Intervention de Loïc Blanchard

Mission d'information Accord UE-Turquie sur la crise des réfugiés — Réunion du 1er juin 2016 à 14h35
Audition conjointe d'organisations non gouvernementales ong

Loïc Blanchard, responsable du service juridique de Médecins du monde :

Nous sommes inquiets à leur sujet mais notre accès aux camps est extrêmement limité ; il nous est donc compliqué d'avoir une perception précise de la situation des Kurdes syriens en Turquie.

L'accord UE-Turquie a été fondé sur la lutte contre les passeurs et la qualification de « pays tiers sûr » donnée à la Turquie. Or, pour ce qui est des passeurs, force est de constater qu'ils se portent toujours aussi bien ; l'accord ne semble pas avoir changé grand-chose au rythme des arrivées. Quant à la notion de « pays tiers sûr », je rejoins tout ce que mes collègues ont dit à ce sujet. Pour autant, la décision de justice grecque a été immédiatement remise en cause par les autorités de ce pays, qui ont déclaré qu'il s'agissait d'une décision isolée concernant un seul individu et ne reflétant en rien leur perception de la Turquie. À ce jour, ni l'UE, ni le gouvernement grec, n'ont commenté le fait que cette décision a été pour le moins bafouée et remise en cause ; ils ne semblent pas vouloir en tirer de conséquences globales.

Or, à l'heure actuelle, la Turquie négocie des accords de réadmission avec le Pakistan, le Yémen et d'autres pays dont la « sûreté » est aussi sujette à caution. Nous pouvons également constater sur le terrain des violences policières caractérisées à la frontière syrienne et le refoulement presque systématique de Syriens désirant entrer en Turquie. Les condamnations de ce pays par la Cour européenne des droits de l'homme sont monnaie courante.

Je voudrais enfin revenir sur les conditions de vie dans les camps turcs, qualifiés de « cinq étoiles ». On constate que l'État turc y a beaucoup travaillé et que les conditions, là encore, sont meilleures qu'à Calais, ce qui interroge sur nos capacités d'accueil. Le chiffre de 2,8 millions de réfugiés syriens en Turquie correspond aux personnes enregistrées seulement ; j'ai, pour ma part, entendu évoquer la présence de 3 à 4 millions de réfugiés. Si les camps sont plutôt de bonne facture et que certains critères fixés par le HCR, comme l'accès à l'eau, sont bien respectés, pour autant l'aspect aux soins pose véritablement question aujourd'hui. La Turquie connaît déjà un déficit de médecins sur son territoire ; le problème se pose évidemment avec beaucoup plus de prégnance dans ces camps de réfugiés. Les problématiques de santé mentale n'y sont quant à elles, semble-t-il, pas du tout traitées.

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