Avec mon co-rapporteur, Christian Bataille, nous allons vous présenter aujourd'hui le rapport d'évaluation du Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR) 2016-2018, 4e édition de ce document.
Tout d'abord, je voudrais dire quelques mots sur les conditions dans lesquelles s'est déroulée notre étude.
Le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs 2016-2018 a été transmis au Parlement le 17 février 2017 et publié cinq jours plus tard. L'article 6 de la loi du 28 juin 2006, à l'origine de la création de ce plan, prévoit qu'il fasse l'objet d'une évaluation par le Parlement. Celle-ci est confiée à notre Office parlementaire.
Compte tenu du calendrier parlementaire, qui prévoyait de longue date un arrêt des travaux de l'Assemblée nationale à la fin février 2017, l'OPECST a décidé d'anticiper sur la publication de ce nouveau PNGMDR en nous désignant, Christian Bataille et moi-même, rapporteurs de cette évaluation.
Malgré l'incertitude existant quant à la date de publication du PNGMDR, cette solution nous semblait préférable à un report de l'évaluation à l'automne prochain, les travaux sur un nouveau plan commençant, en principe, dès la publication du précédent. Une saisine tardive, comme celle intervenue pour l'évaluation du plan précédent, peut rendre difficile la prise en compte de certaines recommandations.
Ce document faisant l'objet, pour la première fois, d'un avis de l'Autorité environnementale et d'une consultation par le public, préalables à sa publication, il nous a été, malgré tout, possible de travailler, depuis plusieurs mois, sur la base d'une version quasi-définitive.
Conformément à la démarche d'évaluation de notre Office, nous avons tenu à entendre les principaux acteurs de la gestion des déchets nucléaires dans notre pays, dans le cadre d'auditions individuelles et d'une visite du site industriel de La Hague.
Nous avions également prévu d'organiser, avec les participants au groupe de travail qui élabore le PNGMDR, une audition publique, après la publication de ce document, notamment pour recueillir leur avis sur la version définitive et sur le fonctionnement du groupe de travail tout au long de son élaboration. Compte tenu des circonstances, cela n'a pas été possible, ce que nous regrettons vivement. À défaut, nous espérons pouvoir leur présenter, en début de la prochaine législature, les conclusions de notre rapport, et échanger avec eux à cette occasion.
Enfin, nous avons souhaité prendre connaissance de la façon dont la question de la gestion des déchets radioactifs était prise en compte à l'étranger, en Allemagne et aux États-Unis. Ces comparaisons internationales sont fondamentales, pour bénéficier de l'expérience acquise par les autres pays. Elles peuvent éviter de s'orienter vers des impasses ayant déjà montré leurs limites, ou, au contraire, de passer à côté de solutions à l'utilité avérée. Nous y reviendrons au cours de cet exposé.
Je vais commencer par aborder le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs sous l'angle de sa présentation et de son contenu, en illustrant également les conséquences de l'évaluation environnementale qui en a été faite pour la première fois. Christian Bataille reviendra ensuite sur les enjeux du retraitement des combustibles usés, qui constitue l'un des principaux piliers de la gestion des déchets radioactifs dans notre pays. Je reprendrai alors la parole pour traiter de la question complexe des déchets très faiblement radioactifs. Christian Bataille terminera son intervention en faisant un point sur le projet de stockage géologique des déchets de forte et moyenne activité à vie longue, notamment à partir des conclusions de notre précédente évaluation. Enfin, je conclurai nos propos.
Je vais donc d'abord présenter, en quelques mots, nos réflexions sur la forme et le fond du dernier PNGMDR ainsi que sur les conditions de son élaboration, puis je m'attarderai plus longuement sur les implications de la première évaluation environnementale de ce document.
Comme vous le savez, le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs a été instauré par la loi du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs. Cette même loi prévoit que ce plan soit établi et mis à jour tous les trois ans par le Gouvernement, puis transmis au Parlement, qui en saisit pour évaluation notre Office. L'article 6 de cette loi de 2006 définit très précisément les objectifs de ce document et les orientations qu'il doit respecter.
