Il est d'autant plus important de se reposer la question de l'attractivité de la place financière de Paris que celle-ci a plutôt décliné dans les dernières années. Dans le domaine de la banque de financement et d'investissement, crucial pour le financement des grandes entreprises et des infrastructures, nous constatons que les grandes banques européennes ont perdu des parts de marché, comme cela a été souligné par le think tank européen Bruegel. À l'inverse, les banques de financement et d'investissement américaines progressent fortement. Il y a là un vrai enjeu de souveraineté et d'attractivité, sur lequel il est heureux que le Brexit mette un coup de projecteur.
Il faut que se construise un véritable écosystème favorable à l'activité financière : ce dernier a commencé à se constituer, comme en témoigne la création dans la région Île-de-France du pôle de compétitivité « Finance Innovation ».
L'impact du Brexit sur la localisation des activités financières dépendra largement des choix faits dans le cadre des négociations concernant la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, qui devraient s'engager à partir du mois de mars, en particulier s'agissant des conditions juridiques de supervision et de régulation prudentielle. Les acteurs financiers actifs en Europe et présents uniquement à Londres seront-ils, ou non, dans l'obligation de se relocaliser pour pouvoir continuer de servir leurs clients européens ? Nous ne le savons pas encore et sommes, à cet égard, dans une phase d'observation. Nous entendons des propos très fermes de la part des autorités britanniques, annonçant un Brexit « dur » et la fermeté semble également de mise du côté de l'Union européenne. Mais nous ne connaissons pas encore le détail des modalités juridiques de sortie du Royaume-Uni et c'est une incertitude importante.
Concernant les atouts de la place de Paris, je veux d'abord dire qu'ils existent et qu'ils sont nombreux - comme nous l'avons constaté lors de nos échanges avec nos adhérents à ce sujet. Il ne faut pas partir battu et ce n'est pas du tout notre approche.
Le premier atout réside dans la mobilisation forte et unie de l'ensemble des pouvoirs publics concernés, qui s'est manifestée dès avant le Brexit - comme en témoigne par exemple le colloque qui s'est tenu au mois de juin 2016 dans les locaux d'Euronext. Cette approche commune s'est concrétisée lors des rencontres Paris Europlace durant lesquelles le Premier ministre, la maire de Paris et la présidente de la région Île-de-France ont présenté devant un parterre d'investisseurs français et étrangers leur ambition de renforcer l'attractivité de la place de Paris. Les annonces du Premier ministre ont d'ailleurs trouvé leur traduction en loi de finances, avec plusieurs mesures comme la baisse progressive de l'impôt sur les sociétés pour atteindre, à terme, un taux de 28 % - qui reste supérieur à la moyenne européenne mais il s'agit d'un engagement important - ou l'amélioration du régime des impatriés à travers l'allongement de sa durée et l'exonération de plusieurs taxes, en particulier la taxe sur les salaires. Comme vous le savez, le secteur de l'assurance et le secteur bancaire sont parmi les derniers secteurs concurrentiels à être soumis à une taxe qui pèse très directement sur les salaires.
Le deuxième atout est que Paris et la région Île-de-France disposent d'un bassin d'emploi adéquat pour le secteur financier et de nombreux grands clients : beaucoup d'émetteurs sont situés à Paris avec des grandes entreprises qui y ont leur siège. C'est essentiel : les acteurs financiers s'installeront là où ils pourront le mieux servir leurs clients.
Le troisième atout réside dans nos formations, dont la qualité est reconnue. D'ailleurs, aujourd'hui, beaucoup de Français travaillent à Londres.
Les infrastructures sont aussi importantes et Paris est un hub qui permet de rayonner sur les autres capitales et grandes places financières en Europe et dans le monde.
Enfin, la disponibilité de mètres carrés, notamment à la Défense, comme l'a mis en avant le département des Hauts-de-Seine, qui a participé à l'ensemble des évènements que j'ai évoqués, constitue un autre avantage de la place de Paris.
Face à tous ces atouts, il faut signaler un point négatif majeur : il s'agit du droit du travail et de la flexibilité. Les entreprises étrangères qui veulent s'installer n'ont pas le droit à l'erreur, compte tenu par exemple du niveau des indemnités de licenciement. Alors même que leurs métiers sont souvent cycliques, ces sociétés ont peu de possibilités pour adapter facilement le volume de leur activité, compte tenu des délais et des contraintes attachées à la notion de licenciement économique. La jurisprudence prévoit en effet que c'est le périmètre mondial de l'activité qui est pris en compte.