Intervention de Jean-Eric Hyafil

Mission d'information Revenu de base — Réunion du 9 juin 2016 à 16h15
Audition de M. Jean-éric Hyafil du mouvement français pour un revenu de base mfrb

Jean-Eric Hyafil :

Je vous remercie pour toutes ces questions. Lorsque j'ai évoqué l'impôt sur le revenu, je pensais en fait à sa dimension générique, en y incluant notamment la contribution sociale généralisée (CSG). Évidemment, on pourrait proposer d'assurer une partie du financement du revenu de base par la CSG ou par l'actuel impôt sur le revenu. Une vaste réforme fiscale est ambitieuse mais nécessaire. À cet égard, l'avantage de la mise en place d'un revenu de base est que tout le monde acquittera un impôt sur le revenu. Cette généralisation, par rapport à ce qui prévaut actuellement, serait évidemment bénéfique.

En outre, il se trouve que l'introduction d'un revenu de base serait de nature à faciliter le prélèvement de l'impôt sur le revenu à la source. En effet, la difficulté actuelle de ce mode de prélèvement réside dans le passage de la tranche de 0 % à celle de 14 % pour tous les ménages qui se situent dans la classe moyenne aux revenus médians et qui commencent à payer de l'impôt sur le revenu : une incertitude demeure sur le montant que ces ménages doivent acquitter, surtout lorsque leurs revenus sont irréguliers ou que leur situation conjugale s'avère incertaine, voire s'ils cumulent plusieurs emplois. Or, avec la réforme du revenu de base, on instituerait une vaste première tranche imposée à hauteur de 23 à 30 % d'impôt sur le revenu, suivant l'assiette retenue. Les contribuables auraient ainsi une connaissance claire du montant de leur impôt. Il faudrait faire preuve d'un réel courage politique pour mener ces deux réformes de fond, mais une telle démarche est possible.

Sur le financement du revenu de base, d'autres pistes que celle de l'impôt sur le revenu existent. Je partage le constat exprimé qu'il faut taxer les multinationales qui échappent à l'impôt sur le revenu. Je souscrits également à l'idée d'instaurer une fiscalité écologique et de créer une taxe visant tous les produits polluants arrivant depuis l'extérieur aux frontières de l'Europe. Pourquoi n'ai-je pas développé ce point ? Car je me place dans le court terme en me positionnant sur ce qui existe, à savoir l'impôt sur le revenu. Une fois ces réformes opérées, de tels prélèvements permettront d'alimenter une base vouée à être substituée partiellement à cet impôt. L'un n'empêche pas l'autre. J'ai proposé une démarche s'appuyant sur l'impôt sur le revenu sans exclure d'autres pistes de financement qui peuvent prendre le relais de celui-ci ou assurer l'augmentation du financement du revenu universel. Ces différentes pistes seront d'ailleurs développées dans notre livre blanc.

Je partage avec vous l'idée que le travail est fondamental et que tout le monde souhaite travailler. Mon premier diagnostic sur la numérisation des emplois n'avait pas pour finalité d'annoncer la fin du travail ; la question demeure complexe et il est toujours possible de créer des emplois. Personnellement, je ne pense pas que la création des emplois représente un but en soi. En effet, je fais la nuance entre travail et emploi, car on peut être utile à la société sans pour autant être rémunéré. Le revenu de base n'est nullement compensatoire à la perte d'emploi ; il est au contraire vecteur d'autonomie en permettant aux individus de mieux choisir leur emploi. Il est toujours possible de créer des emplois dans les secteurs des services, à l'exemple du Japon ou des États-Unis, où dans les supermarchés des employés ont pour tâche d'orienter les consommateurs dans les rayons en fonction de leurs demandes. Je ne souhaiterais pas, personnellement, occuper un tel emploi et je pense que de tels emplois ne doivent guère susciter l'intérêt des personnes.

Créer un emploi pour créer un emploi ne fait pas forcément rêver notre jeunesse qui préfère trouver du sens dans un emploi qui peut être moins rémunéré, dans des secteurs comme l'économie sociale et solidaire, la culture ou les activités pédagogiques. La jeunesse n'a pas envie d'éprouver le sentiment de gâcher sa vie dans un emploi qui n'a pas de sens pour elle. La possibilité de choisir son emploi et d'en refuser éventuellement un perçu comme dépourvu de sens est l'un des avantages du revenu universel. Ainsi, l'instauration d'un revenu de base ne consacre certainement pas la fin du travail, bien au contraire !

Je n'ai pas présenté de budget total. En effet, l'approche macroéconomique du financement du revenu de base, qui est notamment celle de la Fondation Jean Jaurès, est erronée. Une telle démarche ne prend pas en compte l'effet redistributif à l'échelle individuelle. Effectivement, ce revenu universel, du point de vue de son budget brut, coûte certes cher, mais demeure relativement anodin pour les ménages les plus aisés. La question du budget brut n'est donc pas essentielle.

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