Intervention de Henri-Michel Comet

Commission d'enquête Compensation des atteintes à la biodiversité — Réunion du 8 février 2017 à 15h30
Audition de M. Henri-Michel Comet préfet de région et M. Philippe Viroulaud directeur général adjoint de la direction régionale de l'environnement de l'aménagement et du logement ou dreal des pays de la loire

Henri-Michel Comet, préfet de région :

Nous n'en avons aucun.

L'élaboration du projet de transfert de l'aéroport de Nantes à Notre-Dame-des-Landes a été minutieuse. Chacune des solutions a été discutée et pesée au regard de cinq enjeux : le développement aéroportuaire international, l'aménagement du territoire national, la protection des populations contre les risques et les nuisances, la préservation de l'environnement et celle de l'agriculture.

En matière de préservation de l'environnement, le projet a été conçu au fil des années en tenant compte scrupuleusement de l'évolution des connaissances scientifiques et du renforcement de la réglementation.

Je vais montrer combien la volonté d'éviter, de réduire et de compenser a été ambitieuse dans l'élaboration du projet. La démarche de compensation retenue pour ce projet a été novatrice.

L'impératif ERC a été respecté de manière précise. Tout d'abord, le choix du site de transfert : ce choix est adossé à une première étude menée dans les années 1960 et qui a examiné neuf sites pour finalement retenir celui de Notre-Dame-des-Landes en 1970. Une nouvelle étude a été menée en 1992, comparant seize sites, et elle a confirmé le site de Notre-Dame-des-Landes. La décision a été prise en 2000 et une nouvelle étude a été actualisée en 2002 afin d'être présentée à la concertation lors du débat public en 2003. Au cours de ce débat, une étude complémentaire indépendante a été réalisée à la demande de la commission nationale du débat public. Cette étude multicritères, qui prenait en compte l'environnement, a de nouveau retenu le site de Notre-Dame-des-Landes. Enfin, dans son rapport de mars 2016, le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), stipule : « Dans l'hypothèse de la construction d'un aéroport sur un nouvel emplacement, le site de Notre-Dame-des-Landes paraît, encore aujourd'hui, indépendamment des avantages que constituent la maîtrise foncière partielle et la limitation de la périurbanisation, le meilleur site envisageable ». Parallèlement à cela, le site de Notre-Dame-des-Landes évite l'ensemble des grands sites écologiques du département que sont le réseau Natura 2000, la Grande Brière, le lac de Grandlieu, l'estuaire de la Loire, mais aussi les espaces naturels à fort intérêt patrimonial qui sont délimités dans le schéma de cohérence territoriale (SCOT) métropolitain Nantes-Saint-Nazaire. Ces espaces couvrent 25 % du territoire du SCOT. Pour mémoire, ce SCOT couvre un peu plus du quart nord-ouest du département et 60 % de la population. C'est dire si l'exigence est élevée.

Enfin, les décisions du Conseil d'État sur la déclaration d'utilité publique (DUP) et de la cour administrative d'appel vont dans le même sens concernant le choix du site.

J'en arrive aux caractéristiques du projet telles qu'elles ont été définies lors des études préalables à la DUP de 2008. Tout d'abord, quels sont les enjeux écologiques de Notre-Dame-des-Landes ? La richesse écologique du bocage n'est pas intrinsèque au territoire, comme cela peut être le cas pour la Brière, pour le lac de Grandlieu ou pour les autres grands sites à proximité. Cette richesse est induite par la création de la zone d'aménagement différé (ZAD) en 1974. La création de la ZAD a en effet conduit à reporter le réaménagement foncier de la commune de Notre-Dame-des-Landes et, en conséquence, à en préserver la biodiversité. En outre, la mosaïque de milieux créée et entretenue par l'homme ne constitue pas un site qualifié de majeur pour la conservation des espèces d'intérêt communautaire, même si elle offre une grande diversité d'espèces caractéristiques de ces milieux. Cette appréciation est formulée par le CGEDD dans son rapport de mars 2016 : « le site de Notre-Dame-des-Landes ne présente pas, du point de vue de la flore, des caractéristiques d'exception » et « le site de Notre-Dame-des-Landes s'avère d'une réelle richesse pour les batraciens, les reptiles, les chauves-souris, tant par la présence d'espèces menacées que par la taille des populations. Pour autant, ce n'est pas un ensemble d'exception ». Ce cadrage général ayant été posé, je souligne malgré tout que la biodiversité a été pleinement appréhendée en 2008 dès les études préalables à la DUP.

