Intervention de André Gattolin

Commission des affaires européennes — Réunion du 14 mai 2014 à 15h00
Énergie — Coopération énergétique franco-allemande - rapport d'information de m. jean bizet

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Quand Mme Merkel s'est retournée contre le nucléaire en 2010 avec l'enthousiasme du néophyte, les Grünen allemands ont dénoncé sa précipitation irréaliste tranchant sur la vue à long terme qui avait guidé le gouvernement de M. Schröder, appuyé sur une majorité alliant le SPD avec les Grünen.

Voulant accélérer le rythme pour des raisons politiques, Mme Merkel a renforcé le recours au charbon. Pas un seul écologiste ne préfère substituer au nucléaire un carburant aussi détestable que le lignite !

J'aurais aimé que des spécialistes des énergies renouvelables figurent parmi les personnes auditionnées en vue de ce rapport d'information. Hier après-midi, la commission du développement durable a auditionné Nicolas Hulot, envoyé spécial du Président de la République pour préparer la 21e conférence sur le climat, prévue à Paris en 2015. Des progrès spectaculaires ont lieu en matière de stockage, notamment au Maroc, avec du sel fondu.

Le thème du stockage est crucial. Pour l'instant, les moyens en ce domaine restent insuffisamment mis en oeuvre. C'est par excellence l'axe d'une Europe de l'énergie, parallèlement aux réseaux intelligents.

Avec le précédent ministre de l'écologie - un poste instable s'il en est au sein du gouvernement actuel - j'ai visité le centre de pilotage national de GRDF. Des logiciels mis en place depuis trois ans permettent d'économiser plus de 10 % du gaz, sans le moindre inconvénient pour les consommateurs finals.

À propos des gaz non conventionnels, il faut être extrêmement prudent. Une grande partie des pertes subies par EDF à l'international est liée à un investissement dans une société de gaz conventionnel qui a très vite perdu 80 % de sa valeur. C'est une dépense cachée de l'énergie.

Certes, le gaz de schiste a temporairement transformé la situation aux États-Unis, mais le potentiel européen est bien plus modeste, pour des raisons de configuration géologique. Ainsi, les ressources effectives de la Pologne n'atteignent qu'un dixième de ce que faisait miroiter les promesses d'il y a quatre ans ! Résultat : Exxon-Mobil et Chevron vont se retirer. Une bulle spéculative se dessine en Grande-Bretagne autour du gaz de schiste. Nous verrons ce qu'elle donnera !

Je n'ai pas compris si la recommandation inscrite à ce propos dans le rapport concernait la France ou toute l'Europe.

L'énergie nucléaire ne peut jouer qu'un rôle de transition.

Le rapport mentionne la France comme producteur européen de premier plan dans le domaine des énergies renouvelables. J'ai des doutes, sauf à inclure le nucléaire parmi les énergies renouvelables... S'agit-il d'une production en valeur relative ou absolue ?

J'ai rencontré le secrétaire d'État aux affaires européennes, M. Harlem Désir. On parle d'une Europe de l'énergie, mais le débat porte en fait sur l'énergie et sur le climat. La Commission européenne fait passer à la trappe l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables, pour se concentrer sur les seules émissions de gaz à effet de serre. La politique européenne doit comporter des indications sur l'efficacité énergétique et sur le mix énergétique, malgré la compétence des États membres en ce domaine.

Enfin, j'observe que l'actualité internationale illustre l'enjeu géostratégique de la dépendance énergétique.

Les entreprises allemandes payent leur électricité à des tarifs doubles de ceux appliqués en France, mais leur compétitivité n'en a guère souffert.

Ces réserves n'enlèvent rien au mérite du rapport, très documenté.

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