Intervention de S.E. M. Amar Bendjama

Mission d'information organisation, place et financement de l'Islam en France — Réunion du 31 mai 2016 à 14h30
Audition de s.e. amar bendjama ambassadeur d'algérie en france

S.E. M. Amar Bendjama, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire d'Algérie en France :

Même en tant que diplomate, je peux être franc, et je vous dirai exactement ce que je pense. Nos imams, en Algérie, sont formés pour l'Algérie. C'est à la demande de notre communauté et avec l'assentiment des autorités françaises qu'une partie - infime - de nos imams vient exercer en France. Ils sont formés dans des instituts universitaires - l'un, réputé, se trouve dans ma ville natale, à Constantine, un autre à Alger -, qui délivre des licences, des masters et même des doctorats. Ce sont des fonctionnaires de l'État, au même titre d'ailleurs que les curés et les pasteurs, bien que l'Islam soit religion d'État. Le Gouvernement prend également en charge la gestion et la réfection des églises et des mosquées. La conduite par nos imams de la prière est inspectée régulièrement par des imams inspecteurs ou professeurs.

Les imams envoyés en France connaissent-ils le français ? C'est un très grand problème, je vous le concède. Faut-il envoyer en France des imams connaissant l'Islam ou bien des imams connaissant le Français ? Les deux, bien sûr. C'est pourquoi une formation accélérée en français est organisée à Alger depuis deux ans, assurée en collaboration avec les services de l'ambassade de France. Depuis cette année, les imams qui en ont besoin sont tenus de suivre des cours de français et de s'inscrire au diplôme universitaire proposé dans treize universités françaises pour apprendre non plus seulement l'exégèse, la philosophie et la religion, mais aussi le droit constitutionnel français, l'histoire de France et la laïcité. Nul doute que leur participation à ces cours - qui sont faits en français - et le contact avec les autres étudiants améliore leur connaissance de la France. Mais soyons clairs : parler français ne signifie pas simplement pouvoir vivre normalement ; les imams doivent aussi être capables de débattre philosophiquement, ce qui est plus difficile que d'échanger sur des questions matérielles... Dernier élément sur cette question : dans le concours national organisé depuis peu à Alger pour sélectionner la quarantaine de diplômés en enseignement religieux susceptibles de venir en France, le français est une épreuve essentielle.

Je ne sais pas répondre à la sempiternelle question d'un Islam en France ou d'un Islam de France. Je préfère vous parler d'un Islam tolérant, qui professe l'amour et le vivre ensemble. Un Islam qui soit un enrichissement spirituel et non un problème pour le pays d'accueil. Au lieu d'organiser une religion, ce que vous vous interdisez pour d'autres cultes, sans doute pourriez-vous plutôt - je vous le dis avec humilité - offrir aux musulmans de ce pays, qui sont aussi français, des conditions de pratique de leur religion décentes et dignes.

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