Intervention de Corinne Imbert

Mission d'information situation psychiatrie mineurs en France — Réunion du 18 janvier 2017 à 14h00
Audition conjointe des organisations représentant les spécialistes de la prise en charge psychiatrique des mineurs : professeur michel wawrzyniak président et docteur catherine lacour gonay membre du conseil d'administration de la société française de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent et disciplines associées sfpeada docteur patrick belamich président de la fédération des centres médico-psycho-pédagogiques fdcmpp et docteur roger teboul pédopsychiatre président de l'association des psychiatres de secteur infanto-juvénile api

Photo de Corinne ImbertCorinne Imbert, présidente :

Nous accueillons conjointement, pour cette nouvelle audition, les organisations représentant les spécialistes de la prise en charge psychiatrique des mineurs. Je vous prie d'excuser l'absence d'Alain Milon qui, ne pouvant pas assurer la présidence de cette audition aujourd'hui, m'a demandé de le remplacer au côté de Michel Amiel, rapporteur de cette mission d'information.

Votre audition est au coeur de nos travaux car nous nous intéressons, vous le savez, à la prise en charge psychiatrique des mineurs.

De ce point de vue, l'essentiel est bien de connaître le vécu et l'analyse des praticiens et particulièrement des spécialistes de la prise en charge psychiatrique des enfants et adolescents. Nous avons donc souhaité vous entendre et échanger avec vous. Je vous passe donc sans plus tarder la parole pour un bref propos introductif en vous demandant de bien vouloir présenter les associations que vous représentez.

Notre rapporteur, puis les autres sénateurs, vous poseront ensuite quelques questions.

Je rappelle que notre audition est ouverte au public et à la presse.

Professeur Michel Wawrzyniak, président du conseil d'administration de la Société Française de Psychiatrie de l'Enfant et de l'Adolescent et Disciplines Associées (SFPEADA). - Je vous remercie de votre invitation. Je suis professeur en psychologie clinique et président de la Société française de psychiatrie de l'enfant, de l'adolescent et des disciplines associées (SFPEADA), également représentée aujourd'hui par le docteur Catherine Lacour-Gonay. La SFPEADA est la plus ancienne au monde des sociétés savantes en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent. Une de ses caractéristiques fortes tient dans le fait que les pédopsychiatres ont ouvert cette société aux représentants des disciplines dites « associées » comme les orthophonistes, les psychologues, les infirmiers ou les éducateurs psychomotriciens.

Je souhaite, à ce titre, souligner le fait que je ne suis personnellement pas pédopsychiatre mais psychologue clinicien, professeur en psychologie clinique, formateur de psychologues cliniciens et de thérapeutes familiaux. J'ai eu l'occasion de créer au côté des professeurs Mille et Guilé au Centre hospitalier universitaire (CHU) d'Amiens une unité fonctionnelle de thérapie familiale dans son service de pédopsychiatrie. Je fais le pari de croire que c'est pour souligner l'importance du travail en équipe, dimension essentielle de la pédopsychiatrie, qu'en tant que membre des disciplines associées, je me suis trouvé élu président de la SFPEADA. Le travail en pédopsychiatrie est marqué par un sentiment d'appartenance à une équipe. Notre présence à deux témoigne de ce partenariat continuel où chaque profession s'exerce à la fois dans l'accomplissement de ses compétences, mais également dans la mutualisation de ses incomplétudes. Ce point de vue systémique s'ouvre à la référence à un autre système que celui du soin, qui est celui de la famille.

À l'instar de la parole si bien connue de Donald Winnicott « un bébé ça n'existe pas seul », nous aimerions insister sur le constat qu'un psychiatre du champ de la psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent ne travaille jamais seul. C'est le dialogue et les interactions entre le système du soin et celui de la famille qui constitue le coeur et la matrice des soins en pédopsychiatrie.

La SFPEADA s'intéresse aux dispositifs de soin, aux protocoles de recherche et de formation. En partenariat avec l'Association des Psychiatres de secteur Infanto-juvénile (API) représentée aujourd'hui par Roger Teboul, nous organisons à ce titre, tous les ans, des carrefours de la pédopsychiatrie. Depuis deux ans, le Centre médico-psychologique (CMP) est au coeur de ces réflexions. En février 2016, le thème de ces carrefours était « L'accueil en CMP : un acte de soin ? ». En février 2017, ce thème sera « L'évaluation en CMP : un acte de soin ? ». Notre Société vient de tenir un séminaire interne consacré au parcours de soins et a des propositions relatives aux CMP à avancer.

À côté de notre travail quotidien, nous rencontrons également des situations exceptionnelles. Je parle ici des attentats récurrents qui ont frappé notre pays. La SFPEADA avait programmé, une année en amont, une journée d'étude consacrée au thème « L'enfant, la mort, le deuil » qui s'est tenue le 20 novembre 2015, c'est-à-dire une semaine avant les attentats du 13 novembre. Le professeur Jean-Philippe Raynaud, membre du conseil d'administration de notre Société était, avec ses équipes de pédopsychiatrie, le témoin actif des différents faits dramatiques qui se sont déroulés à Toulouse. Autre membre de ce conseil d'administration, Mme le professeur Florence Askenazy, de la fondation Lenval à Nice, a vu son équipe de pédopsychiatrie se retrouver en première ligne dans les soins à apporter aux victimes de l'attentat du 14 juillet dernier. Également membre du conseil d'administration, le professeur Daniel Marcelli a apporté son soutien aux équipes de la fondation Lenval à Nice car les soignants, projetés dans une situation de violence extrême, nécessitent eux-aussi des soins.

L'ensemble de ces données nous a fait prendre la décision d'organiser une prochaine journée nationale le 6 mars 2017 consacrée à la question « L'enfance attaquée ou la pédopsychiatrie face aux risques collectifs ». Il s'agira d'encore mieux faire prendre en compte les soins donnés aux enfants, aux adolescents et aux familles dans ces situations dramatiques, ainsi que les soins à donner aux soignants eux-mêmes.

Nous espérons que cette journée qui suivra la conférence internationale de l'aide aux victimes qui s'est tenue à l'UNESCO le 9 janvier dernier, nous permettra de mettre en place des réseaux d'informations, d'interventions et de formations dans un contexte où le quotidien et l'exceptionnel se nouent hélas de manière si intense.

Docteur Catherine Lacour-Gonay, membre du conseil d'administration de la Société Française de Psychiatrie de l'Enfant et de l'Adolescent et Disciplines Associées (SFPEADA). - Je suis pédopsychiatre et interviens à plusieurs titres. Je suis praticien hospitalier au sein du Groupe hospitalier de l'est francilien (GHEF), grand hôpital qui recouvre l'ensemble de la Seine-et-Marne depuis le 1er janvier dernier. Je suis, par ailleurs, rattachée au service de pédopsychiatrie du GHEF et anime une structure pour adolescents. Elle intervient en soin-études ambulatoire et est le fruit d'un partenariat avec la Fondation santé des étudiants de France. C'est un partenariat soin-scolarité soucieux d'articuler ces deux composantes pour un adolescent porteur de souffrances psychiques et psychiatriques.

J'interviens dans le cadre du conseil d'administration de la Société française de psychiatrie de l'enfant, de l'adolescent et des disciplines associées. J'insiste sur les termes de disciplines associées car nous tenons à marquer notre partenariat, au sein des équipes de pédopsychiatres, avec des psychologues et des représentants d'autres disciplines. Il n'existe pas de pédopsychiatrie sans équipe. C'est inhérent à notre discipline. Je suis d'ailleurs, plus précisément, en charge des partenariats dans ce conseil d'administration. Je précise également qu'il n'existe pas de pédopsychiatrie sans famille et sans scolarité.

Notre discipline a pour point fort d'être forcément placée dans une démarche partenariale. Lorsque je parle de famille, je ne fais pas seulement référence aux parents mais également à la fratrie ou aux grands parents. À l'heure des familles décomposées puis recomposées, cela peut regrouper beaucoup de monde. Ce large environnement propre à la pédopsychiatrie nécessite du temps.

Vous savez peut-être que nous traversons une crise. Elle est d'une part quantitative du fait de la baisse très nette du nombre de pédopsychiatres ces 10 dernières années. Il existe également une crise de la reconnaissance des professionnels, notamment dans les disciplines associées. Je vise ici particulièrement des psychologues à qui il est demandé d'assumer de nouvelles activités dans le cadre des transferts de compétences, lesquels ne sont pas forcément accompagnés de revalorisations salariales et professionnelles.

En tant que représentants de la SFPEADA, nous sommes aujourd'hui invités en table ronde avec des représentants de l'API et de la Fédération des centres médico-psycho-pédagogiques (FDCMPP). Cela tombe bien car l'ensemble de nos structures participe à la Fédération française de psychiatrie (FFP) et, en particulier, à son collège de pédopsychiatrie. Le fait de travailler main dans la main relève d'une dynamique récente dont chacun est acteur, même si nous n'intervenons pas aujourd'hui pour le compte de la même structure.

Dans ce cadre et dans celui du conseil d'administration de la SFPEADA, je participe au sein de la Haute Autorité de santé (HAS) à la réflexion menée sur les parcours de soins pour enfants porteurs de troubles « dys ». Car la pédopsychiatrie a son mot à dire sur les troubles des apprentissages. Nous participons également aux journées de perfectionnement des pédopsychiatres au ministère de la santé qui se tiendront cette année en mars. Cette journée portera sur les écrits en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent. Nous avons, en effet, à coeur d'améliorer nos contributions écrites dans la collégialité. Nous participons aussi au Conseil national de santé mentale (CNSM) car il est important pour nous de dire que la pédopsychiatrie participe de la santé mentale. Nous sommes désireux d'occuper cette place-là, même si nous avons consciences que notre discipline ne recouvre pas tout le concept de santé mentale.

Nous avons, avec Roger Teboul, lancé une action de recherche dans le cadre de la FFP sur la radicalisation avec le souhait de savoir en quoi les jeunes radicalisés avaient, le cas échéant, affaire avec la psychiatrie et en quoi un dispositif de prise en charge thérapeutique pouvait être envisagé. Ces questions intéressantes sont aussi au confluent de préoccupations de plusieurs ministères dont ceux de l'éducation nationale, la défense, la justice et la santé. Nous nous retrouvons donc dans un climat multi-partenarial qui nous est familier. C'est important car il n'est possible d'avancer sur les questions de radicalisation que si l'on réfléchit à plusieurs.

La SFPEADA a à coeur de s'investir dans la formation de nos collègues et de son réseau sur les sujets d'actualité. À cet effet, nous organiserons en juin prochain à Amiens les journées nationales du Congrès français de psychiatrie et de psychopathologies de l'enfant et de l'adolescent autour du thème « Imaginaire et nouvelles machines ». À l'heure d'internet et des réseaux, il nous semble intéressant d'aborder le sujet.

J'ai pu aussi participer à la journée « Décrochage scolaire à l'adolescence » montée en partenariat avec la Fondation santé des étudiants de France. Les questions de phobie et de décrochage scolaire nous paraissent, en effet, être une pathologie propre à notre société contemporaine sur laquelle nous avons beaucoup à dire. Un atelier sur ce même thème a été animé au Congrès français de psychiatrie.

Nous participons aussi du Développement professionnel continu (DPC) sur les troubles des apprentissages, la dépression de l'adolescent, le bilan sensori-moteur ou la prescription des psychotropes en pédopsychiatrie.

Nous disposons donc de nombreux axes de travail.

Je reprends ma casquette de praticien en groupement hospitalier de territoire pour relayer certaines inquiétudes de mes collègues. Nous croyons fort en l'idée que la pédopsychiatrie peut s'inscrire dans l'hôpital général mais nous nous sentons fragilisés dans cette position. À l'heure des enveloppes budgétaires globales qui ne distinguent pas entre psychiatrie et pédopsychiatrie, certains directeurs font des arbitrages qui ne sont pas en faveur de notre spécialité. Je comprends que ces arbitrages sont difficiles et qu'il n'est pas toujours simple de trancher entre un besoin en réanimateur et un besoin en psychologue. Il en ressort, tout de même, un sentiment de fragilisation pour la pédopsychiatrie car il n'est pas facile d'être privilégié dans des espaces ambulatoires externalisés.

Venant de Seine-et-Marne, je constate également des disparités entre les territoires. Mais vous connaissez en tant que représentants de territoires. Un manque local de pédopsychiatres est souvent la conséquence d'une désertification médicale plus profonde. Il existe des endroits dans le fin-fond du département de Seine-et-Marne où il n'y a plus de médecin traitant et où une adolescente doit se rendre aux urgences pour se faire prescrire la pilule. C'est un scandale sanitaire.

Je termine en reprenant les mots de Marie-Rose Moro que vous avez aussi interviewée. Comme elle, nous comptons sur vous pour sauver la pédopsychiatrie.

Docteur Patrick Belamich, président de la Fédération Des Centres Médico-Psycho-Pédagogiques (FDCMPP).- Je suis médecin-directeur du Centre médico-psycho-pédagogique (CMPP) de Fontainebleau. À la fois directeur médical et directeur administratif d'un lieu de soin, je suis donc une espèce en voie de disparition ! Il en reste quelques-uns dans les CMPP mais nous sommes vraiment très peu. Sans vous présenter la FDCMPP, je vais en revanche vous présenter les CMPP d'une manière générale. Il en existe 310 en France à l'heure actuelle, ce qui correspond à 470 lieux de consultations car chaque CMPP peut procéder plusieurs antennes. Les CMPP constituent un maillage de tout le territoire national et deux tiers d'entre eux sont adhérents à la fédération des CMPP. L'ensemble des CMPP représentent 3 millions de consultations par an et 200 000 enfants concernés soit environ un peu moins de la moitié des actes de pédopsychiatrie ambulatoire en France. Les CMPP comptent sur le travail de 5 000 équivalents temps plein (ETP) avec beaucoup de salariés à temps partiels. Si certains CMPP dits « territoriaux » dépendent de communes, la plupart de ces centres sont sous la forme d'associations régies par la loi de 1901.

Les CMPP sont des lieux polyvalents et généralistes. Ils peuvent donc recevoir de jeunes patients présentant toute forme de pathologie. Ces patients ont de 0 à 20 ans, voire un peu plus avec le dispositif issu de « l'amendement Creton ».

Les centres médico-psycho-pédagogiques sont issus du mouvement de développement de la protection sociale après-guerre et de la volonté conjointe de l'instruction publique, éducation nationale de l'époque, et de la santé publique, de créer des structures qui pourraient faire tiers. Le CMPP Claude Bernard à Paris a été le premier créé en 1946.

Ces centres sont des lieux de diagnostics et de soins qui ne sont pas sectorisés, à la différence des inter-secteurs. Du fait de la désertification médicale, je reçois, par exemple, à Fontainebleau des familles et des enfants venant du Loiret ou de l'Yonne. On y prend en considération l'enfant et tout ce qui concerne l'enfance, y compris l'enfance des parents. Les CMPP sont des lieux de soins où l'on vient adresser sa souffrance, son angoisse et l'isolement qui va avec. Car venir consulter est déjà une manière de sortir de l'isolement et représente un certain soulagement. Il s'agit d'une aide contre la marginalisation à destination des familles en difficulté. Il n'est, en effet, pas possible de soigner des enfants si l'on ne travaille pas avec les parents. Souvent les enfants se font le symptôme ou sont porteurs d'un symptôme de leurs parents. Il convient donc de donner une place particulière aux parents, s'en faire des alliés sans forcément les mettre en accusation comme on l'a trop souvent entendu. On a répété, comme une idée reçue, que « les psys culpabilisent les parents, et cetera, et cetera ». J'ai l'habitude de répondre à ça que les parents n'ont pas besoin des psys pour se sentir coupables. Il suffit d'être parent soi-même pour le savoir. S'il est nécessaire de travailler avec les parents, il l'est aussi parfois de les tenir à distance afin de préserver de leur intrusion un lieu de confidentialité où l'enfant peut déployer tout ce qu'il a de plus intime. Il en va de même pour l'école, les services sociaux dont l'Aide sociale à l'enfance (ASE) car on reçoit énormément d'enfants placés dans des foyers ou familles d'accueil avec tout un cortège de pathologies parfois graves et inquiétantes.

Les CMPP sont des lieux d'adresse dans la cité, repérés en tant que tels par les familles. Nous recevons d'ailleurs parfois successivement plusieurs générations d'une même famille. Cela rend compte de notre implantation locale et de notre important travail en réseau. Nous avons, par exemple, dans le sud de la Seine-et-Marne monté une association de type « loi 1901 » autour de l'adolescence avec l'inter-secteur infanto-juvénile et la clinique privée du Pays de Seine qui reçoit des adolescents ainsi qu'avec une grosse association qui comprend des Instituts médico-éducatifs (IME), des services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD) et des Centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP). La création de cette association a été motivée par la volonté d'établir une synergie dans le travail de l'ensemble des structures qui en sont membres.

Il n'est pas possible de travailler seul lorsqu'on s'occupe d'enfants au sein d'une institution. Il faut des équipes pluridisciplinaires. Les CMPP comptent, à ce titre, à la fois sur des pédopsychiatres, des psychologues, des orthophonistes, des psychomotriciens, des psychopédagogues, des assistantes sociales et encore d'autres spécialistes. Il nous est également nécessaire de travailler en réseau avec d'autres partenaires sur le même champ que nous.

Pour ce qui est de la Fédération des CMPP, elle a pour rôle de favoriser les échanges entre les différents établissements. Car chaque centre possède sa propre expérience et sa propre histoire puisque des spécificités sont apparues au fil du temps. Il est donc important de mettre ces spécificités en valeur pour en faire une base d'échange. Il s'agit d'une richesse basée sur de l'expérience de terrain.

Afin de favoriser ces échanges, la FDCMPP organise des journées d'étude tous les ans ou tous les deux ans. Elle possède également une commission qui s'occupe de la formation à différents niveaux.

Docteur Roger Teboul, pédopsychiatre, président de l'Association des Psychiatres de secteur Infanto-juvénile (API). - Je représente l'Association des psychiatres de secteurs infanto-juvénile (API). J'insiste sur le terme de secteur. On a l'habitude de me dire militant. Je le suis volontiers pour défendre ce mot : le secteur. Il s'agit d'une belle idée française née après-guerre de gens également militants. Elle s'est concrétisée par une circulaire de 1960 et, pour la psychiatrie infanto-juvénile, par la création de secteurs ad hoc en 1972 qui furent les premiers. Cette idée est issue du gouvernement de la Libération et de la Résistance, au même titre que l'ordonnance du 2 février 1945 sur la justice pénale des mineurs.

Je remarque que la dénomination de cette mission d'information se base sur un terme inusuel mais remarquablement intéressant qui est celui de la psychiatrie des mineurs. On parle, en effet, habituellement de psychiatrie infanto-juvénile ou de pédopsychiatrie. Ce terme particulier me renvoie à la question de savoir ce qu'est un mineur dans une société occidentale moderne comme la nôtre. Quels sont ses droits et quels sont ses devoirs ?

Je reviens au terme de secteur et précise que les psychiatres infanto-juvéniles soutiennent cette idée car nous considérons qu'il s'agit d'un modèle d'organisation territoriale de la psychiatrie. Nous n'avons pas attendu les termes actuels pour passer à l'acte et organiser les choses au niveau du territoire. Pour la psychiatrie en général, et pas seulement celle des mineurs, la mission Robillard l'a déjà montré. Cette organisation territoriale mêle très intimement prévention et soins. Je parle ici de prévention centrée sur la personne et pas des programmes de prévention à l'anglo-saxonne. C'est ce sens qu'a repris le collectif « Pas de zéro de conduite », auquel l'API à largement participé, afin de prendre soin de la jeunesse et de ces jeunes. C'est important. Ce sont des principes que nous essayons de tenir.

Il n'est pas toujours évident d'organiser l'articulation entre prévention et soins de 0 à 20 ans. Nous essayons tout de même de la faire dans un contexte budgétaire contraint, où nous subissons un certain nombre d'attaques.

La psychiatrie des mineurs est un objet intéressant qui devrait être pris en compte par la société. Il serait donc intéressant que cette mission puisse redéfinir nos missions dans un consensus plus large et que l'on arrête de nous chercher des « poux sur la tête », passez-moi l'expression.

Sur le territoire, 600 000 enfants sont suivis, entre les services de psychiatrie infanto-juvéniles et les CMPP. Nous avons organisé le 4 avril 2014 les états généraux de la pédopsychiatrie à l'issue desquels 10 propositions ont été formulées. Je serais extrêmement heureux que cette mission puisse les reprendre et pourrai vous les communiquer. Un travail considérable a été fait en région pour préparer ces états généraux qui n'étaient pas centralisés à Paris.

Travailler sur tout le territoire national en tentant d'en réduire les disparités est une de nos marques de fabrique. Une de nos 10 propositions va d'ailleurs en ce sens. Soutenir les partenariats dont mes collègues ont déjà parlé est aussi au centre de la psychiatrie de secteur. Nous travaillons avec tout le monde dès lors que nous disposons des moyens pour le faire : éducation nationale, la protection maternelle et infantile (PMI), la justice des mineurs, la protection de l'enfance, les services de pédiatrie et les services de psychiatrie générale car des sujets nous sont communs. La psychiatrie périnatale est également concernée avec des parents psychotiques, notamment des mères. De même pour la psychiatrie de l'adolescent puisque des articulations sont à mettre en oeuvre, notamment lorsque l'individu souffre d'une maladie chronique qui va handicaper sa vie.

Enfin, je crois qu'une grande réforme vient de voir le jour avec l'organisation des groupements hospitaliers de territoire (GHT). Cette réforme a un peu mis de côté les questions que peuvent poser la psychiatrie et la pédopsychiatrie. Michel Laforcade a un peu essayé de répondre à ces questions mais une articulation doit être mise en oeuvre entre les champs sanitaire et médicosocial pour la psychiatrie et, a fortiori, la pédopsychiatrie. C'est un vaste chantier que peut, peut-être, servir votre mission.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion