des routes, même s'il a apporté aussi de bonnes choses. Il n'est plus politiquement correct d'entretenir des routes. Il y a un décalage monumental entre le langage pour les médias et celui des habitants qui souhaiteraient qu'on entretienne ses routes. Il va falloir agir, même si les collectivités veulent investir uniquement dans les transports en commun. Or un bus roule sur la route ! Un camion, c'est l'équivalent d'un million de voitures... Notre association a réalisé un audit du réseau et lancé le blog « jaimalamaroute.com », qui a fait deux fois la Une du Parisien. Et nous avons un indicateur d'opinion : le réseau routier s'est dégradé, plus personne n'en doute.
Économiquement, des taxes carbone à gogo sur le carburant ont permis d'engranger des sommes importantes, tout en mêlant une part de réalité et de mensonge sur le diesel. Le financement doit s'appuyer aussi sur la réalité pragmatique de l'entretien des routes, plutôt que de financer certains projets contestables, mais écologiquement ou politiquement plus parlants... Répondons à l'avis des 60 millions de Français prenant leur voiture chaque jour.
Je me bats au quotidien contre certaines mesures étranges, en faisant de l'écologie au quotidien, et pour la sécurité routière. La sécurité routière, malheureusement impopulaire, est comme un tabouret à trois pieds, reposant sur un automobiliste raisonnable - personne ne veut mourir sur la route - dans une automobile entretenue et sur une route entretenue. Si un pied manque, ne nous étonnons pas de la reprise des accidents. Lorsque le nombre d'accidents diminue, c'est grâce aux mesures gouvernementales, mais lorsqu'il augmente, c'est en raison du relâchement du comportement des automobilistes, par exemple entre le 31 janvier et le 1er février ? Établir des indicateurs mensuels n'a aucun sens, alors qu'il y a des tendances lourdes sur un an. Nous avons sans cesse plus de radars, de répression, de mesures contraignantes. Mais le seul indicateur qui n'est pas bon, c'est celui de l'état du réseau routier !
Nous rassemblons deux millions de personnes qui se plaignent de cette dégradation du réseau routier. Or, lorsqu'un marquage au sol rétroréfléchissant est apposé, il y a moins d'accidents. Certaines mesures marchent.
À la suite de la publication de nos résultats sur les routes les plus dégradées de France, avec les deux pieds dans des nids-de-poule, je me suis déplacé sur le terrain. En Alsace, certains responsables d'entreprises de travaux publics m'ont expliqué qu'ils n'avaient plus ou peu de contrats. Comme ils ont des employés en CDI, ils les mettent en chômage technique, et pendant ce temps, l'État prend en charge 50 % des salaires. Lorsqu'on n'entretient pas le réseau pour faire une économie, on transfère les charges à l'État via les indemnités chômage... Cette situation ubuesque me choque. Les automobilistes sont conscients du manque d'entretien. Si on ne veut pas fermer de routes, interrogeons-nous sur la possibilité de financer leur entretien par la hausse du prix des carburants...