Intervention de Gérard Mestrallet

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 15 février 2017 à 9h10
Compétitivité de la place de paris — Audition de M. Jean Beunardeau président de hsbc france M. Gilles Briatta secrétaire général de la société générale M. Jean François cirelli président de blackrock france M. Gérard Mestrallet président de paris europlace et M. Jean-Jacques Santini directeur des affaires institutionnelles du groupe bnp paribas

Gérard Mestrallet, président de Paris Europlace :

Au-delà du rapatriement potentiel de certaines activités bancaires sur le continent, le Brexit pose plus fondamentalement la question du rôle de la finance continentale. Dans la compétition mondiale pour le rayonnement, l'activité, la croissance et l'emploi, la France a besoin d'une finance forte, de proximité, compétitive, qui offre aux industriels un accès aisé aux marchés financiers.

Même après le Brexit, Londres restera la première place financière mondiale. L'objectif est de faire de Paris la première place financière de l'Union européenne post Brexit, mais surtout de faire en sorte que les différentes places européennes fournissent aux acteurs économiques européens, entreprises, particuliers, collectivités territoriales et États, des moyens de financement.

Après le Brexit, si l'influence anglo-saxonne est moins importante en Europe, il sera peut-être plus facile de parler de finance responsable, engagée dans le développement durable et la responsabilité sociale. Jean-François Cirelli a fort justement rappelé que BlackRock avait été à la pointe des gestionnaires d'actifs pour demander aux entreprises dans lesquelles il investit de ne pas céder aux sirènes du court terme. Il faut bien distinguer les gestionnaires d'actifs qui investissent sur le long terme et certains hedge funds. La prise de conscience par les acteurs financiers des défis du réchauffement climatique et de son coût économique a d'ailleurs grandement contribué au succès de la COP21.

Parmi les activités les plus concernées par le Brexit, on trouve la banque de financement et d'investissement, la gestion d'actifs, les assurances et les infrastructures, notamment la compensation.

Deux sujets importants n'ont pas encore été abordés : les FinTech et la finance verte.

La place de Paris regroupe 1 200 entreprises financières innovantes, ou FinTech. Il faut faire encore mieux, en réfléchissant notamment à la fiscalité.

Paris possède aussi une longue tradition en matière de finance verte, avec la Caisse des dépôts et consignations, la finance climat, la finance carbone et aujourd'hui les green bonds. Paris est la deuxième place du monde pour ces titres, après New-York et devant Londres. La France est aussi le premier État à avoir émis un green bond souverain, et Engie reste à ce jour l'entreprise ayant émis le plus gros green bond corporate.

La taxe sur les transactions financières est un handicap. Vouloir augmenter son taux me semble être une démarche inutile et contre-productive, et je ne crois pas qu'il y ait un taux acceptable. Les transactions financières sont extrêmement volatiles et, si vous les taxez dans un petit nombre de pays, elles se feront ailleurs. Sauf à ce que le monde entier se dote d'une telle taxe, elle a un effet négatif en termes d'image et aucun effet positif pour les recettes publiques.

Comme nous l'avions fait voilà cinq ans, Paris Europlace distribue un Livre blanc à tous les candidats à l'élection présidentielle. Il pose un diagnostic assorti d'un certain nombre de mesures qui nous sembleraient utiles. Sans surprise, nous demandons une nouvelle diminution de l'impôt sur les sociétés, pour atteindre la moyenne européenne. Les impatriés ont vu récemment leur régime prolongé de cinq à huit ans, avec de surcroît une exonération de la taxe sur les salaires pour leurs employeurs. Mais il faudrait réfléchir plus globalement à l'opportunité d'une telle taxe.

La fiscalité française sur l'épargne est incohérente, favorisant l'épargne courte et sans risque. Et les entreprises françaises souffrent d'une valorisation parfois plus faible que leurs concurrents étrangers en raison d'un flux de capital investi en actions insuffisant.

Les charges sociales patronales constituent également un vrai handicap par rapport à l'Allemagne.

Il faudrait aussi améliorer la flexibilité du marché du travail et assouplir les procédures. Je me souviens que, chez Engie, pour engager une réorganisation interne, nous avons dû consulter 84 instances ! Il faudrait simplifier. Le plafonnement des indemnités de licenciement, qui figurait dans la première version de la loi El Khomri, constitue un autre point important. L'activité bancaire est par nature cyclique et si les prud'hommes sont libres de fixer les indemnités de licenciement en cas de conflit, cela équivaut à un risque infini.

Paris Europlace, officiellement consulté par la Commission européenne, a exprimé un avis hostile sur le projet de fusion entre Deutsche Börse et LSE. Mais le dossier est désormais entre les mains des autorités de Bruxelles et du Land de Hesse, qui ne veut pas d'un transfert du siège à Londres.

Enfin, je ne me prononcerai pas sur l'avenir d'Euronext, mais les enjeux sont importants en termes de fonctionnalités, de stabilité financière et d'accès au marché. La capacité d'Euronext à offrir des services de qualité sur la durée est essentielle.

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