Intervention de Guillaume Arnell

Réunion du 14 février 2017 à 14h30
Égalité réelle outre-mer — Adoption définitive des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Guillaume ArnellGuillaume Arnell :

Cela fait toute la complexité d’un texte tendant à reconnaître l’égalité entre les territoires de République, et donc entre les citoyens de ces territoires situés dans tous les bassins océaniques du monde, qui doit permettre de concilier la reconnaissance des handicaps de ces territoires avec la valorisation de leurs atouts.

Le projet de loi de programmation relatif à l’égalité réelle outre-mer tel qu’adopté à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 9 février dernier – espérons qu’il en aille de même au Sénat ce soir – reflète cette ambition.

Parvenir à un accord en commission mixte paritaire, par-delà les clivages politiques, était loin d’être évident. Après l’inflation du nombre de ses articles qu’a connue le texte lors de son examen à l’Assemblée nationale, puis la suppression par le Sénat de trente-trois articles, l’adoption de trente-six articles conformes et l’introduction de soixante et un nouveaux articles, un important travail en commun des députés et des sénateurs était nécessaire pour s’accorder.

C’est donc en bonne intelligence que nous avons su faire entendre les revendications respectives de nos territoires. Comme je le soulignais lors de la discussion générale en première lecture, même s’il n’est pas parfait, ce texte constitue une avancée pour les outre-mer, et toute amélioration est bonne à prendre.

Néanmoins, je nourris quelques regrets à propos des amendements que j’avais présentés et qui n’ont pas été retenus, même si j’ai entendu les arguments des rapporteurs et de la ministre. Ces regrets portent principalement sur deux points.

Tout d’abord, pour les collectivités d’outre-mer relevant de l’article 74 de la Constitution, les plans de convergence auraient pu, selon moi, revêtir un caractère impératif, comme c’est le cas pour ceux qui sont conclus avec les collectivités territoriales de l’article 73 de la Constitution. Il est à craindre en effet que, sans cadre juridique clair et précis, la mise en œuvre de ces plans ne rencontre des difficultés ; je serai vigilant à l’avenir sur ce point.

Ensuite, il n’y a pas de raison objective qui s’oppose à l’extension aux collectivités territoriales d’outre-mer du dispositif « top up jeunes agriculteurs », visant à favoriser l’installation de jeunes agriculteurs notamment par l’attribution de prêts bonifiés et d’une aide financière. Le ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll, l’a d’ailleurs reconnu à plusieurs reprises. Je l’ai interrogé la semaine dernière par le biais d’une question écrite sur ses intentions à ce sujet.

Hormis ces quelques réserves, la contribution sénatoriale à l’amélioration du texte est indéniable et je me félicite que nombre de mes propositions aient été retenues par mes collègues, en particulier, dans le domaine social, la suppression de la surtaxe frappant les alcools ultramarins, au premier chef le rhum. Cette surtaxe était inacceptable de mon point de vue, sachant que, voilà quelques semaines, je défendais devant la Haute Assemblée une hausse des quotas d’importation de rhum sur le marché européen. On ne saurait ignorer les conséquences économiques et sociales, pour la filière canne-sucre-rhum, de l’application d’une telle surtaxe, sans aucun effet garanti sur la santé publique.

Dans le domaine de l’école et de la formation, la mise en place d’un conseil territorial de l’éducation nationale composé de représentants de la collectivité, du personnel et des usagers est une avancée essentielle pour Saint-Martin. J’ai aussi présenté un amendement, qui a été adopté, visant à rendre l’école obligatoire dès 3 ans à titre expérimental, pour une durée de trois années à compter de la rentrée scolaire de 2018.

Concernant les dispositions économiques, commerciales et bancaires, je suis heureux que mes collègues aient adopté mon amendement visant expressément à étendre le bénéfice du livret d’épargne populaire et du livret de développement durable et solidaire, que certains établissements financiers refusaient, à tort, aux personnes domiciliées dans une collectivité relevant de l’article 74 de Constitution.

Par ailleurs, l’adoption d’un Small Business A ct ultramarin réservant un tiers des marchés publics aux TPE et PME locales était nécessaire. Cela répond à une réelle attente de nos entreprises, déjà très fragilisées par la conjoncture économique.

Il en est de même de la suppression de la taxe de solidarité sur les billets d’avion au départ des collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, qui permet de prendre en compte notre autonomie fiscale.

J’en viens à l’épineuse question de l’instauration d’une journée nationale de commémoration des victimes de l’esclavage. Comme Guadeloupe 1ère a fait une interprétation erronée de mes propos, je souhaite rétablir une vérité : mon amendement visait à permettre la discussion en séance publique de la mesure après sa suppression en commission. Le point de vue de chacun était respectable et devait être respecté.

Mes chers collègues, ce texte n’est, certes, pas parfait, mais il constitue un progrès vers un peu plus d’équilibre entre les territoires de la République et vers plus de justice sociale entre les citoyens français.

Vous l’aurez compris, il reste beaucoup de travail à accomplir. Ce travail sera poursuivi avec le ministère des outre-mer, à la faveur d’une écoute attentive de votre part, madame la ministre, comme vous en avez fait preuve tout au long des débats. Je veux vous remercier, en mon nom propre et au nom de l’ensemble de mes compatriotes, qui bénéficieront de ces mesures importantes.

Je veux également remercier M. Victorin Lurel et Mme George Pau-Langevin, qui vous ont précédée à ce poste, ainsi que tous les collègues ayant pris part à ce débat.

Le groupe RDSE, fidèle à sa volonté de garantir la cohésion territoriale de la République, la solidarité et l’équité entre les citoyens et entre les territoires, votera en faveur du texte.

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