Intervention de Pascal Allizard

Commission des affaires européennes — Réunion du 9 février 2017 à 8h30
Économie finances et fiscalité — Paquet « connectivité » : rapport d'information proposition de résolution européenne et avis politique de mm. pascal allizard et daniel raoul

Photo de Pascal AllizardPascal Allizard :

Je vais évoquer le projet de code européen des communications électroniques.

Actuellement, les télécommunications sont régies par cinq directives différentes. La Commission propose de rassembler quatre d'entre elles dans un même texte, un code européen des télécoms. Ce sera plus simple et plus clair. Cela nous convient parfaitement. Le cinquième texte concerne la vie privée en ligne. Il fera bientôt l'objet d'une nouvelle proposition législative.

Sur le fond, le code conserve les grandes lignes de la régulation européenne : le renforcement de la concurrence dans le secteur des télécommunications, la stimulation des investissements, des services de qualité proposés à des tarifs abordables et le développement des choix offerts aux consommateurs.

Des améliorations sont proposées pour ces derniers, avec notamment de nouveaux droits en cas d'offres groupées ou en matière de service universel. C'est détaillé dans le rapport.

M. Raoul vous a parlé de 500 milliards d'euros d'investissements nécessaires. Sur ce montant global, la Commission estime que, au rythme actuel, il va manquer 155 milliards d'euros. Il faut les trouver, notamment pour équiper les zones les moins densément peuplées, nouvel objectif.

Pour y parvenir, la Commission s'inspire de solutions mises en oeuvre dans notre pays qui sont fondées sur la possibilité de co-investissements et de partenariats public-privé pour les zones où l'on sait que le secteur privé ne viendra pas investir seul. Ces solutions pragmatiques ont fait leurs preuves, et nous soutenons leur application à d'autres pays européens.

Concernant la transformation de l'Organe des régulateurs européens des communications électroniques en agence de l'Union européenne, il y a un problème. C'est cette proposition qui avait fait l'objet d'un avis motivé au titre du contrôle de subsidiarité, sur l'initiative de nos collègues Colette Mélot et André Gattolin. Ils relevaient déjà le risque de voir un organe rassemblant des régulateurs indépendants au niveau national tomber sous la dépendance de la Commission européenne.

Notre analyse et nos auditions nous ont montré que c'est bien ce qui est envisagé. Le système proposé aboutirait, après revue par les pairs, à un droit de veto de la Commission sur une décision d'un régulateur national. Ce n'est tout simplement pas admissible. Si la revue par les pairs est utile, car elle permet une analyse conjointe sur la base d'expériences partagées, elle doit déboucher sur un simple avis. Pour ces raisons, en plus de celles soulevées par nos collègues concernant le rôle prépondérant du directeur exécutif, nous nous opposons à la création de cette agence telle qu'elle est envisagée.

J'en viens maintenant à l'initiative « WiFi pour tous », qui propose d'apporter une aide financière aux communes souhaitant proposer du wifi à haut débit gratuit dans les principaux lieux de vie sociale : les places, les parcs, les bibliothèques, ainsi que les autres lieux et bâtiments publics. Cette initiative est dotée d'une enveloppe budgétaire initiale de 120 millions d'euros. Ces fonds proviendraient du mécanisme d'interconnexion pour l'Europe, et 100 % des coûts seraient éligibles, sans préjudice de cofinancement. Ce sont des petites sommes, environ 20 000 euros par commune, qui sont envisagées. Sont visées 8 000 à 10 000 communes, avec des appels d'offres qui pourraient être lancés dès le deuxième semestre 2017.

L'aide s'adresserait à toutes les collectivités locales qui veulent proposer le wifi là où il n'existe pas d'offre similaire, publique ou privée. Cette dernière clause est importante, car on ne sera pas éligible s'il existe déjà un réseau wifi gratuit dans le périmètre visé. La participation viendrait aider à l'achat du matériel et des équipements que la commune s'engagerait à entretenir pour maintenir son offre de service durant plusieurs années.

L'aide serait attribuée selon le principe : « premier arrivé, premier servi ». Il existe quand même une clause pour assurer une répartition géographique équitable, mais on peine encore à savoir comment ces deux principes vont s'articuler.

La question qui se pose est de savoir à qui exactement va s'adresser cette aide. Il y a 90 000 communes en Europe, et on n'en cible que 10 000. Ensuite, il y a la question du budget : 120 millions d'euros, ce n'est pas rien, mais par comparaison avec 500 milliards d'euros, cela ne fait pas beaucoup. Enfin, comme toujours, l'Union européenne met en avant la simplicité pour les demandes. Mais quand on fait intervenir des financements croisés et plusieurs autorités décisionnaires, on sait ce qu'il advient de la simplicité.

Pourtant, nous retenons que cette proposition relève d'une volonté de la Commission d'être plus proche du terrain et des citoyens. Durant nos auditions, on a parlé d'une initiative post-Brexit. En cela, elle mérite une certaine bienveillance. On ne peut pas reprocher à l'Union européenne d'être loin des citoyens et ne pas la soutenir quand elle fait un effort.

Sur l'enveloppe budgétaire, il faut bien voir que la Commission ne peut pas raisonner au-delà de 2020 et du cadre financier actuel. Donc, elle propose cette initiative modeste pour les trois ans qui viennent et, si elle rencontre le succès, elle pourra éventuellement être prolongée.

Ensuite, l'initiative n'est pas là pour remplacer une vraie politique d'investissement dans les réseaux et d'aménagement du territoire. Elle est un projet auxiliaire visant à donner un coup de pouce financier aux communes qui ne pourraient financer seules leur projet. Mais en raison du nombre de communes qu'elle pourrait toucher, elle pourrait avoir un impact au niveau de l'ensemble de l'Union européenne.

Ce sera peut-être moins le cas en France, notamment avec la généralisation de la 4G cette année. Mais elle pourrait apporter un plus, et c'est pour cela que nous souhaitons la soutenir. Pour aider à sa réussite, nous proposons de faciliter au maximum le montage des dossiers pour les élus locaux et de permettre que des groupements de collectivités puissent porter les demandes.

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