Nous avons pu constater dans le cadre de nos travaux que ces personnes sont exposées à un risque de discrimination, dans notre société où la binarité des sexes est la règle. Cela concerne d'ailleurs tous les domaines pratiques de la vie quotidienne (école, sport, avec la question des vestiaires en particulier, travail, santé).
Au-delà de ce risque de discrimination qui les expose à la moquerie ou à la précarisation, les personnes dites « intersexes » se heurtent à une obligation trop fréquente - loin d'être toujours indispensable - de révéler leur identité sexuée dans les démarches administratives, ce qui est susceptible de porter atteinte à leur vie privée, notamment lorsque leur apparence ne correspond pas au sexe mentionné.
Nous avons donc essayé de voir dans quelle mesure on pourrait limiter au strict minimum les cas où l'on requiert des informations sur l'identité sexuée des personnes à l'occasion de ces démarches.
Le ministère de la Justice a d'ailleurs reconnu que le sexe « ne semble pas en soi un élément indispensable à l'identification des personnes, devant être reproduit sur une demande d'accès à certains services ».
Nous avons envisagé la possibilité de supprimer - ou de ne pas mentionner systématiquement - le sexe sur différents documents (papiers d'identité, état civil - le débat est ouvert). Cette formule ne serait pas sans poser des difficultés juridiques.
Le Défenseur des droits a en particulier porté à notre attention qu'une telle suppression irait à l'encontre de la tendance actuelle qui vise à « resexualiser » un certain nombre de normes juridiques pour lutter contre les discriminations fondées sur le sexe, par exemple s'agissant des inégalités professionnelles entre les hommes et les femmes.
En revanche, afin de protéger la vie privée des personnes dites « intersexes », il préconise de ne plus faire figurer sur l'extrait d'acte de naissance les mentions marginales relatives au changement de sexe. Nous reprenons à notre compte cette recommandation.
Compte tenu des nombreuses difficultés dont sont victimes les personnes dites « intersexes » dans les différents domaines de la vie et dans leurs démarches administratives, en raison de l'obligation fréquente de révéler son identité sexuée, nous sommes aussi convaincues qu'un travail pédagogique d'ampleur reste à faire pour sensibiliser notre société à leur situation et faire en sorte que cette prise de conscience progresse dans notre pays.
À cet égard, l'un des enjeux principaux réside dans la formation de tous les intervenants médicaux, éducatifs et sociaux qui peuvent être en contact avec ces enfants et adolescents et leurs familles, et dans le contenu des enseignements prodigués, notamment dans le cadre de l'éducation à la sexualité. La plateforme de vidéos pédagogiques en faveur de l'égalité des sexes « Matilda », mentionnée par le Défenseur des droits, pourrait par exemple constituer un support de communication adapté. De même, la réalisation de thèses en sciences humaines et sociales sur ces problématiques permettrait de constituer une avancée importante en termes de connaissances. Il faut donc encourager par tous moyens ce type de travaux.
Nous formulons une recommandation qui reprend ces différents aspects, et qui vise ainsi à renforcer les efforts de sensibilisation aux difficultés vécues par les personnes atteintes de variations du développement sexuel, afin de briser les tabous et d'éviter l'exclusion de ces personnes.
Je cède la parole à Maryvonne Blondin qui va évoquer les questions que nous avons abordées concernant l'évolution de l'état civil des personnes dites « intersexes », et qui est un sujet en soi.