Intervention de Michel Billout

Commission des affaires européennes — Réunion du 8 décembre 2011 : 1ère réunion
Normes prudentielles applicables aux banques communication de m. michel billout et proposition de résolution portant avis motivé

Photo de Michel BilloutMichel Billout, rapporteur :

Le sujet ne fait pas polémique : l'ensemble des groupes au Parlement européen soutient ces propositions.

Selon le premier alinéa de l'article 443 proposé par la Commission européenne, « La Commission est habilitée, notamment sur recommandation ou avis du Comité européen du risque systémique (CERS), à adopter des actes délégués conformément à l'article 445 pour imposer, pour un laps de temps limité, des exigences prudentielles plus strictes pour toutes les expositions ou pour celles sur un ou plusieurs secteurs, régions ou Etats membres, dans la mesure nécessaire pour réagir à d'éventuelles variations d'intensité des risques micro et macroprudentiels dues à l'évolution du marché après l'entrée en vigueur du règlement ».

La Commission européenne se fonde sur l'article 290 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Les deux premiers alinéas disposent : « Un acte législatif peut déléguer à la Commission le pouvoir d'adopter des actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels de l'acte législatif. Les actes législatifs délimitent explicitement les objectifs, le contenu, la portée et la durée de la délégation de pouvoir. Les éléments essentiels d'un domaine sont réservés à l'acte législatif et ne peuvent donc pas faire l'objet d'une délégation de pouvoir ».

Or, l'acte délégué visé à l'article 443 de la proposition de résolution dépasse le cadre habituel. Il autorise le recours à un acte délégué sur une base à la fois très étendue et très imprécise : « d'éventuelles variations d'intensité des risques micro- et macroprudentiels ». Une formulation aussi large permet de couvrir un vaste éventail de situations allant d'un simple risque pour, par exemple, le crédit immobilier dans un Etat jusqu'à une crise grave. D'ailleurs, l'article ne comporte aucune référence explicite à une situation d'urgence : il mentionne seulement une procédure d'urgence. Les autres articles sont bien plus précis.

Comment l'article 443 s'insère-t-il dans les compétences déjà attribuées ? Quatre règlements européens entrés en application le 1er janvier ont créé le Conseil européen du risque systémique (CERS), chargé d'apprécier les risques macroprudentiels, et trois autorités européennes de surveillance (AES) en charge chacune d'un risque micro-prudentiel. Le premier transmet toute information sur une dégradation du risque au Conseil, lequel est compétent pour constater l'urgence de la situation. Particulièrement dans ce cas, le CERS formule des recommandations, qui peuvent être générales ou spécifiques, confidentielles ou publiques, adressées à une ou plusieurs autorités de surveillances nationales, une ou plusieurs AES, un ou plusieurs Etats membres ou à l'ensemble de l'Union. Les AES ont le pouvoir d'imposer des décisions en cas de défaillance des autorités nationales.

Alors que le partage des compétences est très précis et conforme au principe de subsidiarité, l'article 443 vient transformer cette architecture, la Commission pouvant modifier une répartition des compétences établie par les institutions de l'Union, le Conseil et le Parlement.

Cumulée avec l'imprécision juridique entourant la mise en oeuvre de l'article, l'absence de motivation rend difficile l'appréciation que nous devons porter quant au respect du principe de subsidiarité. La Commission européenne est-elle la plus à même de prendre des mesures de renforcement des fonds propres ? Il faudrait l'établir et la Commission ne le fait pas. Or, en cas d'incendie, on s'adresse à la caserne de pompiers la plus proche... Il me semble que les autorités nationales prendront rapidement et efficacement les mesures nécessaires.

C'est pourquoi je vous propose, sans remettre en question la démarche du paquet CRD IV, d'adopter une résolution portant avis motivé sur la conformité de l'article 443 au principe de subsidiarité. Sept parlements nationaux s'interrogent à ce titre, parfois pour des raisons de fond, mais toujours avec des arguments de forme faisant référence à la subsidiarité. Le diable se cache dans les détails, et il ne faudrait pas que la faiblesse de rédaction de l'article 443 soit dommageable à l'ensemble de la proposition législative.

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