Intervention de Jean-Bernard Auby

Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 23 février 2017 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-Bernard Auby professeur à l'institut d'études politiques de paris directeur de la chaire mutations de l'action publique et du droit public et de Mme Estelle Bomberger-rivot maître de conférences chercheur à la chaire mutations de l'action publique et du droit public

Jean-Bernard Auby, professeur à l'Institut d'études politiques de Paris, directeur de la chaire mutations de l'action publique et du droit public :

Les tribunaux administratifs rappellent le droit. On s'évertue un peu trop à prévoir toutes les hypothèses, les contre-hypothèses, etc. C'est la raison pour laquelle on aboutit au mouvement contradictoire que vous avez évoqué.

Cette réponse vous semblera peut-être un peu facile, et vous pouvez trouver un peu inquiétant qu'on se lance dans l'auto-organisation. Toujours est-il que dans les pays voisins du nôtre, par exemple l'Italie et l'Espagne, les collectivités disposent de facultés d'auto-organisation et d'auto-structuration beaucoup plus importantes que chez nous.

S'agissant du principe de différenciation territoriale, j'aurais grand plaisir à voir consacrée cette idée, qui a mis du temps à s'imposer. Le sentiment de dépossession que peuvent éprouver les collectivités, par exemple en matière de gestion de l'eau, est réel. Autre exemple : celui du tourisme, avec la perte de l'office de tourisme, de la taxe de séjour. S'il faut rechercher un remède, je n'en vois qu'un : généraliser davantage les délégations. Dans certains domaines, il est permis de déléguer ce qu'on a transféré ; pourquoi ne pas le permettre en posant à cet effet un principe général d'auto-organisation ? Ce n'est pas possible dans le domaine de l'eau et de l'assainissement, sauf à ce que soit adoptée la proposition de loi que vous examinez cet après-midi.

Que le mot « arrangement » puisse être perturbant, j'en conviens, mais il n'y avait aucune connotation péjorative dans mon esprit. Sans doute faudrait-il plutôt employer les mots « adaptation » ou « agilité ».

En effet, on peut parler de mouvements contradictoires du droit. Mais n'est-ce pas dû au fait qu'on ne progresse qu'à petits pas ? Au risque de vous choquer, je dois dire que ce sont des confettis de l'action locale qu'on traite les uns après les autres : l'eau, le tourisme, etc. Ne vaudrait-il pas mieux définir des mécanismes et des concepts généraux qui permettraient ces allers et retours sans que le législateur doive chaque fois donner son aval ?

J'ignore si nous allons rencontrer sur notre chemin les intercommunalités de taille XXL qui se dessinent, mais il faudrait jeter un oeil sur les arrangements. Je suis particulièrement le cas de la communauté d'agglomération du Pays basque, qui compte 158 communes, et dans laquelle typiquement se pose le problème que vous évoquez, à savoir la création d'une structure interne informelle. À défaut, cela ne pourra pas fonctionner politiquement. Cela consiste à doubler ou à compléter les organes officiels par des organes informels, de manière à permettre, par exemple, une représentation de tous les maires, de compenser le fait que les règles - y compris constitutionnelles - ne permettent pas de donner aux grandes communes la place qui devrait normalement leur revenir dans une telle structure. Faut-il que la loi formalise ces possibilités ? Je ne sais pas. Je préférerais, par une série de clauses générales, donner une plus grande capacité d'auto-organisation aux collectivités et aux intercommunalités.

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