Intervention de Michel Vaspart

Délégation sénatoriale aux entreprises — Réunion du 23 février 2017 à 8h30
Examen du rapport d'information de mm. claude nougein et michel vaspart relatif à la transmission et à la reprise d'entreprises

Photo de Michel VaspartMichel Vaspart, rapporteur :

La quatrième action concerne le financement de la transmission, qui doit être modernisé et dynamisé. Nous regrettons que notre proposition d'élargissement du crédit-vendeur aux PME et ETI, votée au Sénat dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2016, n'ait pas été retenue par l'Assemblée nationale. Pourtant, le dispositif ne consistait qu'en un report - et non une annulation - de l'imposition ; il n'aurait eu qu'un impact négligeable pour les comptes de la nation. Le Gouvernement l'a d'ailleurs reconnu au moment du vote de l'amendement concernant les seules TPE, fin 2015.

Au nom tant de l'équité fiscale entre TPE, PME et ETI que de l'efficacité de la mesure, nous maintenons l'urgence et la nécessité de cette mesure : élargir le crédit-vendeur aux PME et ETI. Il faut donner à nos PME et ETI les moyens de rester dans nos territoires, sans risque de démantèlement ultérieur.

Une autre proposition facilitant le financement de la transmission serait d'abaisser de 5 % à 3 % la condition de détention du capital social fixée par l'article 397 A de l'annexe III du code général des impôts, autorisant un paiement différé puis fractionné des droits de mutation dans le cadre des entreprises familiales à actionnaires multiples. Cela permettrait de fluidifier les successions sans que les droits restant à payer obligent à une vente partielle ou totale de l'entreprise. Ce dispositif n'aurait qu'un faible coût pour les caisses de l'État tout en sécurisant l'actionnariat familial majoritaire, qui ne dispose pas toujours immédiatement des fonds nécessaires pour financer la succession. Nous connaissons tous ici des entreprises bien implantées dans nos territoires ruraux, mais dont l'ancrage n'est que le fruit d'une histoire familiale. L'actionnariat familial ne doit donc pas être inutilement fragilisé.

Enfin, nous rappelons que le financement de la reprise ne s'arrête pas le jour de la cession : plusieurs investissements sont souvent nécessaires pour moderniser les équipements quelques mois après la reprise. De la même manière, tout changement de direction induit parfois quelques réajustements les premiers mois. Or nous avons été alertés au sujet des conséquences importantes des dégradations temporaires des résultats des entreprises récemment cédées : leur cotation à la Banque de France s'en trouve abaissée, ce qui limite leur capacité de financement tout en augmentant leur taux d'emprunt. C'est potentiellement le début d'un cercle vicieux déstabilisant pour les acquéreurs. Nous suggérons donc de prévoir une alerte systématique de la Banque de France lors des reprises, afin que de jeunes entreprises transmises ne voient pas leur cotation dégradée alors même qu'elles sont en phase d'investissement. Le responsable de la Banque de France que nous avons rencontré ne voyait pas d'inconvénient à cette alerte préalable, bien au contraire.

Enfin, nous souhaitons proposer d'expérimenter un mécanisme de déduction fiscale de l'investissement en faveur de la transmission et de l'installation des jeunes agriculteurs, qui pourrait être élargi aux artisans qui s'installent. Le système, proposé par les jeunes agriculteurs, vise à éviter les stratégies de surinvestissement des dirigeants en fin de carrière dans une optique de défiscalisation. Acheter un tracteur de dernière génération renchérit le coût de l'installation pour le jeune repreneur et dissuade la reprise.

Le dispositif imaginé pour y remédier reposerait sur la dynamique suivante : cinq ans avant leur départ en retraite, les dirigeants pourraient déduire chaque année une fraction de leur bénéfice en vue d'aider le jeune repreneur ; le montant de la déduction serait déterminé librement par le futur cédant dans la limite d'un plafond proportionnel au bénéfice de l'exercice. Lors de la transmission à un jeune agriculteur, et pas à un autre exploitant cherchant uniquement à racheter dans un objectif de croissance externe, la somme globale ainsi épargnée serait débloquée et répartie entre le cédant d'une part - un tiers de la somme, non fiscalisée -, et le repreneur d'autre part - deux tiers de la somme ; le repreneur aurait jusqu'à dix ans pour rembourser cette somme.

L'efficacité de ce mécanisme nous paraît toutefois incertaine. C'est pourquoi nous suggérons de l'expérimenter dans un département agricole potentiellement intéressé et de l'élargir aux artisans.

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