Intervention de Pierre Lequiller

Commission des affaires européennes — Réunion du 30 mars 2011 : 1ère réunion
La réforme de la gouvernance économique européenne et le pacte pour l'euro rencontre avec les membres français du parlement européen en commun avec la commission des affaires européennes de l'assemblée nationale

Pierre Lequiller, président de la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale :

Chers collègues députés et sénateurs, chers collègues membres du Parlement européen, je suis heureux, avec Pierre Bernard-Reymond, qui représente ici le président de la commission des affaires européennes du Sénat, Jean Bizet, de vous accueillir pour la cinquième édition de nos rencontres conjointes depuis février 2010, ce qui en fait désormais une tradition, et même une excellente tradition.

Je dois vous transmettre les excuses d'Alain Lamassoure et de Jean-Paul Gauzès, députés européens, ainsi que de Michel Herbillon, député, qui n'ont pu se joindre à nous aujourd'hui - sans oublier le Président Bizet, en déplacement en Turquie.

Je remercie les membres du Parlement européen d'être venus aujourd'hui particulièrement nombreux pour cette réunion sur la gouvernance économique. Sur mon invitation, le président de notre commission des finances, Jérôme Cahuzac, et le rapporteur général ont annoncé leur intention de nous rejoindre. Malheureusement, je serai moi-même obligé de vous quitter en cours de réunion pour introduire dans l'hémicycle le débat sur « Europe et Méditerranée » - mais Jérôme Lambert, vice-président de notre commission, saura me remplacer très avantageusement.

Notre débat économique et financier d'aujourd'hui entre parlementaires nationaux et européens est non seulement essentiel sur le fond, mais il intervient aussi à un moment particulièrement opportun, alors que des décisions essentielles ont été prises dans ce domaine par le Conseil européen, et que la discussion du paquet de six textes législatifs sur la gouvernance économique progresse fortement au Parlement européen, son adoption pouvant même être espérée pour la fin du printemps.

Sur le fond, il faut s'arrêter un instant pour mesurer les progrès accomplis.

Qui aurait pu penser en effet, il y a seulement deux ans, que nous puissions discuter désormais des éléments concrets de ce que l'on ne peut plus hésiter à appeler un « gouvernement économique européen » - termes qui, dans nos réunions avec la commission allemande homologue, suscitait à l'époque scepticisme, voire hostilité plus ou moins larvée ? Ces progrès doivent bien sûr beaucoup à la crise, qui a brutalement rappelé, l'année dernière, combien une monnaie unique non adossée à un projet économique partagé pouvait nous rendre vulnérables.

Je profite de l'arrivée parmi nous de Jérôme Cahuzac pour le remercier de la réflexion que nous avons pu avoir ensemble, avec le rapporteur général, pour que l'Assemblée nationale s'approprie pleinement cette nouvelle donne européenne.

Je me félicite que l'Europe ne se soit pas contentée de colmater les brèches, dans l'urgence, et que le Conseil européen ait su approuver, la semaine dernière, un édifice complet, fondé sur deux piliers d'égale importance.

Le premier, la convergence progressive de nos politiques économiques, est d'abord bien sûr une affaire de responsabilité collective et morale en matière de maîtrise des finances publiques, tant il est vrai que nous acquittons collectivement le prix des erreurs du passé et de la défiance des marchés par des taux d'intérêt plus élevés. Mais la réforme du pacte de stabilité est plus ambitieuse et tire heureusement les enseignements de la crise en ne se contentant pas de renforcer les sanctions - évolution indispensable -, mais également en intégrant le fait que la vision étroite de la dette ramenée au PIB était beaucoup trop restrictive et ne permettait pas de prendre conscience des dangers systémiques - tels que ceux représentés par le système bancaire ou encore par la situation de l'immobilier - susceptibles d'affecter la zone euro, à l'exemple de ce qui s'est passé en Irlande. Tel est l'objectif de la surveillance macro-économique introduite par la réforme proposée. Nous évoquerons précisément ces sujets à travers les textes en discussion relatifs à la gouvernance économique.

Le « pacte pour l'euro plus » constitue lui aussi une étape essentielle, qui était loin d'être acquise voilà quelques mois ou même quelques semaines : tout d'abord parce qu'il exprime le fait, reconnu par les dix-sept pays utilisant la monnaie unique, qu'avoir une monnaie commune implique un niveau d'obligation et de convergence renforcé ; ensuite, sur le fond, parce qu'il exprime l'engagement commun à remettre nos économies sur les rails de la compétitivité, sur la durée, au service de la croissance et de l'emploi, grâce à des engagements précis et fermes et à une évaluation régulière et ambitieuse entre pairs, sans pour autant aligner nos politiques sur des modèles figés et uniques. Je salue notamment le fait que le pacte pour l'euro ne vise pas seulement la maîtrise indispensable des finances publiques, l'évolution des salaires et des régimes de retraites, mais aussi la convergence fiscale, les investissements d'avenir, en matière de recherche, d'éducation, d'infrastructures - l'action de la France a été déterminante sur ce point.

Je vous propose donc que nous débattions de ces questions de gouvernance économique dans un premier temps, en étant particulièrement attentif à notre responsabilité parlementaire commune dans le défi qu'est l'enracinement démocratique de ces nouvelles procédures, dans le cadre du « semestre européen », qui s'applique cette année pour la première fois. Nous aborderons dans ce cadre les six propositions législatives sur le renforcement de la gouvernance économique européenne, et nos collègues du Parlement européen nous exposeront les points qui leur paraissent essentiels dans la discussion sur ces textes.

Nous aborderons, ensuite, le second pilier nécessaire d'un gouvernement économique équilibré, les aspects financiers, et d'abord la question, urgente, des crises de dettes souveraines. L'Europe, ici au pied du mur, s'est montrée à la hauteur de ses responsabilités. Avec 440 milliards d'euros de prêts effectifs, et même 500 milliards à partir de 2013, nous voilà solidement armés pour faire face aux éventuels assauts des marchés. Surtout, les modalités de fonctionnement du fonds, sur le marché des dettes comme s'agissant de l'implication du secteur privé, ont été clarifiées et renforcées.

Nous pourrons aussi évoquer, dans ce deuxième temps de notre débat : les projets de taxes financières, comme les nombreuses et innovantes propositions sur les eurobonds, soit qu'ils financent des grands travaux européens, soit qu'ils couvrent une partie des dettes nationales, soit, de manière me semble-t-il plus réaliste, qu'ils utilisent l'effet de levier de la Banque européenne d'investissement (BEI) en garantissant des investissements d'infrastructures afin d'abaisser leurs seuils de rentabilité pour le secteur privé. Il sera particulièrement intéressant, là encore, que nos collègues députés européens nous fassent part de leurs réflexions et propositions sur ces sujets.

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