Intervention de Laurent Wauquiez

Commission des affaires européennes — Réunion du 22 mars 2011 : 1ère réunion
Audition de M. Laurent Wauquiez ministre chargé des affaires européennes dans le cadre du débat préalable au conseil européen en commun avec la commission de l'économie du développement durable et de l'aménagement du territoire et est ouverte à tous les sénateurs

Laurent Wauquiez, ministre chargé des affaires européennes :

Mesdames, messieurs les sénateurs, ce qui va être intéressant pour vous - c'est en tout cas mon opinion - sera de travailler avec les parlementaires européens. Incontestablement, vous êtes un levier de l'influence de la France. La capacité du Sénat à être un relais des préoccupations françaises et à faire oeuvre de conviction auprès de nos partenaires sera absolument déterminante.

La politique européenne n'est pas le fait du seul Gouvernement : l'enjeu parlementaire est décisif, surtout avec la montée en puissance du Parlement européen. Vous êtes donc tous des acteurs absolument déterminants pour aider la France à faire valoir ses positions et à s'approprier les décisions européennes.

J'en viens aux questions qui ont été soulevées par Fabienne Keller.

En ce qui concerne la convergence fiscale, il est certain que, depuis l'échec que nous avons connu voilà à peine quelques mois en matière de fiscalité sur l'énergie, un véritable changement de donne a eu lieu. L'onde de choc que tout le monde a subie a ouvert les esprits, et nous sommes plutôt optimistes sur les chances d'aboutissement d'une taxe carbone.

Certes, celle-ci ne sera pas évidente à mettre en place ; des problèmes très précis se posent. Nous avons toutefois une vraie opportunité d'y parvenir.

Surtout, nous devons partir d'une conviction simple : nous ne pourrons pas faire fonctionner le marché unique si des distorsions fiscales perdurent. Je ne comprends pas nos collègues anglais, qui plaident à tout va pour le marché unique et qui, dans le même temps, expliquent qu'il peut y avoir des distorsions fiscales. L'un ne peut pas aller avec l'autre.

Nous connaissons leur position, mais nous sommes désormais déterminés à avancer sans eux. Ils l'ont d'ailleurs bien compris et une telle attitude les ennuie fortement, mais nous l'assumons. La convergence fiscale est lancée et nous n'avons pas l'intention d'arrêter ce mouvement.

Concernant la taxe sur la transaction financière, j'ai probablement mal compris ceux d'entre vous qui ont parlé de « jouer petits bras ». Soyons clairs : qui plaidait dans le désert pour la mise en place d'une telle taxe et depuis combien de temps ? Les majorités successives ont plaidé pour ce sujet sans succès, sans susciter la moindre écoute, la moindre attention, dans une vraie solitude. Et qui arrive enfin à obtenir une première avancée dans le cadre d'un Conseil européen ?

Il faut savoir reconnaître les avancées. Vous avez raison de le souligner, Mme Keller : c'est la majorité actuelle qui, pour la première fois, est parvenue à faire inscrire la taxe sur la transaction financière sur l'agenda européen. C'est une avancée très importante et je vous remercie de l'avoir soulignée.

Au sujet de Strasbourg comme siège du Parlement européen, il n'y a aucune ambiguïté : c'est inscrit dans le traité et fait partie des équilibres fondamentaux. Nous saisissons la Cour de justice de l'Union européenne à ce sujet. Ce qui a été fait est inacceptable. Les amendements ont été déposés sous le boisseau, le scrutin a été fait à bulletin secret pour éviter que chacun assume son vote. C'est un coup de canif dans l'équilibre institutionnel et nous devons nous y opposer. Nous devons être offensifs.

Je ferai deux remarques à ce sujet.

Tout d'abord, si on veut supprimer tous les coûts de déplacement relatifs aux travaux des institutions européennes, alors installons-les toutes à Bruxelles ! Est-ce là ce que nous voulons ? Souhaitons-nous une Europe qui concentre tous ses décideurs et ses fonctionnaires dans les mêmes buildings, dans les mêmes quartiers, dans la même capitale ?

Ensuite se pose la question des valeurs sous-jacentes, comme certains d'entre vous l'ont très bien souligné. Strasbourg, c'est l'incarnation de la réconciliation franco-allemande, c'est l'Europe du citoyen, c'est l'Europe des Droits de l'homme. C'est aussi une Europe qui prend ses distances vis-à-vis de la sphère bureaucratique et des lobbies. Je ne suis pas sûr que cette Europe-là soit l'Europe du passé. J'en ai assez que nous la défendions frileusement ; il faut que nous soyons offensifs.

Certains veulent faire des économies ? Très bien ! Aucun problème ! Transférons toutes les institutions à Strasbourg ! Rapatrions tout : le travail des commissions, le travail des sessions. Cela ne présente aucune difficulté pour nous ! (Sourires.) Ce qui crée des problèmes, ce ne sont pas les sessions à Strasbourg, c'est le travail en commission à Bruxelles !

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