Intervention de Thierry Repentin

Commission des affaires européennes — Réunion du 19 mars 2014 à 15h05
Institutions européennes — Débat préalable au conseil européen des 20 et 21 mars 2014

Photo de Thierry RepentinThierry Repentin :

ministre délégué. Le Gouvernement engagera sa responsabilité à l'Assemblée nationale, mais, parallèlement, comme cela se fait traditionnellement, une partie du Gouvernement se déplacera au Sénat, car nous traitons les deux chambres avec un égal respect. Vous n'ignorez pas comment les choses se déroulent habituellement, monsieur de Montesquiou...

Monsieur Bizet, vous avez aussi évoqué, tout comme d'autres intervenants, la question du mix énergétique, sujet qui peut faire débat entre le Gouvernement et la représentation nationale, mais aussi, me semble-t-il, entre parlementaires.

Ce n'est pas à l'Union européenne - dont je ne suis évidemment pas ici le porte-parole : je suis le ministre représentant de la France dans le dialogue avec l'Union européenne - de définir les termes du mix énergétique, celui-ci relevant strictement de la souveraineté nationale. Cette précision figurera dans les conclusions de ce Conseil européen, comme nous avons tenu à ce qu'elle soit très clairement exprimée dans les propositions de la Commission du 22 janvier dernier.

Il appartiendra donc à chacun des États membres de conduire ce débat au sein de ses assemblées parlementaires, afin de déterminer quelles sont les priorités de sa politique énergétique.

Cela n'empêche pas que nous puissions avoir, à l'échelle de l'Union européenne, des objectifs, en ce qui concerne tant la protection de l'environnement que la lutte contre le réchauffement climatique. En la matière, la France est l'un des pays les plus volontaristes pour que nous nous engagions, au niveau de l'Union, sur une diminution de 40 % des gaz à effet de serre à l'échéance de 2030 par rapport aux émissions de 1990. Je pense qu'il ne sera pas possible de fixer un tel objectif à la fin de cette semaine, mais que ce sera possible d'ici quelques mois.

La souveraineté du mix n'empêche pas que nous nous fixions cette ambition, non plus qu'une autre d'ailleurs, à savoir une part incompressible d'énergies renouvelables, toujours à l'échelle de l'Union, à l'horizon 2030. En l'occurrence, nous proposons 27 % d'énergies renouvelables dans la consommation finale de l'Union européenne.

Je ne doute pas que ces objectifs figureront dans le projet de loi en cours de préparation sur la transition énergétique, dont Philippe Martin a la charge et dont le contenu sera dévoilé dans le courant du mois d'avril.

Nous devons intelligemment utiliser les ressources renouvelables dont nous disposons, comme les barrages hydroélectriques ou la biomasse, mais aussi les nouvelles technologies ; je pense notamment aux améliorations en matière de stockage, que les spécialistes appellent le Power-To-Gas, aux réseaux d'interconnexion ou encore aux techniques fondées sur l'utilisation de l'hydrogène et de l'énergie solaire. Nous demandons à la Commission que le recours à ces nouvelles technologies puisse faire l'objet d'un accompagnement.

Cette question n'est d'ailleurs pas totalement disjointe de celle de l'Ukraine, les événements récents qui se sont déroulés dans ce pays lui ayant conféré une actualité et une importance que l'on ne pouvait pas soupçonner voilà quelques mois, quand nous avons demandé que la question énergétique soit inscrite à l'ordre du jour de ce Conseil européen.

Je rends aussi hommage aux parlementaires européens qui, dans les arbitrages sur le budget 2014-2020, ont réservé plusieurs milliards d'euros à la mise en place des équipements permettant d'assurer l'interconnexion des réseaux européens, afin de lutter contre les îlots énergétiques. Il y aura ainsi une interdépendance à l'échelle des Vingt-Huit. Il est clair, en effet, que la question énergétique est aussi une question de géostratégie : la liberté d'un pays d'assumer complètement son destin politique et économique en dépend.

La question des réseaux sera donc aussi l'une des priorités qui seront retenues, et j'espère qu'elle sera fortement aidée par les fonds disponibles au sein de l'Union européenne.

Je veux m'efforcer d'être le plus précis possible sur cette question de l'énergie, sur laquelle M. Bizet, Mme Demessine, Mme Bourzai, M. Gattolin ont insisté à juste titre.

Arriverons-nous à fixer cette ambition ? Ce n'est pas gagné d'avance ! Mais je ne veux pas jeter la pierre aux pays qui ont du mal à approuver spontanément cet objectif d'une diminution de 40 % des gaz à effet de serre et d'une part de 27 % d'énergies renouvelables.

Je rappelle d'abord qu'aucune autre partie du globe n'accepte ces objectifs pour le moment, ensuite que, comme sur d'autres sujets, il faut tenir compte de l'histoire et de la réalité de chaque pays.

Aujourd'hui, dans certains États de l'Union européenne, 90 % de l'électricité provient du charbon. Un objectif de diminution de 40 % des gaz à effet de serre d'ici à 2030 suscite donc légitimement des interrogations de la part des gouvernements de ces pays. Quelles seront les répercussions d'un tel objectif sur leurs propres industries ? Quel sera le coût des investissements à réaliser ?

Ils se demandent légitimement comment l'Europe va les accompagner dans l'effort qu'ils vont devoir accomplir, effort qui sera bien supérieur à celui que la France devra réaliser pour atteindre les mêmes objectifs.

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