Intervention de Thomas Gomart

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 15 février 2017 à 10h00
Audition conjointe sur la russie de M. Thomas Gomart directeur de l'institut français des relations internationales ifri et de Mme Tatiana Kastouéva-jean directrice du centre russie-cei de l'ifri

Thomas Gomart, directeur de l'Institut français des relations internationales (IFRI) :

Questions pertinentes ! Pour les Russes, un monde multipolaire n'implique pas le développement du multilatéralisme. La Russie bloque le fonctionnement de certaines organisations multilatérales, par exemple en multipliant les recours à son droit de véto au Conseil de sécurité de l'ONU. C'est aussi dans ce cadre que nous voyons la substance de la relation franco-russe : la Russie a démonté systématiquement plusieurs tentatives françaises de faire voter une résolution. À la différence de la Chine, la Russie n'a jamais consacré de contingents importants aux opérations de maintien de la paix de l'ONU. En tout, une centaine de soldats russes y participent. La Chine y envoie environ 8 000 personnes, car elle y voit le moyen de faire monter en gamme ses forces armées sur des opérations peu difficiles, leur principale faiblesse étant le manque d'aguerrissement.

Les sanctions sont devenues le point de fixation de la relation entre la Russie et l'Union européenne, et même l'Occident. Elles pénalisent nos entreprises en les plaçant sous le joug de décisions prises à Washington, certes. Mais pouvait-on imaginer une absence de réponse à l'annexion de la Crimée et à la déstabilisation du Donbass ? Pouvait-on accepter qu'un pays membre du Conseil de sécurité de l'ONU en envahisse un autre et le déstabilise sans conséquences ? La réponse est dans la question. Étions-nous prêts à aller plus loin que de simples sanctions ? Même remarque. Les sanctions étaient donc le seul choix. Elles sont en réalité très légères, et leur impact a été défini avec soin pour qu'elles soient ciblées. Certaines pourraient être levées, mais celles qui sont liées à l'annexion de la Crimée ne sauraient l'être, sauf à reconnaître que le mémorandum de Budapest peut être violé sans conséquences.

Il est vrai que le précédent de l'Iran - qui a fait l'objet d'un excellent rapport d'information à l'Assemblée nationale de M. Lellouche et Mme Berger - montre qu'une épée de Damoclès est suspendue à Washington, qui menace de tomber sur nos entreprises. En fait, c'est le prix que les Américains nous font payer pour notre propre sécurité. Que l'Europe relance ses dépenses militaires, elle limitera son exposition à ce type de situation.

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