Intervention de Pierre Jardon

Mission d'information Démocratie représentative, participative et paritaire — Réunion du 1er mars 2017 à 16h10
Audition des représentants des organisations représentatives des salariés avec M. Fabrice Angei membre du bureau confédéral de la confédération générale du travail cgt Mme Marylise Léon secrétaire nationale en charge de l'évolution des règles du dialogue social au sein de la confédération française démocratique du travail cfdt M. Gilles Lecuelle secrétaire national de la confédération française de l'encadrement — Confédération générale des cadres cfe-cgc en charge du dialogue social et m. pierre jardon secrétaire confédéral de la confédération française des travailleurs chrétiens cftc en charge du dialogue social

Pierre Jardon, secrétaire confédéral de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), en charge du dialogue social :

Le sujet est des plus intéressants et des plus importants.

Les différents aspects de la démocratie qui figurent dans l'intitulé de la mission ne doivent surtout pas être en opposition les uns avec les autres. Au contraire, ils sont complémentaires. L'idée est de réfléchir à la manière de les articuler pour permettre une meilleure adhésion de tous aux accords, aux réformes. Je pense que c'est aussi le sens de votre mission.

La CFTC a beaucoup travaillé sur ces questions, en particulier sous l'angle de l'amélioration de la qualité du dialogue social. À cet égard, nous proposons de créer un comité paritaire permanent du dialogue social. Cette création nous semble de nature à répondre à plusieurs de vos interrogations en permettant d'articuler les différentes formes de démocratie.

Les règles relatives à la représentativité des partenaires sociaux et le renforcement de leur légitimité doivent être examinés conjointement. Je rappelle, en effet, que nous n'étions pas demandeurs de la loi de 2008 sur la représentativité des organisations syndicales. Nous estimons que celle-ci produit un effet fortement néfaste : elle nous oblige à être constamment en élections, autant de temps que l'on ne passe pas au service des salariés. Nous le regrettons.

Pour autant, cette loi existe et sa vocation première était bien de renforcer la légitimité des partenaires sociaux et des accords signés. Aujourd'hui, cette question est réglée et, à notre sens, il n'y a pas lieu d'y revenir.

Le temps politique est différent du temps social. Aujourd'hui, il serait prématuré de dresser une analyse objective des effets de la loi de 2008 et, plus globalement, des lois sur la représentativité des partenaires sociaux, tant du côté syndical que du côté patronal parce que ces textes ne sont encore complètement entrés en application. C'est seulement cette année que l'on pourra, pour la première fois, mesurer la représentativité des organisations patronales et que la loi de 2008 entrera pleinement en vigueur pour les syndicats de salariés, avec la fin des dispositions transitoires sur la représentativité au niveau des branches.

Nous recommandons donc de ne pas modifier constamment les règles de représentativité, qui sont de nature à répondre à la question de la légitimité des acteurs. Laissons-leur le temps de vivre.

Je partage ce qu'a dit ma collègue de la CFDT : nous ne pensons pas que le taux de syndicalisation soit un élément à prendre en compte pour préjuger de la légitimité des acteurs. C'est à l'élection qu'il convient de s'attacher. Or le taux de participation des salariés aux élections professionnelles dans les entreprises est important. C'est lui qui fonde véritablement la légitimité des partenaires sociaux.

Le nombre d'adhérents ne nous semble pas constituer un sujet. Au reste, on ne peut pas du tout le comparer avec celui qui existe dans d'autres pays : notre système social n'est pas du tout le même. À cet égard, nous ne pensons pas que la syndicalisation obligatoire ou l'application des dispositions d'un accord ou d'une convention aux seuls adhérents des syndicats signataires soient souhaitables ni qu'elles s'inscrivent dans la philosophie de notre modèle social.

Nous devons plutôt travailler sur l'image du syndicalisme et, finalement, sur la méconnaissance de ce qu'est le rôle des partenaires sociaux. À ce sujet, nous avons une proposition à vous faire : ne pourrait-on pas éduquer l'ensemble des citoyens à ce que sont les acteurs de la démocratie - non seulement les acteurs politiques, mais aussi les acteurs sociaux ? La défiance serait alors un peu moins vive à l'égard des organisations syndicales, que le grand public apprécie aujourd'hui à l'aune de ce qu'il voit à la télévision : les manifestations, les pneus qui brûlent, les chemises arrachées... On ne voit pas que nous gérons les caisses de retraite, l'assurance chômage, un ensemble d'organismes qui font leur quotidien. Ne serait-il pas possible de prévoir, dans les programmes scolaires, par exemple dans le cadre de l'éducation civique, une vraie éducation à la démocratie dans toutes ses dimensions ?

Je retiens également que, dans son rapport, Jean-Denis Combrexelle a proposé d'« agir sur les représentations, notamment à travers des actions de sensibilisation, formation, organisation des DRH, pour valoriser le dialogue social », ainsi que de mettre en valeur les pratiques de ce dialogue social.

C'est par cet ensemble d'actions que l'on répondra à la question de la légitimité des partenaires sociaux, en permettant une meilleure connaissance de leur rôle.

Pour ce qui concerne l'application de l'article L.1 du code du travail et la méthode suivie par le Gouvernement lors de l'élaboration de l'examen parlementaire des différents projets de loi touchant le code du travail, nous avons une proposition très concrète à faire : ce qui manque aujourd'hui, c'est une instance dédiée.

Quand le Gouvernement veut solliciter les partenaires sociaux, dans le cadre, par exemple, de l'ouverture d'une négociation, il envoie un courrier aux différentes organisations patronales et syndicales. Parfois, c'est par la presse que l'on apprend que l'on est sollicité sur un sujet... Il est dommage que les choses se passent ainsi. Si le comité paritaire permanent du dialogue social était créé, nous serions tous réunis autour de la table et le processus de consultation serait beaucoup plus efficace.

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