La Turquie a une situation géostratégique particulière, avec un pied en Europe et un pied au Moyen-Orient. Elle a traversé plusieurs phases : d'abord laïque, elle a donné le droit de vote aux femmes avant la France, avant de connaître une montée en puissance du sentiment religieux, sur laquelle s'appuie M. Erdogan. Son évolution démographique conduit une abondante population rurale dans les villes, où elle constitue la base électorale de l'AKP. Ce pays charnière, complexe, ne saurait être assimilé à son dirigeant, ni à l'AKP. Il y existe des forces démocratiques, même si elles sont rudoyées, et des kémalistes, même s'ils sont marginalisés. Nous devons dialoguer avec la Turquie pour la faire évoluer en fonction de nos intérêts communs. M. Erdogan n'est pas politiquement immortel...
Sur la question migratoire, sur les conflits en Irak et en Syrie, nous devons discuter avec la Turquie. Et en matière économique, veillons à ce qu'elle ne se tourne pas vers d'autres partenaires, comme la Chine et le Japon. Déjà, ses investissements dans les Balkans et les pays de l'ex-URSS sont considérables. Bref, l'Union européenne doit sortir du flou dans lequel elle maintient sa relation avec la Turquie, en décidant si celle-ci peut entrer dans l'Union - ce à quoi la majorité des Européens sont opposés - ou non, auquel cas nous devons engager une vraie collaboration avec elle.