Intervention de Richard Yung

Commission des affaires européennes — Réunion du 19 janvier 2017 à 8h40
Économie finances et fiscalité — Activités de courtage d'assurances et de réassurance : communication et avis politique de mm. jean-paul emorine et richard yung

Photo de Richard YungRichard Yung :

mais aussi de plus en plus fréquemment les intermédiaires d'assurance à titre accessoire tels que les agences de voyages, les sociétés de location de voitures... Les agents et courtiers en assurance ont historiquement constitué le premier canal de distribution en Europe. Leur position autrefois quasi-monopolistique s'est réduite notamment en raison de la réglementation.

La part de marché des intermédiaires d'assurances, agents et courtiers s'établit toutefois encore, en 2014, à plus de 50 % des primes collectées en Europe et, en 2013, on recensait plus de 1,5 million d'intermédiaires d'assurances dans les 24 marchés de l'Union européenne. L'Allemagne concentre l'effectif d'agents et de courtiers le plus élevé en Europe avec plus de 240 000 intermédiaires inscrits en 2014 à comparer à plus de 50 000 recensés en France.

Au plus tard le 23 février 2018, les parlements nationaux devront transposer la directive dans leurs législations nationales. La Commission européenne doit adopter d'ici juin 2017 des actes délégués pour lesquels l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles qui est basée à Francfort doit émettre des avis techniques au plus tard le 1er février 2017. Le calendrier d'adoption de ces actes délégués et de transposition de la directive du 20 janvier 2016 impose un délai très court pour permettre aux entreprises du secteur de s'adapter à ce nouveau cadre réglementaire. Or, ces actes délégués et les travaux préparatoires qui les accompagnent sont de nature à modifier considérablement la pratique de la distribution des produits d'assurances.

Il est attendu de cette directive des progrès significatifs en matière de protection des consommateurs qui recevront désormais des informations sensiblement identiques à celles reçues lors de la distribution des produits financiers. Souvenez-vous du débat avec l'Autorité des marchés financiers : celui qui achète un produit doit savoir ce qu'il y a dedans... Pour ce faire, le texte adopté inclut dans le périmètre réglementé l'ensemble des canaux de distribution, et détermine quelles informations doivent être communiquées aux consommateurs avant de conclure un contrat d'assurance et quelles règles de transparence seront imposées aux distributeurs. Concrètement, l'immatriculation des intermédiaires d'assurance auprès d'une autorité compétente dans leur État membre d'origine est rendu obligatoire. En France, ce sera l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Cette mesure permet la mise en place d'un registre unique recensant les informations nécessaires sur les acteurs présents sur le marché, permettant potentiellement au consommateur de mieux comparer les différentes offres. La directive renforce aussi les obligations de formation professionnelle applicables aux intermédiaires et leur devoir de conseil et d'information des clients. L'assuré ou l'investisseur particulier recevra ainsi des informations sur la rémunération du distributeur et le statut de l'intermédiaire afin d'éviter que les distributeurs ne favorisent un produit en fonction de leur mode de rémunération au détriment de la satisfaction des besoins du client. C'est un voeu que je n'espère pas uniquement pieux !

Quatre actes délégués, sur quatre articles de la directive sont actuellement en cours d'élaboration. Ils peuvent modifier significativement le contexte réglementaire car ils concernent la gouvernance et la surveillance des distributeurs d'assurances, la prévention des conflits d'intérêts et l'adéquation des pratiques de rémunération aux nouvelles règles de conduite ainsi que les informations à fournir au consommateur. Autant de sujets sensibles et centraux dans le dispositif final et dont il est à craindre une volonté de surinterprétation qui présenterait le risque d'aller bien au-delà des exigences de la directive adoptée. De plus, dans certains cas et notamment pour la protection du consommateur, le droit français a pris de l'avance en la matière : n'empilons pas des systèmes contradictoires.

À plusieurs reprises déjà, la commission des affaires européennes a attiré l'attention sur les difficultés liées aux actes délégués. Ceci est traditionnellement le cas pour la réglementation financière où ce phénomène a pris une ampleur considérable. Comment s'assurer que les normes techniques de réglementation, dont certaines sont parfois complexes, n'impliquent ni décision stratégique, ni choix politique ? Les parlements nationaux n'interviennent pas directement dans l'élaboration de cette législation de « niveau 2 » ; pour autant, il nous est apparu opportun de nous adresser à la Commission pour refuser une surinterprétation mais, cette fois, en amont de l'élaboration d'actes délégués dont les conséquences économiques et sociales ne doivent pas être sous-estimées. C'est dans cet esprit qu'il vous est proposé d'adopter l'avis politique.

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