Intervention de Jean Bizet

Commission des affaires européennes — Réunion du 10 décembre 2015 à 9h35
Politique étrangère et de défense — Audition en commun avec la commission des affaires étrangères de la défense et des forces armées de M. Hervé Bléjean contre-amiral vice-commandant de l'opération militaire de l'union européenne dans la partie sud de la méditerranée centrale eunavfor med-sophia sur la lutte contre les trafics d'êtres humains en méditerranée

Photo de Jean BizetJean Bizet, président :

L'idée d'une COSAC de la défense a du bon, en effet... Cette audition commune était très instructive, merci. J'apporte mon plein soutien aux propos de M. Gautier. Comme lui, j'estime qu'il est urgent de sortir l'Europe de la défense du domaine du concept pour la faire entrer dans celui de 1'opérationnel. La tâche ne sera pas aisée. À l'exception peut-être du Royaume-Uni et de l'Allemagne, nombreux sont nos partenaires qui s'illusionnent encore sur l'efficacité d'un parapluie américain qui pourtant s'étiole d'année en année. À moins qu'ils ne s'en remettent, en fin de compte, à la puissance militaire de quelques États membres et notamment de la France qui ne peut plus être, pourtant, sur tous les fronts. Alexandre Adler a récemment dressé un panorama inquiétant d'une Turquie turbulente, avec un M. Erdogan à la dérive, sans parler de Chypre, qui reprend une dimension stratégique. Aussi ai-je invité l'ambassadeur de Chypre à nous voir.

Avant de rassembler les moyens, il importe de définir une stratégie. L'étape préalable indispensable peut être cette stratégie européenne de sécurité décidée lors du sommet européen de juin 2015 et dont la définition a été confiée à la Haute représentante, Mme Federica Mogherini, en collaboration avec les États membres.

Il faut donner à l'opération Sophia toute sa dimension pour lutter efficacement contre les passeurs et les trafics d'êtres humains en Méditerranée. Elle devra, dès que possible, être étendue sous mandat de l'ONU afin de pouvoir intervenir dans les eaux territoriales libyennes.

La lutte contre le terrorisme est un autre défi immense dont on mesure bien les différentes dimensions, intérieures, européennes ou internationales. En avril 2015, après les attentats de janvier, le Sénat a demandé l'adoption d'un véritable Acte pour la sécurité intérieure de l'Union européenne. Nous ne souhaitions pas, toutefois, qu'il ressemble à un Patriot Act. Cela dit, nos adversaires ne s'embarrassent pas de précisions sémantiques. On en attend encore la concrétisation, malgré la mise en place d'un système PNR européen.

Un tel Acte devrait avoir un volet complémentaire en matière de défense. Vous avez évoqué les résultats décevants chez nos partenaires après l'invocation, par le Président de la République, de l'article 42 § 7 du Traité sur l'Union européenne. Nous devons nous interroger sur la portée du traité dans ce domaine essentiel.

Un autre article aurait pu être invoqué après les attentats : l'article 222 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui établit une clause de solidarité en cas d'attaque terroriste contre un État membre. Dans ce cas, l'Union doit mobiliser tous les instruments, « y compris les moyens militaires mis à sa disposition par les États membres. » Toujours est-il que nous allons travailler ensemble à une proposition de résolution européenne commune à nos deux commissions. Le Sénat pourra ainsi affirmer clairement la nécessité d'un engagement beaucoup plus résolu des Européens dans l'enjeu crucial de la défense.

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