Intervention de Cécile Cukierman

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 4 avril 2017 à 14h30

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman, membre de la mission :

Je salue le travail réalisé par tous les membres de cette mission, qui a abouti à 300 pages et 127 propositions. Nous partageons également le constat qui y est dressé. Il est nécessaire et urgent de redresser notre justice, notamment de sanctuariser et de redresser son budget.

En matière d'accès à la justice, les propositions faites vont dans le bon sens, et nous les soutenons sans réserve. S'appuyer sur les technologies numériques, oui, mais faciliter l'accès à la justice ne doit pas conduire à la déshumaniser. Nous avons également toujours défendu une justice plus proche des citoyens, et c'est précisément ce qui nous rend hostiles à la restauration du « droit de timbre » pour l'aide juridictionnelle, qui avait été instauré en 2011 et supprimé en 2014.

Le rapport entend assurer un meilleur contrôle de l'attribution de l'aide juridictionnelle : qu'est-ce à dire ? Et comment s'y prendre ? Attention aux dérives que ne manquera pas d'entraîner un tel objectif. L'aide juridictionnelle est un moyen précieux pour tous d'accéder à la même justice. Souvenons-nous des propos d'Anatole France : « La justice est la sanction des injustices établies. »

Sur l'emprisonnement, nous divergeons totalement. L'introduction de dispositions sécuritaires visant à incarcérer toujours plus ne redressera pas la justice. La nature ayant horreur du vide, créer 15 000 places supplémentaires de prison conduira inévitablement à les pourvoir. L'emprisonnement doit être l'exception, non la règle. Nous gagnerions à lancer un vaste chantier sur le sens des peines, leur échelle, leur proportionnalité, la décroissance carcérale, mais un quinquennat n'y suffirait sans doute pas... Il n'y a en tout cas pas de fatalité : certains pays européens sont parvenus à faire décroître leur population carcérale !

Réviser la Constitution pour y inscrire l'indépendance du parquet et réformer le Conseil supérieur de la magistrature pour assurer l'indépendance des magistrats et réformer en profondeur notre magistrature est indispensable : nous le disions déjà en juin 2013, lorsque le Sénat s'est prononcé sur le projet de loi constitutionnelle.

Ce rapport a le mérite de poser la question de savoir quel système judiciaire nous voulons, mais nous restons opposés à certaines de ses propositions, qui vont à l'encontre de la conception de la justice que nous avons, et que nous continuerons à défendre.

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