Je remercie M. le rapporteur de son travail.
La Commission européenne propose un certain nombre de mesures visant à poursuivre la libéralisation du marché européen de l'électricité, dont la suppression des tarifs réglementés. Le marché, paré de toutes les vertus, est censé supplanter les politiques nationales pour l'approvisionnement en électricité.
Or les imperfections du marché peuvent légitimer l'intervention des pouvoirs publics. L'électricité est un bien de première nécessité, ce que la Commission européenne semble oublier... Nous nous opposons à la remise en cause des dispositifs de protection des consommateurs : tarifs réglementés, aide aux personnes en situation de précarité. Nous proposerons des amendements sur ces points.
Le marché de capacités a été mis en place en France car l'électricité n'est pas une énergie stockable. Certes, la Commission européenne ne le remet pas en cause. Mais elle le conditionne à quelques contreparties d'aménagement, comme la révision annuelle, ce qui serait facteur d'incertitude sur la pérennité même des mécanismes.
En matière de réduction des gaz à effet de serre, le grand absent du paquet est la réforme du marché carbone, aujourd'hui particulièrement défaillant.
Par ailleurs, la Commission européenne propose, sans bénéfice avéré pour les citoyens, de nombreux transferts de compétences qui méconnaissent le principe de subsidiarité. Ainsi, nous pouvons être très préoccupés face à certaines propositions qui constituent un transfert de souveraineté des États vers l'Europe en matière de sécurité d'approvisionnement. Je pense par exemple à la proposition de création de centres opérationnels régionaux, les fameux « ROC » (regional operational centers). Véritables entités supranationales, ceux-ci accapareraient les pouvoirs dévolus au gestionnaire de réseau de transport, notamment RTE, avec une perte de maîtrise de nos conditions d'approvisionnement.
D'une manière générale, le groupe socialiste s'étonne de l'approche suspicieuse de la Commission européenne. Nous souhaitons rappeler que la sécurité énergétique est une compétence partagée de l'Union européenne et des États.
Autre problème, le paquet prévoit l'ouverture aux capacités étrangères des mécanismes nationaux. Nous ne pouvons pas être hostiles à l'idée que les mécanismes ne doivent pas soutenir les centrales émettant plus de 550 grammes de CO2 par kilowattheure. Mais nous ne sommes pas favorables à la proposition visant à exonérer les mécanismes de type réserve stratégique de certains États membres de toute participation transfrontalière. Selon nous, il ne serait pas acceptable que la France soit dans l'obligation de financer les centrales d'Allemagne ou de Belgique sans que la réciproque soit vraie. Bref, la participation transfrontalière doit être imposée à tous ou à personne !
Mon sentiment est que, à travers cette proposition sur les mécanismes de capacité, la Commission européenne cherche à limiter le champ d'application des politiques énergétiques nationales. Sa stratégie est peut-être moins visible, moins frontale, mais il s'agit bien de faire en sorte que la responsabilité sur la sécurité d'approvisionnement quitte l'échelon national. Voilà, sous des dehors parfois techniques, l'objectif caché de la Commission européenne.
Nous partageons plusieurs objectifs de la présente proposition de résolution, comme l'élaboration par les États membres de mécanismes de capacité dans un cadre de réciprocité. Encore une fois, je ne comprends pas que la Commission européenne exonère le système allemand, dénommé « réserve stratégique », de toute participation transfrontalière au prétexte qu'il s'agirait d'un palliatif limité dans le temps, alors que l'essor des énergies renouvelables en Allemagne ne permet pas une telle limitation dans le temps ! Il suffirait que tous les États membres présentent leur système comme temporaire pour que la France soit la seule à rémunérer des centrales étrangères !
Nous soutenons donc cette proposition de résolution, ainsi que les amendements du rapporteur. Nous en déposerons également sur la précarité énergétique, les tarifs réglementés, la tarification dynamique ou l'évaluation de l'efficacité du marché intérieur de l'énergie.