Syndrome obsidional, paranoïa : rien n'a changé depuis les Lettres de Russie du marquis de Custine, qui semblent décrire la Russie d'aujourd'hui. À la différence de la Chine et d'autres pays comparables, la Russie est en train de manquer pour la troisième fois l'occasion de relancer son développement. Ce sont les tsars qui ont laissé passer la première occasion, la seconde a été perdue avec le désastre communiste, et la troisième est gâchée de nos jours, car toute l'énergie est dirigée vers l'extérieur, avec cette obsession de la désintégration de l'empire. Aucun effort n'est fait pour développer l'économie ni en matière d'éducation ; la corruption est généralisée ; les ressources, dont la moitié proviennent des hydrocarbures, sont bradées. Bref, c'est le Nigéria sous la neige et avec des bombes atomiques ! Tout cela profite à la Chine, dans les bras de laquelle la Russie se jette, pour le plus grand plaisir de Xi Jinping. Y a-t-il une chance pour que cette troisième occasion soit saisie ? Pour que les élites russes s'aperçoivent que cela ne peut pas continuer comme ça ? Qu'il n'est pas réaliste de prétendre affronter les États-Unis avec 150 millions d'habitants et un PIB inférieur à celui de l'Italie ?
La désinformation russe a retrouvé le niveau qu'elle avait aux meilleures années de l'URSS - c'était la seule chose qui fonctionnait bien - avec en prime l'adaptation aux nouvelles technologies. Elle a eu un impact aux États-Unis, et commence à en avoir en France, comme l'explique bien le New York Times d'hier. La Russie ne séduit pas seulement les partis extrémistes, de droite ou de gauche, qui adorent par principe les dictateurs, mais aussi les partis démocratiques, y compris le mien, où je crois désormais entendre le claquement des talons de Daladier sur les trottoirs de Munich - soit dit sans vouloir aucunement comparer M. Poutine à Hitler, naturellement. À l'approche des élections présidentielles, les manoeuvres ont commencé : attaque des serveurs de M. Macron, actions similaires en Allemagne, aux Pays-Bas, ou ailleurs. Dans quelle mesure les Russes peuvent-ils nuire à nos processus électoraux ? Comment nous protéger ?