Pour ce qui concerne le volet « éviter », il a été décidé de positionner les pistes et la zone des installations ailleurs que sur le secteur nord-est qui présentait la plus grande valeur écologique.

Pour le volet « réduire, », il a été décidé de contenir les surfaces mobilisées, mais aussi de rétablir les continuités écologiques pour la grande et la petite faune et de restaurer les continuités hydrauliques.

Enfin, pour le volet « compenser », il a été décidé de recréer à deux pour un les mares détruites, de replanter à un pour un au moins le linéaire de haies arrachées.

Enfin, les maîtres d'ouvrage - Aéroports du Grand Ouest (AGO) Vinci d'un côté et État-DREAL de l'autre - ont précisé les mesures de compensation. Les enjeux liés aux zones humides ont été pleinement appréhendés. La définition des zones humides date de 2008. Précédemment à cet arrêté ministériel, la caractéristique retenue était uniquement floristique et les zones humides ne concernaient sur le site que 13 % des emprises. Après l'arrêté ministériel de 2008, des critères pédologiques ont été introduits : dès lors, 98 % de l'emprise a été qualifiée de zone humide. Il faut savoir qu'en retenant ces critères, c'est environ 40 % du territoire départemental qui est constitué de zones humides. Le site de Notre-Dame-des-Landes représente ainsi 0,3 % des zones humides du département.

Les maîtres d'ouvrage se sont attachés à caractériser les fonctionnalités des zones humides et à préciser les mesures pour éviter, réduire et compenser.

S'agissant de la caractérisation, la qualité des dossiers portés par les maîtres d'ouvrage a été soulignée par la commission locale de l'eau (CLE) du schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) Vilaine dans son avis du 3 juillet 2012 : « la qualité générale du dossier présenté et en particulier la bonne description de l'état initial et des impacts », mais aussi par le rapport du CGEDD, que j'ai déjà cité : « le faible nombre de découvertes supplémentaires est un indice de la qualité de la prospection initiale ».

Cet état initial a permis de caractériser le site avec deux types de zones humides. Les zones humides le long des cours d'eau qui présentent des fonctionnalités hydrauliques représentent environ 30 % des emprises. Les zones humides de plateau, qui couvrent 70 % des emprises, présentent des fonctionnalités moindres.

Je voudrais citer quelques mesures d'évitement proposées par les maîtres d'ouvrage : d'abord, l'optimisation des emprises foncières. Le concessionnaire a réduit à 147 hectares les surfaces imperméabilisées et à 537 hectares les surfaces aménagées. Par ailleurs, le choix par l'autre maître d'ouvrage, à savoir l'État, d'un tracé définitif de la desserte routière situé au plus près de la plate-forme aéroportuaire a permis de préserver un peu plus de 13 % du site. Il faut donc noter une volonté très claire de préserver les emprises foncières.

En outre, des mesures particulières ont été décidées par les maîtres d'ouvrage sur notre insistance, par exemple le calendrier des travaux, afin de tenir compte des espèces vulnérables en période de reproduction et de ne pas détruire les habitats. De même, nous avons voulu restaurer un cours d'eau assez important, l'Épine, afin de rétablir la continuité hydraulique.

Voilà quelques exemples, mais il y en a beaucoup d'autres.

Je veux souligner l'exigence de la démarche environnementale qui a accompagné ce projet depuis l'origine. Non seulement elle a pris en compte, en temps réel, les connaissances scientifiques sur la biodiversité, mais elle a souvent anticipé des contraintes normatives. Cette démarche est à la fois exigeante et anticipatrice par rapport à l'évolution législative de notre pays. Ce projet apporte donc une contribution importante à la politique nationale de préservation de la biodiversité. Son épanouissement nous permettrait de mesurer le dispositif de suivi des mesures de compensation.

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