Chers collègues, cette réunion fait suite à la réunion du groupe de travail de la semaine dernière visant à vous présenter les conclusions du rapport d'information de Louis-Jean de Nicolaÿ et de moi-même, que nous avons intitulé « Aménagement du territoire : plus que jamais une nécessité ».
Vous le savez, nous avons créé l'année dernière un groupe de travail pour réfléchir à cette notion, pour, d'un point de vue tant théorique que pratique, en analyser les évolutions et les perspectives. Avec son rôle constitutionnel de représentant des territoires, le rôle du Sénat à cet égard est central.
Les fractures territoriales sont de plus en plus fortes et leurs conséquences se manifestent dans les urnes. Au premier tour de la dernière élection présidentielle, le Front national est arrivé en tête dans quelque 19 000 communes, ce qui est lié au sentiment d'abandon que l'on perçoit nettement dans la plupart des territoires ruraux. On a une France coupée en deux, avec d'un côté les grandes aires urbaines, qui, entre 2000 et 2010, ont concentré 75 % de la croissance économique et, de l'autre côté, des territoires ruraux ou périurbains, qui cumulent les « moins » : moins d'emplois, moins de dynamisme démographique, moins de services publics.
Face à cette situation, les gouvernements successifs ont été plutôt défaillants. L'aménagement du territoire est devenu au fil des ans le parent pauvre des politiques publiques. L'État a en effet relégué au second plan cette politique, qui était une spécificité française, en n'ayant plus de volonté réelle ni de vision stratégique sur ce sujet.
Pour autant, on ne peut plus aborder l'aménagement du territoire comme on le faisait dans les années 1960 et 1970. Il faut tenir compte de la décentralisation, de la mondialisation, de la construction européenne. En outre, de nouveaux acteurs ont émergé, l'État n'est plus le seul à intervenir dans ce secteur. Enfin, les méthodes ont fortement évolué ; il ne s'agit plus de définir une politique allant du haut vers le bas.
Je ne m'étendrai pas davantage sur le constat, largement partagé, mais je souhaitais tout de même rappeler que la situation est pour le moins préoccupante.