Intervention de Didier Billion

Mission d'information Accord UE-Turquie sur la crise des réfugiés — Réunion du 21 septembre 2016 à 14h35
Audition M. Didier Billion directeur adjoint de l'institut de relations internationales et stratégiques

Didier Billion, directeur adjoint de l'Institut de relations internationales et stratégiques :

Faire cesser le flux de migrants vers la Grèce demeure bien entendu l'objectif majeur, mais le flux continuera tant que se poursuivra la guerre en Syrie. Avant l'accord du 18 mars dernier, en février me semble-t-il, il y a eu un afflux massif de migrants d'Alep vers la frontière turque, fermée par les autorités. Mme Federica Mogherini avait alors intimé à celles-ci d'ouvrir leurs frontières, tout en maintenant fermées celles de l'Union européenne. On ne peut pas exiger cela, nous devons être logiques.

Nous touchons effectivement là au coeur du sujet. Ne peut-on accepter que cette question des visas soit totalement et radicalement indépendante de la question de la définition de la lutte contre le terrorisme ? Je réalise que cela est plus facile à dire qu'à faire, mais il n'y a pas d'autre solution si l'on veut gérer la question du flux. Tayyip Erdogan l'a d'ailleurs bien compris et il fait de la surenchère.

En outre, sur cette question de la lutte antiterroriste, sommes-nous audibles lorsque nous disons que la Turquie doit restreindre la définition du terrorisme et de la lutte anti-terroriste alors qu'elle a subi plusieurs attentats au cours des derniers mois ? Que dirions-nous, en France, si une organisation internationale ou un État étranger nous demandaient de suspendre l'état d'urgence alors que nous avons été victimes de plusieurs attentats ? Or la Turquie est confrontée à un défi semblable au nôtre, mais dans un contexte encore plus chaotique.

Ne peut-on donc faire un pas en ce sens ? On pourrait tout à fait imaginer un compromis acceptable, d'autant que la polarisation s'est accentuée en Turquie, avant même le coup d'État de juillet dernier.

Seconde question : jusqu'où Tayyip Erdogan peut-il aller ? Pour ma part, je crois qu'il peut mettre ses menaces à exécution, je pense qu'il peut tout à fait, ponctuellement, pendant quelques semaines, ouvrir les vannes. C'est condamnable, sans doute, c'est du chantage, mais c'est pour cela qu'il faut négocier et il faut le faire sans se renier. Si l'on n'est pas capable de prendre cela en compte, on ne fait plus de politique. Nous faisons d'ailleurs la preuve que, dans notre propre pays, où pourtant l'État de droit est respecté, il existe, indépendamment des surenchères politiques, des débats sur la lutte antiterroriste. Cela signifie donc bien que cette question est difficile.

Par ailleurs, je n'ai pas réussi à avoir des éléments tangibles à ce sujet, on m'a dit que les flux vers la Grèce ont augmenté récemment, est-ce le cas ?

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