Au-delà de ces objectifs et orientations, le PNGMDR doit, bien entendu, également s'inscrire dans le cadre défini par les trois lois successives du 30 décembre 1991, du 25 juin 2006 et du 25 juillet 2016, relatives à la gestion des matières et déchets radioactifs. Je rappelle que Christian Bataille est à l'origine de la première d'entre elles et, qu'avec notre collègue sénateur Gérard Longuet, je suis à l'origine de la dernière.
Il serait difficile d'émettre un avis motivé sur la pertinence de chacune des orientations retenues dans le dernier PNGMDR. Mais la comparaison des versions successives montre que le travail réalisé par le groupe de travail pluraliste, a permis, au fur et à mesure des éditions, des avancées sur les différentes filières de gestion des matières et déchets radioactifs, ainsi que sur la prise en compte de types de déchets supplémentaires.
La relative stabilité de la composition du groupe de travail à l'origine du PNGMDR permet, en effet, d'assurer une bonne continuité dans le suivi des différents sujets, souvent complexes, touchant à la gestion des déchets radioactifs.
Conformément à la volonté du législateur, la démarche d'élaboration du PNGMDR constitue donc un outil de pilotage efficace de la gestion des matières et déchets radioactifs qui permet, en toute transparence, d'orienter les études et réalisations, d'identifier les écarts éventuels et de demander les mesures correctives nécessaires.
Le processus d'élaboration du PNGMDR 2016-2018 comporte une innovation majeure : il s'accompagne, en effet, d'une évaluation par l'Autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, le CGEDD.
Ni cette évaluation, ni le rapport associé, n'entrent, à proprement parler, dans le périmètre de l'évaluation de l'Office parlementaire. Néanmoins, cette nouvelle approche du PNGMDR conduit à modifier à la fois son contenu et les décisions prises dans le cadre de son processus d'élaboration. Il semble donc important d'en examiner les implications.
Dans son avis, l'Autorité environnementale du CGEDD émet une vingtaine de recommandations. La plupart d'entre elles sont destinées à une meilleure prise en compte des impacts sur l'environnement de la gestion des déchets radioactifs et à une meilleure information du public sur ceux-ci. Toutefois, quelques recommandations méritent une attention particulière, car elles impliquent une intervention du législateur. Faute de temps, je n'en donnerai qu'un seul exemple.
Dans son avis, l'Autorité environnementale relève, à juste titre, la possibilité d'une contradiction entre deux principes applicables à la gestion des déchets radioactifs. L'un, issu de la loi de 2006, préconise la réduction de la quantité et de la nocivité des déchets radioactifs, notamment par le traitement des combustibles usés. L'autre, introduit par la loi sur la transition énergétique de 2015, établit, pour tous types de déchets, une hiérarchie des modes de gestion, privilégiant le traitement, en vue d'une réutilisation, et le recyclage. En effet, la réutilisation ou le recyclage peuvent, en certaines circonstances, accroître l'impact environnemental des déchets.
Les informations recueillies lors de la mission que nous avons effectuée en Allemagne me conduisent à considérer que cette contradiction peut être en partie résolue, notamment par l'introduction des « seuils de libération » qui permettent de décider dans quelles conditions un déchet de très faible activité peut être réutilisé ou recyclé sans présenter de risque pour l'environnement et la population.
Toutefois, ces deux principes de gestion des déchets radioactifs ayant été introduits dans la loi par le législateur, nous considérons qu'il lui revient d'assumer cette clarification. C'est en effet au législateur de définir les grands principes qui conditionnent les activités économiques du pays, en recherchant, dans l'intérêt commun, le meilleur équilibre. Toute activité humaine a, en effet, un impact sur l'environnement et présente des risques. Mais l'absence d'activité a aussi des conséquences néfastes pour la société.
Pour résumer notre position, la démarche d'évaluation environnementale engagée pour la première fois dans le cadre du PNGMDR 2016-2018 nous apparaît, sans conteste, utile. Elle permet de mieux prendre en compte les impacts de la gestion des matières et déchets radioactifs sur l'environnement et de mieux en informer le public. Mais il faut que nous soyons vigilants sur les implications législatives de certaines des recommandations formulées.
Je cède la parole à Christian Bataille, qui va évoquer le retraitement et le recyclage des déchets radioactifs.