Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme la très grande majorité d’entre vous, je me félicite de l’inscription de ce texte à l’ordre du jour des travaux de notre assemblée : d’une part, il répond à une problématique qui empoisonne la vie d’un certain nombre de nos concitoyens, en particulier nos compatriotes corses depuis des décennies, et, d’autre part, il est l’aboutissement d’un processus de concertation avec l’ensemble des acteurs concernés, une sorte de modèle du genre, ce qui explique sans doute qu’il a été adopté à l’unanimité par nos collègues députés et probablement que la Haute Assemblée lui réservera un sort identique. Il faut également noter que l’Assemblée de Corse a, elle aussi, voté à l’unanimité un soutien à ce texte.
Il était nécessaire de corriger cette particularité corse, qui fait que, dans 34 % des parcelles de l’île de Beauté, le droit de propriété ne peut s’y exercer pleinement du fait de l’absence de titres. Mais, dans le même temps, il ne faut pas que nos compatriotes confrontés à ce problème pâtissent de cette situation qui tient à des raisons sociohistoriques et géographiques, dont ils ne sont évidemment aucunement responsables.
Ce texte a la particularité de résoudre la question dans sa globalité, l’aspect aussi bien civil que fiscal : civil pour parvenir à assainir la situation cadastrale de la Corse ; fiscal pour inciter à organiser le patrimoine. C’est cette approche globale qui conduit à en faire un bon texte.
Il nous semble raisonnable que l’État abandonne pour un temps les droits de mutation afin de laisser aux personnes concernées le temps de se mettre en règle avec la loi. L’article 4 place cette exonération à hauteur de 50 % pour la Corse ; une exonération totale pour les générations disparues eût peut-être été un signal plus fort de la volonté de l’État de ne pas pénaliser les générations actuelles, qui ont seulement hérité de la situation. En effet, pour certaines familles, il est nécessaire de dresser des actes sur plusieurs générations et donc de payer des droits d’enregistrement pour chaque acte. Sans exonération totale ou partielle, certaines personnes se verraient alors contraintes soit de vendre leur bien, soit de faire des emprunts pour payer ces droits.
Par ailleurs, ce texte pérennise la mission du groupement d’intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse, le GIRTEC, pour dix ans de plus. Cette durée me semble un peu faible à l’aune du nombre de dossiers encore à traiter, d’autant qu’il y a une forte probabilité que les dossiers les plus compliqués demeurent. Cependant, cette prolongation envoie le signal que l’État veut que la mission du GIRTEC aille à son terme. Nous souhaitons qu’un bilan soit établi de nouveau dans une dizaine d’années pour faire le point sur l’avancée réalisée et, au besoin, prolonger la durée de vie du GIRTEC. Il semble qu’il estime lui-même qu’il y en aurait encore pour vingt ans de travail… Laissons donc le temps nécessaire pour régler cette problématique une bonne fois pour toutes.
Ce texte mettra fin à une particularité corse, mais, rassurons-nous, l’île de Beauté regorge encore de particularités, qu’elles soient géographiques, historiques ou culturelles : elles forment l’une des composantes de la culture française, et je fais confiance à nos compatriotes corses pour les mettre en valeur et les défendre, alors que l’uniformisation culturelle mondialiste nous guette !
Pour conclure, je dirai que la concertation sans idéologie permet souvent d’arriver à un consensus qui sert le bien commun. C’est le cas ici. Tant mieux !