Je serai pour ma part beaucoup moins optimiste : on n'a jamais vu l'Union européenne bien négocier avec les États-Unis. Nous constatons déjà avec quelles difficultés se déroule la négociation avec le Canada, qui a fait découvrir à l'Union européenne le fédéralisme canadien. Nous aurons certainement des surprises aussi avec les États américains. Il me semble par ailleurs que nous avons un vocabulaire imprécis en matière d'exception culturelle : l'exception culturelle ne doit pas concerner seulement les services audiovisuels - elle devrait plus largement couvrir l'ensemble des services culturels en ligne qui relèvent aujourd'hui de la directive « services » - et elle ne peut pas non plus être assimilée à la diversité culturelle. Je dois avouer que la philosophie du commissaire européen chargé du commerce me rend inquiet pour ce qui concerne la défense des intérêts français et européens. Je déplore, comme vous l'avez fait dans votre texte, l'absence d'étude d'impact sérieuse et fouillée au niveau national.
Puisque les droits de douane entre l'Union européenne et les États-Unis sont déjà très faibles, autour de 3,5 %, l'enjeu de l'accord porte essentiellement sur les questions non tarifaires, mais, en ce domaine, je crains que nous passions à côté de l'enjeu majeur que représente le dumping fiscal. En matière de jeu vidéo, par exemple, le Canada pratique un crédit d'impôt qui favorise l'installation d'entreprises et donc de salariés dont la présence sur place finit à long terme par rapporter beaucoup à cet État. Certains États américains font même de la surenchère en matière de dumping fiscal, dans la perspective de la rentabilité ultérieure qu'ils peuvent en tirer. Du côté de l'Union européenne, nous sommes très contraints en ce domaine. Je suis donc dubitatif. Je reste également soucieux de protéger les droits des consommateurs.