Je regrette moi aussi la rigidité du règlement pour ce qui concerne les déplacements à l'étranger des missions d'information.
L'accord avec la Turquie, cela a été dit, est un accord politique, et non pas un accord contraignant. Il ne peut pas être reproductible et s'appliquer pour la Libye, par exemple. Il a été conclu avec la Turquie, car il s'agissait de répondre à l'urgence, ce qui confère d'ailleurs des circonstances atténuantes...
Mais cela ne doit pas masquer le vrai problème : l'absence de politique européenne commune en matière de migrations et d'asile. C'est pourquoi le rapport insiste à juste titre sur l'importance de rappeler l'ensemble des États membres à plus de solidarité envers les réfugiés et entre les États membres. Car si les réinstallations butent sur certaines réticences de la Turquie, elles pèchent surtout par l'absence de volontarisme des États membres de l'Union européenne.
J'approuve également la préconisation de séparer ce qui relève de la politique envers les réfugiés du rapport de l'Union européenne avec Turquie. Ces deux questions sont différentes. Mais, ne soyons pas dupes, la Turquie fera systématiquement en sorte de les traiter ensemble. Cette préconisation perd donc de son caractère opérationnel.
Je veux également insister sur l'importance qu'aura dans les discussions à venir la reconnaissance par la Grèce de la Turquie comme « pays tiers sûr ». Si elle ne le faisait pas, cela poserait beaucoup de problèmes.
Par ailleurs, on ne peut dissocier la relation que nous avons avec la Turquie de celle que nous avons avec les autres pays qui supportent la présence d'un grand nombre de réfugiés. Jean-Yves Leconte l'a mentionné : l'Union européenne doit mener une réflexion sur le soutien à accorder également au Liban et à la Jordanie, faute de quoi ce qui se passe aujourd'hui avec la Turquie pourrait très bien, demain, se passer avec ces pays, qui connaissent une réelle situation de saturation.
Autre sujet, qui pourrait faire l'objet d'un ajout dans le rapport : la situation des mineurs, en particulier des mineurs isolés. Ni les Turcs ni les ONG n'ont pu nous répondre précisément sur le nombre, les situations, les mesures mises en oeuvre. En Grèce, il n'existe pas de politique de l'enfance comme c'est le cas chez nous ; on ne sait donc pas très bien dans quelles conditions ces enfants sont pris en charge. Il est probable que le nombre de mineurs isolés y est relativement important : beaucoup de familles ont été éclatées au moment du passage sur les bateaux.
Globalement, ce rapport va tout à fait dans le sens des discussions que nous avons eues au cours des auditions. Ma conclusion sera que nous avons besoin de la Turquie et que la Turquie a besoin de nous. De part et d'autre, des efforts restent à faire.