Intervention de Philippe Martin

Mission d'information Démocratie représentative, participative et paritaire — Réunion du 8 mars 2017 à 14h15
Audition conjointe de Mme Maryvonne de Saint-pulgent présidente de la section du rapport et des études et de M. Philippe Martin président de la section des travaux publics du conseil d'état

Philippe Martin, président de la section des travaux publics du Conseil d'État :

La première famille de mesures, pour accélérer les procédures contentieuses, concerne les restrictions à l'entrée des recours, par le durcissement de l'intérêt pour agir ou la définition de formalités préalables. Il faut distinguer l'urbanisme et l'environnement. Il est vrai, qu'en matière d'urbanisme, des mesures ont été prises pour limiter les recours liés à des chantages de voisinage. Le contentieux de l'urbanisme est parfois très binaire : le requérant veut l'annulation totale de l'acte autorisant la construction de l'ouvrage et il n'y a guère de solution intermédiaire.

Il en va autrement en matière d'environnement, avec les associations agréées pour la protection de l'environnement, dont on peut difficilement contester la légitimité à engager des actions. Devant le juge, les affaires, principalement traitées en plein contentieux, concernent la proportionnalité de certaines mesures d'évitement ou de compensation. Le risque est peut-être moindre d'une contestation systématique du type « tout ou rien ». Je suis donc assez perplexe sur la possibilité de transférer certains mécanismes de resserrement de l'accès aux recours du droit de l'urbanisme vers le droit de l'environnement.

Quant aux vices de procédure, la jurisprudence « Danthony » de 2011 a effectivement changé le sort de certains contentieux. Il y a un avant et un après : les cas d'annulation sont plus rares. Les réformes du code de l'urbanisme afin de « purger » certaines illégalités sont très créatives et permettent de « gommer » un peu les inconvénients du recours pour excès de pouvoir.

En matière d'environnement, en plein contentieux, le débat se nouera devant le juge, qui aura le pouvoir de déterminer l'équilibre entre les intérêts divergents de l'exploitant et la protection de l'environnement. Ce droit se prête plus à un examen « pesé » des avantages et des inconvénients du projet. Il me paraît moins envahi par les contentieux abusifs que celui de l'urbanisme. Les délais fixés en matière de recours pour illégalité ou vice de forme y ont une logique. L'équilibre atteint après l'arrêt « Danthony » me semble digne d'être observé sans rajouter des mesures tout de suite.

Peut-on accélérer le contentieux par des décisions de justice en forme simplifiée pour les recours manifestement infondés ou généraliser les systèmes de saisine du Conseil d'État en premier et dernier ressorts ? L'évolution des juridictions va plutôt dans le sens d'une différenciation des niveaux de jugement. Sous réserve de règles de procédure appropriées, il n'est pas exclu de réfléchir à des formules de jugement rapide par un nombre de juges relativement restreint. Distinguons les formations restreintes de jugement des ordonnances. Ces dernières recourent à une procédure contradictoire allégée alors que les formations restreintes de jugement supposent une procédure contradictoire complète, alliée à la rapidité. J'ai toujours été intéressé par les formations de jugement restreintes, sans forcément passer par le stade de l'ordonnance, qui peut poser un problème d'acceptabilité aux yeux du requérant.

Quant aux saisines du Conseil d'État en premier et dernier ressorts, l'organisation de cette juridiction allant plutôt dans le sens de son désencombrement, je suis enclin à la modération...

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