Intervention de Fabienne Keller

Commission des affaires européennes — Réunion du 7 mai 2015 à 8h35
Transports — Suivi des résolutions européennes du sénat : méga-camions : communication de mme fabienne keller

Photo de Fabienne KellerFabienne Keller :

Monsieur le Président, mes chers collègues, notre commission des affaires européennes a examiné, le 5 juin 2013, le rapport que j'avais présenté sur la circulation des mégacamions et le fret routier européen. Elle avait, à cette occasion, adopté une proposition de résolution européenne, devenue résolution du Sénat le 9 juillet.

Le rapport comme la résolution portait principalement sur la révision de la directive du 25 juillet 1996 « fixant pour certains véhicules routiers circulant dans la Communauté, les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international ». La résolution visait également une proposition de règlement modifiant la législation sur le contrôle du temps de conduite des routiers.

La procédure de révision est arrivée à son terme le 20 avril 2015, à l'issue d'un dernier vote du Conseil. Il est donc légitime aujourd'hui de comparer les suggestions du rapport et de la résolution avec le résultat des négociations conduites au niveau de l'Union européenne.

J'aborderai donc successivement les trois points ayant fait l'objet de la résolution européenne, à savoir le franchissement des frontières par les mégacamions, le tachygraphe, qui contrôle le temps de travail des chauffeurs et enfin le dumping social.

La circulation des mégacamions constituait le thème principal de la résolution européenne.

Les mégacamions sont, je vous le rappelle, des poids lourds dont la taille est comprise entre 18,75 et 25,25 mètres et le poids varie entre 40 et 60 tonnes. Leur circulation n'est, pour l'heure, pas autorisée en France.

La directive de 1996 ne faisait pas obstacle à ce que les États membres autorisent la circulation sur leur territoire de véhicules excédant les dimensions et poids maximaux. À la double condition qu'ils ne participent qu'à des opérations de transport national de marchandises et que leur circulation n'affectent pas, de façon notable, la concurrence internationale.

Répondant à une demande de la commission des transports du Parlement européen, la Commission européenne avait estimé dans une lettre, datée de juin 2012, que la directive de 1996 permettait le franchissement par ces engins de la frontière séparant deux États membres qui chacun autorise leur circulation. La livraison devait néanmoins être effectuée dans le deuxième État membre. En revanche, la traversée successive de deux frontières avec un tel chargement reste interdite. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'au sens de la directive, aucune opération de transport national de marchandises n'aurait eu lieu sur le territoire de l'État de transit.

La Commission a souhaité officialiser en quelque sorte cette solution dans la proposition de révision de directive. Notre résolution européenne a d'ailleurs approuvé cette approche.

Jugée dangereuse, cette disposition a été supprimée par le Parlement européen le 10 mars dernier lors de l'examen en seconde lecture du texte. La nouvelle Commission européenne n'a pas contesté cet amendement dans l'avis qu'elle a transmis au Conseil. En refusant cette option le législateur rend caduque l'interprétation formulée en juin 2012. Une incertitude juridique est au moins levée.

J'en viens maintenant au contrôle du temps de conduite, qui n'est pas sans incidence en matière de sécurité routière.

Notre principale interrogation concernait les « tachygraphes intelligents ». Ces dispositifs permettent de vérifier le temps de conduite et de repos des routiers. Notre résolution européenne approuvait leur généralisation.

Un règlement adopté en février 2014 va dans ce sens en obligeant à doter les nouveaux poids lourds de cet équipement à partir de 2018. Le reste de la flotte aura quinze ans pour s'équiper. Notre résolution européenne tablait sur une mise en service généralisée à l'horizon 2020. Nous n'avons donc été que partiellement entendus.

La résolution européenne abordait enfin la question du dumping social et plus particulièrement celle du cabotage. Je précise que cette question n'était pas réglée par les textes sur lesquels nous nous sommes prononcés.

La précédente Commission européenne s'était simplement montrée favorable à une libéralisation totale de cette activité. Il s'agissait, pour elle, de faire baisser le coût de la logistique, tout en répondant à des préoccupations environnementales.

Notre commission a pris position contre toute extension de cette tolérance, voire pour sa restriction. Elle a, à plusieurs reprises, rappelé plus largement son attachement à l'harmonisation sociale au sein de l'Union.

Aucune avancée notable sur la question du cabotage n'a été pour l'heure enregistrée. Le débat reste, cependant, ouvert, puisque la Commission Juncker prépare actuellement un « paquet routier ».

La commissaire aux transports, Mme Violetta Bulc, de nationalité slovène, a déclaré que tous les sujets sociaux seraient abordés à cette occasion. Le paquet devrait être présenté en trois temps. Fin 2015, des propositions sur les infractions graves et le salaire minimum devraient ainsi être avancées. Elles seraient suivies, début 2016, d'une communication sur l'Eurovignette, la formation des chauffeurs et la sécurité des infrastructures routières. Enfin, l'ouverture accrue du marché et donc la question du cabotage, la création d'une Agence européenne de la route ainsi que l'ensemble des autres mesures sociales, je pense au régime des chauffeurs détachés, seraient abordés fin 2016.

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