Intervention de Michel Raison

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 31 mai 2017 à 9h35

Photo de Michel RaisonMichel Raison :

Un rapport sénatorial sur la démocratie participative vient de sortir. Je vous encourage à le lire, il est exceptionnel. Le président de la mission d'information, Henri Cabanel, et son rapporteur, Philippe Bonnecarrère, étaient tous les deux excellents et le rapport est très bon. Il constitue aussi une forme de réponse à cette interrogation et j'espère qu'il aura des effets.

Quand on analyse ce qui se passe dans notre pays, que voit-on de nouveau, de révolutionnaire ? Rien. On va essayer de réformer vaguement le code du travail, vraisemblablement sans y arriver ; on va convaincre les gens que les hommes politiques sont immoraux donc on va faire une loi de moralisation de la vie politique ; jusque-là rien de révolutionnaire...

En revanche, les propositions contenues dans ce rapport sont, elles, révolutionnaires. Vous l'avez dit, monsieur le président, l'État est devenu, en matière d'aménagement du territoire, facilitateur, voire seulement spectateur. C'est très grave. Notre pays faisait de l'aménagement du territoire autrefois. Le président de mon département ne fait que de l'accompagnement autour des pôles urbains, il se moque du reste !

Il faut peut-être créer un véritable ministère mais il ne doit pas être artificiel. Le dernier ministre qui ait tenté de faire quelque chose en matière d'aménagement du territoire, c'est Édith Cresson. Elle avait essayé de délocaliser des administrations - le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles, l'ENA - et elle a eu des manifestations et des grèves dans tous les sens.

J'en reviens aux ressources. Lorsqu'elles ont été créées - maintenant elles sont devenues trop compliquées -, les méthodes de calcul de la dotation étaient intelligentes, elles étaient calculées en fonction des charges et des compétences des collectivités.

Le problème c'est qu'il faut maintenant se financer son pylône téléphonique, sa fibre optique. Dans mon département, on donne ainsi 9 euros par habitant, hors dotation, c'est une folie. Sans doute faut-il simplifier le calcul de la dotation mais non nécessairement le bouleverser.

Quant aux routes, voilà un vrai déséquilibre. Les impôts du monde rural financent des quadruplements d'autoroutes dans des pôles urbains mais on attend depuis quarante ans une autoroute - dans la Haute-Saône, il n'y en a pas. Il existe ainsi une banane aride de 130 kilomètres entre le sud de la Haute-Marne, le nord de la Haute-Saône et les Vosges, un tronçon bloqué entre l'Atlantique et la Suisse faute d'un nombre suffisant de véhicules. Évidemment, puisqu'il n'y a pas de route ! Arrêtons là les bêtises !

On doit financer le désenclavement et il faut que l'on puisse téléphoner. Lorsque le téléphone à fil est apparu, on l'a installé partout, y compris dans le moindre hameau. Depuis lors, on a privatisé la téléphonie mobile donc l'opérateur installe des pylônes là où c'est rentable, on ne peut pas lui en vouloir. On a le même problème avec la SNCF ; c'est un opérateur. C'est à l'État de payer. Un train d'équilibre du territoire est, par définition, déficitaire. Même si la SNCF était mieux gérée, il serait normal qu'elle conserve des déficits sur ces lignes.

On peut toujours parler mais le vrai problème d'équilibre et d'équité est là : on ne finance plus de route, de téléphone, de fibre optique, les gens doivent le financer. On nous subventionne un peu mais c'est insuffisant. Là est l'inégalité financière.

Vous avez beaucoup parlé des commerces. Plus de la moitié de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA, qui alimente le FISAC et qui a été doublée il y a un an ou deux, est captée par le budget de l'État. La grande distribution paie donc des taxes élevées, on ne s'en plaindra pas, mais cela n'abonde pas complètement le FISAC. L'État a donc volé la taxe au FISAC, qui n'a plus d'argent.

Enfin, nous avons un cheval de bataille commun, monsieur le président, c'est la santé. On ne va pas continuer à regarder la situation s'aggraver sans rien faire pendant dix ans. Depuis mon mandat de député, en 2002, je propose à chaque loi sanitaire le même amendement ; il n'est jamais adopté. Il n'est pourtant pas fracassant, il s'agit de plafonner les zones sur-dotées en médecins. Mais, que l'on ait un gouvernement de droite ou de gauche, il nous explique chaque fois que l'on ne comprend rien. D'un autre côté, on n'aura bientôt plus de médecin...

Il y a bien des problèmes que l'on aura du mal à résoudre mais la priorité, c'est que l'État ne soit plus spectateur, que l'équité dans le financement soit rétablie et que le monde rural ne finance pas les routes en voyant passer les trains, et même en ne les voyant plus passer...

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