Le 13 juillet dernier, la Commission européenne a présenté une communication relative à la liberté pour les États membres d'accepter ou non les cultures d'OGM, accompagnée d'une proposition législative, que la Commission a souhaité voir adopter rapidement. Dans ce but, elle propose de réviser la directive de 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés par un règlement.
Que propose ce texte ? Un article 26 ter serait ajouté à la directive de 2001. Il énonce que « les États membres peuvent adopter des mesures visant à restreindre ou à interdire, sur tout ou partie de leur territoire, la culture de tous les OGM, ou de certains d'entre eux » autorisés au niveau de l'Union. On ne modifie pas le dispositif que vient d'énoncer notre collègue, mais on ajoute une possibilité nouvelle pour les États membres. Pour la Commission, la mise sur le marché et l'importation de semences OGM ne sauraient faire l'objet d'aucune entrave dans le cadre du marché intérieur. En revanche, concernant la mise en culture, elle propose ce qu'elle appelle une « clause de non-participation ».
Le texte indique ensuite qu'une mesure d'interdiction de mise en culture ne pourrait être fondée que sur des motifs « autres que ceux qui ont trait à l'évaluation des incidences négatives sur la santé et l'environnement ». Cette précision vise à distinguer clairement :
- d'une part, le mécanisme des clauses de sauvegarde qui demeure de la compétence européenne et qui reste fondé sur les risques pour la santé et l'environnement ;
- d'autre part, la non-participation volontaire qui serait de compétence nationale.
Or quels seraient les motifs qui permettraient à un État d'interdire la mise en culture ? Le texte ne le précise pas. Dans sa communication du 13 juillet, la Commission évoque des problèmes nationaux ou locaux posés par la culture d'OGM, qu'ils soient d'ordres socio-économique, éthique ou sociétal... Cela reste flou et vague !
Que penser de ce texte ? En plus de l'absence de définition des motifs d'interdiction que je viens d'évoquer, ce texte soulève trois types d'interrogations.
Tout d'abord, en quoi répond-il aux conclusions du conseil du 4 décembre 2008 ? Comme l'a rappelé à l'instant Richard Yung, des priorités avaient alors été dégagées. Des réflexions et des études sont encore en cours, mais aucune n'a encore abouti. Pourquoi un tel empressement de la part de la Commission ? Elle donne l'impression de vouloir purement et simplement se débarrasser d'un problème qui a gêné le précédent collège en renvoyant la responsabilité des décisions vers les États membres.
Ensuite, le texte pose un problème d'ordre juridique concernant les règles de l'Organisation mondiale du commerce. L'OMC n'admet de restriction aux échanges commerciaux qu'en cas de risque démontré scientifiquement pour la santé publique ou l'environnement. Ce sont les clauses de sauvegarde. Que se passerait-il si un ou plusieurs États membres interdisaient sur leur territoire la mise en culture et donc le commerce d'OGM destinés à la culture sur la base de critères socio-économiques ? Le risque d'un contentieux devant l'OMC est grand et la Commission européenne n'a pour l'instant pas apporté la preuve du contraire.
Enfin, ce texte pose question tant au regard du marché intérieur que de la politique agricole commune. La proposition vise à « renationaliser » des choix politiques qui relèvent jusqu'à présent de l'Union européenne. Bien que la Commission s'en défende, ce dispositif porterait atteinte à l'unité du marché intérieur. De plus, à la veille de l'ouverture des discussions sur la réforme de la PAC, une telle initiative apporterait de l'eau au moulin des partisans d'une renationalisation des politiques agricoles.