Le premier axe consiste à renouveler le rôle de l'État dans l'aménagement du territoire. Il n'est pas question de remettre en place une politique allant du haut vers le bas mais on ne peut laisser perdurer cette situation, dans laquelle l'État est devenu un spectateur ou, pour reprendre son expression, « un facilitateur » en matière d'aménagement du territoire. Il a un rôle éminent de stratège, de régulateur, voire d'acteur, à jouer.
Nous proposons de mesurer systématiquement l'impact sur l'aménagement du territoire des décisions qui sont prises. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, au point que le Conseil d'État, dans son avis sur le récent projet de loi Montagne, avait souligné la faiblesse de l'étude d'impact. Les lois et décrets doivent mesurer l'impact de leurs mesures sur l'aménagement du territoire.
Nous proposons également d'évaluer les différents dispositifs de schémas et de zonages. Ces outils se multiplient ; il conviendrait de les évaluer et éventuellement d'en réduire le nombre.
Il nous paraît également essentiel que le critère d'aménagement du territoire soit pris en compte dans les choix de régulation et d'investissement de l'État, dans la mesure où, sur certains territoires, l'initiative privée ne suffit pas.
Enfin, nous proposons de revoir le pilotage stratégique de l'aménagement du territoire. Ronan Dantec se souvient sans doute que, lorsque nous avons auditionné le Commissariat général à l'égalité des territoires, le CGET, nous étions abasourdis d'apprendre que le commissaire général ne se positionne pas du tout comme un acteur de l'aménagement du territoire ; il se contente d'assister à des colloques... Nous souhaitons la mise en place d'une véritable structure de pilotage, placée sous l'autorité d'un secrétaire d'État rattaché directement au Premier ministre, car l'aménagement du territoire nécessite une action transversale.
Deuxième axe, il faut conforter le rôle des collectivités territoriales. Je le disais, il n'est pas question de tout remonter au niveau de l'État ; nous pensons qu'il faut encourager un binôme pertinent : le binôme région-établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). En effet, la loi NOTRe a renforcé les compétences des régions dans ce domaine ; elles disposent ainsi de la légitimité et de la capacité à intervenir. De même, les EPCI sont beaucoup plus grands depuis le 1er janvier 2017, et ils ont donc une importante capacité d'action ; ils ont même une obligation d'action, car ils ne peuvent plus concentrer tous les services dans le chef-lieu de l'intercommunalité. Ils doivent mailler leur territoire des différents services et équipements.
Tout cela n'est pas encore stabilisé, mais nous croyons beaucoup à ce binôme. Cela ne signifie pas que le département soit exclu de l'aménagement du territoire, notamment dans les zones très rurales ne disposant pas de grands EPCI.
Il est urgent par ailleurs de faire une pause dans le domaine de la gouvernance territoriale. Nous recommandons un moratoire sur les réformes territoriales. Il y a eu beaucoup de réformes ces dernières années et il faut maintenant laisser les choses se décanter.
Afin de conforter le rôle des acteurs locaux, nous préconisons de privilégier systématiquement la contractualisation entre collectivités territoriales. Cette démarche permet d'avoir une action concertée et efficace.
Par ailleurs, Rémy Pointereau y sera sensible, il convient de simplifier les normes applicables aux collectivités territoriales pour libérer les initiatives locales. Notre collègue a mené un travail important en tant que premier vice-président de la délégation aux collectivités territoriales. Ses préconisations doivent être reprises et appliquées.
Le troisième axe est celui des ressources. Les finances locales sont un levier privilégié pour réduire les fractures territoriales, mais nous savons aussi qu'à force d'accumuler les dispositifs - dotations, subventions - les finances locales se sont transformées en un système opaque, confus, incompréhensible.
Nous sommes donc favorables à une remise à plat des dotations et des subventions pour les rendre plus équitables, lisibles et transparentes. Il n'est pas normal que la DGF par habitant dans une commune urbaine soit de 1,5 à 2,5 fois plus élevée que dans une commune rurale. Ces inégalités de DGF sont souvent elles-mêmes amplifiées par les subventions régionales. En Haute-Normandie, par exemple, les subventions s'élèvent à 230 euros par an et par habitant en zone urbaine contre 50 euros en zone rurale.
Le quatrième axe porte sur la couverture numérique du territoire et sur la lutte contre les déserts médicaux. Nous ne faisons pas de proposition nouvelle sur ces deux points mais il faut que les propositions déjà formulées par notre commission soient reprises dans leur intégralité.
En ce qui concerne le numérique, un classement récent publié par la Commission européenne classe d'ailleurs la France au vingt-septième rang sur vingt-huit pour l'équipement en très haut débit fixe. S'agissant du mobile, les engagements pris dans le cadre de la loi dite « Macron » sur la couverture 2G à l'échéance fin 2016 n'ont pas été tenus.