Intervention de Evangelos Venizélos

Commission des affaires européennes — Réunion du 14 janvier 2014 : 1ère réunion
Institutions européennes — Audition de M. Evangelos Venizélos vice-premier ministre et ministre des affaires étrangères du gouvernement grec et de M. Théodore Passas ambassadeur de grèce en france

Evangelos Venizélos, vice-Premier ministre et ministre des affaires étrangères du gouvernement grec :

Parmi les économistes qui ont proposé la scission de l'euro, il y a M. Pissarides, qui a eu le prix Nobel et est citoyen chypriote. Je suis formellement opposé à cette idée, qui signerait l'arrêt de mort de l'Union monétaire, surtout après l'expérience de la convergence par dévaluation interne qu'ont vécue la Grèce, l'Espagne, l'Italie, mais aussi la France et même les Pays-Bas ! Pour préserver la paix sur notre continent, il faut protéger l'union monétaire. Décidée il y a vingt ans, mise en oeuvre il y a onze ans, elle résulte d'une volonté politique forte. L'histoire de l'Union européenne est une histoire de volontarisme politique, ce qui, en France doit faire écho à la dimension gaullienne.

La troïka est un phénomène étroitement lié à la crise. J'ai expliqué quel est le fondement politique de la présence du FMI au centre de l'Europe. Il y eut plusieurs phases. Durant la première, la troïka était l'expression institutionnelle technique de ses trois composantes. Pendant la deuxième, elle est devenue la représentante politique des gouvernements, et surtout du gouvernement allemand, en contact avec ces institutions. Je respecte pleinement les prérogatives du Parlement européen, et je constate que la troïka cumule les obstacles démocratiques. La Commission est sous contrôle parlementaire, la Banque centrale dispose d'une autonomie institutionnelle, le FMI accueille les pays du monde entier sur le seul critère de leur PIB. L'UE est fondée sur la souveraineté et l'égalité institutionnelle des pays membres, la Banque centrale sur la force économique ; quant au FMI, il se caractérise par une certaine obscurité institutionnelle. Votre concitoyen Olivier Blanchard, chef économiste au FMI, dit que des erreurs ont été commises sur le multiplicateur fiscal de la Grèce. Cela s'est traduit par le fait que des sacrifices majeurs, des mesures fiscales hostiles au peuple et à l'économie réelle, pour un montant de 80 milliards d'euros, n'ont abouti qu'à un ajustement fiscal de 25 milliards d'euros : pour trois euros sacrifiés, l'ajustement n'a été que d'un euro ! Tels furent les effets d'erreurs non seulement politiques, mais aussi intellectuelles, méthodologiques, scientifiques. Ce n'est pas seulement un problème pour la Grèce, mais pour l'existence institutionnelle de l'Europe, la compétitivité de l'économie et l'équilibre entre Berlin et Paris : il y a des conséquences en chaîne.

Sur l'immigration illégale, nous avons pris des initiatives avec l'Italie, avec laquelle nous partageons cette priorité, dans le cadre de cette année méditerranéenne, au niveau du Conseil Affaires générales et du Conseil européen, avec la participation de neuf pays membres, afin de renforcer les compétences de Frontex et d'exploiter les possibilités du système Eurosur. L'Italie a proposé d'organiser des opérations militaires maritimes en Méditerranée. Mais il convient de distinguer interventions militaire et policière. Il y a, à n'en pas douter, une corrélation entre les crises au Proche-Orient et en Afrique du Nord et l'augmentation de l'immigration illégale. Il faut aussi distinguer la protection des réfugiés, selon les conventions de Genève et le droit d'asile, des problèmes de sécurité et d'immigration illégale. La distinction est parfois ténue, nous y travaillons avec la Commission et les pays méditerranéens, membres de l'UE ou non. La signature du récent accord entre la Commission et la Turquie est une avancée importante, mais la Turquie a déclaré exclure l'île de Chypre, ce qui pose un problème.

La Turquie veut faire partie d'une communauté de 28 pays mais refuse de reconnaître un de ses membres !

Des comportements extrémistes, tels l'incendie du drapeau, sont inacceptables à nos yeux, pas à ceux de la Cour suprême des États-Unis, comme en atteste sa jurisprudence constante, au nom de la liberté d'expression. Je me reconnais dans les principes qui prévalent en Europe...

M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. - Nous sommes confrontés à de tels débats en France en ce moment.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion