Intervention de Loïc Blondiaux

Mission d'information Démocratie représentative, participative et paritaire — Réunion du 1er février 2017 à 17h30
Audition conjointe de Mm. Loïc Blondiaux professeur de science politique à l'université paris i panthéon-sorbonne et rémi lefebvre professeur de science politique à l'université lille ii

Loïc Blondiaux, professeur de science politique à l'université Paris I Panthéon-Sorbonne :

Il est en effet indispensable de rendre possible une certaine disponibilité des citoyens, ce qui, dans le contexte socio-économique actuel, est très compliqué.

Toutefois, il faut aussi reconnaître un droit à l'indifférence des citoyens. Ceux-ci ne doivent pas être culpabilisés s'ils ne participent pas ! La citoyenneté est forcément intermittente. Les citoyens ne se mobilisent que sur des sujets sur lesquels ils se sentent concernés ou sur lesquels on les implique de manière spécifique, via le tirage au sort.

Je prendrai l'exemple de la petite commune de Saillans, 1 300 habitants, dans la Drôme, qui est en train de se transformer en mythe. Les habitants de cette commune ont décidé de changer complètement la pratique politique. La nouvelle municipalité associe systématiquement les citoyens à l'élaboration des politiques publiques et la personnalisation du rôle de maire a été remise en cause.

Après deux ans et demi d'expérience, les enquêtes montrent qu'un cinquième des citoyens ont participé à des groupes de travail ou à des réunions, ce qui leur a permis d'être directement associés à cette démocratie participative. Toutefois, tous les autres connaissent cette expérience et, surtout, se félicitent de pouvoir y participer. Il faut admettre que la participation est un droit, que l'on peut ne pas exercer.

Pour répondre à la question portant sur les médias, il est vrai que ceux-ci font davantage partie du problème que de la solution. Il faut compenser leurs défaillances, parce qu'ils ne remplissent plus leur fonction d'organisation du débat public sur les enjeux controversés, à l'échelle nationale, évidemment, mais aussi parfois à l'échelle locale.

Le numérique, quant à lui, est un instrument tout à fait intéressant, qui a des avantages et des inconvénients.

Parmi les avantages, le numérique s'adapte à la faible disponibilité physique des citoyens, puisque l'on peut participer de chez soi, sans être obligé d'assister à des réunions très longues et prenantes. Ainsi, il correspond mieux aux conditions de vie des citoyens. Enfin, les jeunes, au moins les plus éduqués d'entre eux, ont une familiarité beaucoup plus grande avec les outils numériques qu'avec les dispositifs traditionnels de démocratie participative. Quand vous avez 18 ans, et sauf si vous voulez faire une carrière politique, vous n'avez pas envie de passer du temps dans les réunions de quartier, qui sont très ennuyeuses, alors que le numérique permet des formes d'implication plus diverses, plus ludiques et plus efficientes.

Toutefois, le numérique laisse toujours de côté une partie de la population. Il manque de représentativité sociologique réelle. La participation doit donc impliquer aussi des face à face et des réunions. Le numérique et l'implication physique ne sont pas exclusifs et doivent être associés.

Enfin, pour répondre à votre question, monsieur le rapporteur, les deux dispositifs de démocratie participative qui me semblent les plus intéressants sont les budgets participatifs et les jurys citoyens. Ils sont parfaitement rodés et ont donné de bons résultats, même si les préconisations des jurys citoyens ne sont pas souvent reprises, hélas, par ceux qui les organisent.

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