Enfin, la sixième action porte sur la question de la reprise interne. Nos interlocuteurs nous ont régulièrement cité les études et rapports valorisant les reprises en interne, gages de pérennité de l'entreprise et de l'emploi. De même que les transmissions familiales, ces reprises permettent de sécuriser au mieux les salariés et l'ancrage d'une entreprise au sein d'un territoire. Nous souhaitons donc une action forte et efficace en la matière. Or les dispositions de la loi Hamon du 31 juillet 2014, rectifiée par la loi Macron du 6 août 2015, relatives à l'information préalable des salariés, ont un effet largement contreproductif, de l'avis de l'ensemble des personnes auditionnées.
Si nous partageons entièrement la nécessité de mieux accompagner la reprise interne par les salariés, nous ne pouvons que constater que le droit d'information préalable a eu un effet contraire à celui recherché : le temps octroyé est trop court pour permettre aux salariés de s'organiser, mais il est suffisamment long pour fragiliser l'entreprise, qui devient vulnérable aux yeux tant des fournisseurs que des clients. Une transmission réussie est parfois une transmission effectuée à l'abri des regards et non pas affichée sur la place publique. Nos interlocuteurs nous ont cité l'exemple d'entreprises qui avaient perdu de la valeur au fur et à mesure des annonces répétées de vente de la part de leur dirigeant.
Si le dispositif marche désormais, c'est essentiellement parce que les entreprises ont la possibilité de payer une amende plutôt que d'informer leurs salariés. Nous préconisons donc d'abroger ces dispositions de la loi Hamon et d'instaurer un vrai dispositif incitatif à la reprise interne, fondé non pas sur l'obligation, mais sur la formation et la facilitation. L'information des salariés doit être une formation continue : le cadre dirigeant doit pouvoir identifier au fur et à mesure les hauts potentiels parmi ses salariés, à qui il offrira une information voire une formation régulière, en partenariat avec, par exemple, la chambre de commerce et d'industrie locale.
L'incitation peut consister en une incitation fiscale avec des abattements plus élevés que ceux existants aujourd'hui, afin de mieux valoriser la reprise par les salariés. Nous suggérons également d'assouplir les conditions permettant un crédit d'impôt en faveur des sociétés rachetées par les salariés en octroyant ce droit à toute reprise effectuée par au moins cinq salariés.
Afin de faciliter la reprise et de laisser le temps aux salariés de préparer au mieux leurs projets de reprise d'entreprise en difficulté, nous suggérons également que soit augmentée de six à neuf mois la durée maximale des aides au montage et à la structuration financière dans le cadre du Nouvel accompagnement pour la création ou la reprise d'entreprise (NACRE).
Enfin, pour finir sur le cas spécifique de la reprise d'entreprises en difficulté, nous souhaiterions une meilleure coordination des actions des administrateurs judiciaires et des différents acteurs et conseils de la reprise, afin que l'intérêt de l'emploi et le maintien de l'activité soient bien affirmés comme prioritaires.
Voilà, résumé de manière succincte, l'ensemble des dispositions que nous préconisons pour dynamiser la transmission des entreprises et éviter que celles-ci ne quittent nos territoires, faute de politiques publiques efficaces pour inciter les nouvelles générations d'entrepreneurs à les reprendre et sauvegarder ainsi nos emplois.
Nous avons eu beaucoup de plaisir à réaliser ce rapport, que nous espérons le plus complet possible.