Notre compétence est d'abord collective - personne ne peut prétendre détenir la vérité sur des dossiers aussi complexes.
Ensuite, elle est issue de la pratique et de l'exercice sur le terrain. Formée en droit, passée par Sciences Po, j'ai commencé mes travaux pratiques le jour où je me suis retrouvée, seule, en commission préfectorale. Tous les militants FNE font de même et agissent à l'aune de leur formation propre.
En outre, notre fédération fonctionne en réseaux thématiques. Des notes de positionnement sont élaborées collectivement, sur la forêt, l'agriculture ou encore l'eau et les milieux aquatiques, à l'attention de tous ceux que le sujet intéresse.
Quand une problématique complexe émerge des remontées de terrain, nous nous appuyons sur des travaux scientifiques et sur nos compétences issues de nos expériences précédentes pour définir un positionnement. Celui-ci constitue une sorte de doctrine mais il n'est pas imposé en tant que tel à l'échelon local, en vertu du principe de subsidiarité.
Ce positionnement transversal de FNE, qui nous permet une cohérence de langage, n'est pas toujours simple à élaborer, par exemple, sur un sujet impliquant à la fois les défenseurs des énergies renouvelables et ceux de la biodiversité. Nous disposons toutefois de procédures et de lieux d'arbitrage, ainsi que de lieux de formation.
Nous sommes très attachés à ce travail d'apprentissage et de prise de position collectifs, au point que nous l'avons formalisé dans nos règles de fonctionnement interne.
Quand la compétence n'existe pas au niveau local, nous allons la chercher ailleurs. Cela constitue parfois une difficulté, notamment lorsque la compétence se situe à l'autre bout de la France car, je le répète, nous fonctionnons avec des bénévoles et faisons face à des cas d'épuisement. Au regard de la complexité des problématiques soulevées, les moyens accordés à la démocratie participative sont assez minimes. Les nôtres ne sont pas proportionnés à ceux des acteurs avec qui nous dialoguons : nous faisons souvent figure de Petit Poucet !
De là naît cette impression de « participer en rond », comme à Sivens. Certains projets franchissent toutes les étapes de concertation sans évoluer, sans que les questions posées n'obtiennent de réponse.
D'ailleurs, la France ne s'est jamais arrêtée de fonctionner. Pratiquement tous les projets d'infrastructure aboutissent, y compris des projets médiocres. Ceux qui créent des crispations sont intéressants car, comme les contentieux, ils sont révélateurs de dysfonctionnements en amont. Ils reflètent l'essoufflement d'une procédure consultative qui consistait à se tourner vers les citoyens pour leur expliquer que l'État savait ce qui était bon pour eux. De cette forme de consultation, la population ne veut plus !
J'ai cité l'exemple de la rocade autoroutière de mon département où un dialogue très constructif s'est engagé ; c'est le seul cas de cette nature que je connaisse, en vingt ans de bénévolat associatif !
À l'occasion du cinquantième anniversaire de ma fédération du Maine-et-Loire, nous nous sommes remémorés les combats gagnés, notamment celui pour une « Loire vivante », visant à limiter l'urbanisation sur les bords du fleuve. Aujourd'hui, la Loire, classée au patrimoine mondial de l'UNESCO, est le moteur touristique du département. On oublie souvent le rôle joué par les associations dans cette lutte...