Intervention de Pierre Hérisson

Réunion du 6 décembre 2008 à 14h00
Loi de finances pour 2009 — Compte spécial : « gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien »

Photo de Pierre HérissonPierre Hérisson, rapporteur pour avis :

… chargée d’identifier les forces et faiblesses de La Poste, dans la perspective de l’ouverture complète à la concurrence au 1er janvier 2011, et d’étudier les différentes voies de développement qui s’offrent à elle. Pour ne pas interférer aujourd’hui avec le travail de cette commission, je préfère donc évoquer avec vous les grands enjeux du secteur des télécommunications pour 2009 et le financement de son développement.

Les grandes lignes du développement numérique de la France ont été tracées par M. Éric Besson, secrétaire d'État chargé de cette question, dans le plan – très riche et complet – « France numérique 2012 », qu’il a présenté en octobre dernier. J’en retiendrai trois orientations principales.

Il s’agit, premièrement, de la nécessité d’encourager les investissements dans le secteur numérique, lesquels sont deux fois plus faibles en France qu’aux États-Unis. Selon le Gouvernement, leur doublement représenterait un point de croissance supplémentaire. En outre, les emplois attachés aux réseaux et à la distribution de ces services sont peu délocalisables.

Dans cette perspective, je me félicite de l’élan que la loi de modernisation de l’économie a donné à l’investissement des opérateurs dans la fibre optique, en créant un « droit à la fibre optique ». Pour la mutualisation de la partie terminale du réseau, la question du point de raccordement reste largement ouverte, et il nous faut veiller à ce que les accords de mutualisation entre opérateurs n’écartent a priori aucune solution technique.

Parallèlement a été mise en place une offre horizontale de location de fourreaux de France Télécom pour permettre aux opérateurs concurrents d’y faire passer leurs fibres.

Malgré ces progrès prometteurs, il convient de veiller à ne pas décourager l’investissement des opérateurs. À ce titre, nous pouvons nous interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur l’impact que pourrait avoir la taxation du chiffre d’affaires des opérateurs de télécommunications, prévue dans le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, pour financer la suppression de la publicité sur France Télévisions.

Il s’agit, deuxièmement, de l’importance de développer les réseaux pour permettre l’accès de tous au haut débit d’ici à 2012. Pour traduire cette belle ambition, il faudra s’appuyer sur la voie hertzienne. À cet égard, je voudrais féliciter le Gouvernement d’avoir prévu l’affectation aux services de communications électroniques d’une partie du dividende numérique, ces fréquences de grande qualité qui seront libérées par le basculement de la télévision au tout-numérique, à la fin de 2011 : désormais, une sous-bande de fréquences de 72 mégahertz est identifiée pour être affectée aux services de très haut débit sans fil. Cette décision devrait se traduire, sur la période 2012-2024, par la création de 60 000 emplois supplémentaires et par une augmentation différentielle du PIB de 4, 8 milliards d’euros. Son potentiel industriel sera exploité si l’Agence nationale des fréquences parvient à négocier la mise en place de cette sous-bande avec nos voisins européens.

Il s’agit, troisièmement, de la volonté de moderniser la gouvernance de l’économie numérique. L’organisation administrative n’a pas encore pris acte de la convergence numérique. Le projet d’Éric Besson, qui reprend celui de la commission des affaires économiques présenté en juin 2007 dans son rapport d’information sur la régulation à l’ère numérique, est de réunir les moyens humains et financiers que l’État consacre aujourd’hui au numérique.

Parallèlement, il est prévu de doter la France d’un organe de gouvernance adapté au numérique, associant l’ensemble des acteurs de l’internet. Dénommé Conseil national du numérique, il répondrait à un besoin évident de rationalisation des structures existantes.

Force est néanmoins de constater que, dans le projet de budget pour 2009, rien n’est prévu pour son financement, qui pourrait nécessiter 3 millions d’euros, ce qui n’est tout de même pas excessif. À ce sujet, permettez-moi de m’interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur le bien-fondé du projet de taxe envisagé pour financer cet organe, qui pèserait sur les fournisseurs d’accès à internet ou sur le chiffre d’affaires d’acteurs du secteur du nommage français, comme l’AFNIC, l’Association française pour le nommage internet en coopération, responsable de la gestion des noms de domaines. En effet, il serait paradoxal de taxer ces acteurs nationaux du numérique, au risque de les handicaper face à la concurrence mondiale.

Je voudrais, pour finir, dire un mot du nouveau compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien », rattaché à la mission « Économie ». Je me félicite de la volonté du Gouvernement de dynamiser la gestion du patrimoine immatériel de l’État et d’inciter, par le biais de l’intéressement, les utilisateurs publics du spectre à rationaliser leur utilisation des fréquences. Je regrette néanmoins qu’aucune part des redevances que les opérateurs privés acquitteront pour utiliser les fréquences ainsi libérées ne soit affectée au désendettement de l’État, d’autant qu’aucune autre action du ministère de la défense, sinon le renouvellement de certains systèmes de radars de surveillance et de renseignements électromagnétiques, n’en aurait été affectée.

Permettez-moi seulement, monsieur le ministre, de vous inviter à garder le souci d’affecter au désendettement de l’État une part significative des revenus que celui-ci s’apprête à retirer du dividende numérique. Il est vrai que la situation est exceptionnelle, il faut néanmoins respecter certains principes.

Pour conclure, j’indiquerai que, suivant l’avis de ses rapporteurs, Gérard Cornu et moi-même, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Économie » pour cet exercice 2009.

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