Le 4 octobre dernier, notre commission a adopté à l'unanimité un projet d'avis motivé sur la subsidiarité concernant un texte relatif au contrôle technique des véhicules. Le texte prévoyait d'étendre le contrôle technique obligatoire aux véhicules à deux et trois roues, soit les cyclomoteurs, les vélomoteurs, les motos ou les scooters à trois roues. Le texte envisageait également une augmentation de la fréquence des contrôles techniques pour tous les véhicules. La Commission souhaitait par ce biais atteindre l'objectif d'une réduction de moitié du nombre de victimes de la route d'ici à 2020. Elle visait également à réduire les émissions associées au mauvais entretien des véhicules.
Je rappelle brièvement les arguments que nous avions retenus :
- en l'état actuel des données disponibles, aucun lien ne pouvait être établi entre une réduction du nombre d'accidents et l'introduction du contrôle technique sur les motocycles ;
- la Commission européenne s'appuyait sur des documents émanant de Dekra, un des leaders européens du contrôle technique ;
- la dimension transfrontalière de la circulation des véhicules à deux et trois roues demeurait limitée et ne pouvait constituer un argument valable en faveur d'une harmonisation européenne ;
- enfin, l'augmentation de la fréquence des contrôles techniques pour les automobiles apparaissait contradictoire avec leur évolution technologique qui les rend plus fiables plus longtemps. Par ailleurs, les véhicules les plus anciens appartenant généralement à des conducteurs aux revenus modestes, l'intensification des contrôles qui était proposée constituait une lourde charge pour leurs propriétaires, dont il devrait revenir à chaque État membre d'apprécier l'opportunité.
Cette proposition de résolution portant avis motivé est devenue résolution du Sénat le 22 octobre 2012, après que la commission du développement durable l'a adopté sans modification. L'Assemblée nationale a également, dans la foulée adopté un texte en ce sens. Malheureusement, bien que nos réserves aient rencontré un écho dans plusieurs États membres, le nombre d'avis motivés adoptés au sein d'autres parlements nationaux n'a pas été suffisant pour déclencher la procédure du « carton jaune » et pousser la Commission à réviser son projet.
Il n'en demeure pas moins que notre avis a été utilisé par le gouvernement français lors des négociations au Conseil. La « fiche d'impact » sur ce texte préparée par le Secrétariat général du gouvernement reprenait ainsi nos arguments.
Et ces arguments ont porté, puisque le Conseil s'est accordé le 20 décembre 2012 sur une révision en profondeur du texte. Le projet de règlement est devenu projet de directive, le texte ne vise plus les deux et trois roues et la fréquence des contrôles n'est plus augmentée. Les débats au Conseil ont permis à un certain nombre d'États, dont la France, de faire valoir que les données d'accidentologie disponibles ne justifiaient pas la mise en place d'un contrôle obligatoire.
Cet exemple précis montre que nos positions sont écoutées et prises en compte par le Gouvernement et qu'elles contribuent au débat européen.
Les débats au Parlement européen ont, dans un premier temps, abouti au même résultat. La commission des transports et du tourisme a ainsi rejeté le contrôle technique des deux et trois roues et maintenu les fréquences de contrôle existantes pour les voitures lors d'un vote sur le texte le 30 mai dernier.
Cependant, le vote en séance plénière a donné lieu à l'adoption, le 2 juillet dernier, d'un amendement réintroduisant le contrôle technique pour les deux roues. Les cylindrées de plus de 50 cm3 y seraient soumises à partir du 1er janvier 2016. Les plus petites cylindrées seraient concernées à compter du 1er janvier 2018, si un rapport de la Commission le juge utile. En revanche, comme le Conseil, le Parlement européen n'a pas retenu les contrôles techniques plus fréquents pour les voitures de plus de six ans.
Dans le cadre de la procédure de codécision, le texte est désormais renvoyé à la commission des transports et du tourisme qui va négocier avec les représentants des États membres la version définitive du texte. Il n'est pas interdit de penser qu'un nouveau revirement peut intervenir et que le texte final nous donnera entière satisfaction. Je vous propose, cependant, de réaffirmer notre position en adoptant les conclusions qui vous ont été distribuées.
Si la proposition de règlement venait à être adoptée en l'état, il nous resterait également la possibilité d'utiliser la procédure dite du « carton rouge », qui permet au Sénat de déposer un recours devant la Cour de Justice pour non-respect du principe de subsidiarité.