Intervention de Jean-Claude Requier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 7 juin 2017 à 9h40
Contrôle budgétaire — Missions locales - communication

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier, co-rapporteur :

Notre rapport s'inscrit dans la continuité des travaux que nous avons effectués en 2015 sur les écoles de la deuxième chance. La jeunesse ayant été désignée comme la priorité du quinquennat précédent, il nous a paru important de nous pencher sur les dispositifs qui ont été mis en oeuvre ou renforcés dans ce cadre. Et, trente-cinq ans après leur création, les missions locales sont un acteur majeur de l'accompagnement des jeunes. Leurs responsabilités ont été considérablement accrues au cours des dix dernières années, et notamment depuis 2012. C'est pourquoi nous avons souhaité établir un bilan de leur action, des résultats qu'elles enregistrent et des difficultés qu'elles peuvent rencontrer.

Les missions locales sont issues des recommandations du rapport sur l'insertion professionnelle et sociale des jeunes remis en 1981 au Premier ministre Pierre Mauroy par Bertrand Schwartz. Leur création part du constat de la persistance d'un très fort taux de chômage chez les jeunes, trois fois supérieur à celui des adultes, et d'une précarisation de plus en plus importante des 16-25 ans. Initialement envisagées comme des structures temporaires, elles ont été pérennisées par la loi du 19 décembre 1989 favorisant le retour à l'emploi et la lutte contre l'exclusion professionnelle. Leur réseau compte à présent 445 missions locales et plus de 6 560 sites, ce qui offre une couverture quasi complète du territoire. Chaque structure couvre un territoire comprenant en moyenne 17 400 jeunes. Des disparités importantes existent cependant selon les territoires, celui de la mission locale d'Ambert dans le Puy-de-Dôme ne comptant que 2 000 jeunes, quand celui de la mission locale de Paris en comprend 322 500, soit un écart de 1 à 160. Les missions locales emploient près de 12 000 personnes.

Elles ont été pensées dès l'origine comme des organes fédérateurs de l'ensemble des acteurs locaux compétents en matière d'insertion professionnelle et sociale des jeunes. Leur originalité réside dans la polyvalence de leurs missions. Le code du travail leur assigne ainsi quatre fonctions principales. D'abord, elles doivent proposer aux jeunes accueillis un accompagnement global, c'est-à-dire destiné à les aider à résoudre leurs difficultés en matière de santé, de logement, d'insertion sociale et professionnelle, de formation, etc. Deuxièmement, il s'agit de favoriser la concertation entre les différents acteurs de l'insertion professionnelle et sociale des jeunes. À ce titre, les missions locales font partie du service public de l'emploi et entretiennent des relations avec Pôle emploi ainsi qu'avec les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi. Troisièmement, il leur incombe de participer à la détermination d'une politique locale concertée en faveur de l'insertion et de l'emploi des jeunes. Enfin, elles doivent participer au repérage des situations qui nécessitent un accès aux droits sociaux, à la prévention et aux soins.

Les services qu'elles proposent comprennent différents degrés d'intensité. Au cours d'un premier accueil, un conseiller fournit au jeune une information générale relative à l'offre de service de la structure. Elles réalisent ensuite un diagnostic global de la situation du jeune et une aide à la détermination d'un projet professionnel. Enfin, elles peuvent proposer au jeune un accompagnement personnalisé dans le cadre de dispositifs nationaux ou locaux.

Leur rôle dans l'accompagnement économique et social des jeunes a été peu à peu renforcé, l'État leur confiant le portage à titre principal de certains dispositifs de la politique de l'emploi. Ainsi, en 2005, elles ont été chargées de la mise en oeuvre du contrat d'insertion dans la vie sociale. Par ailleurs, dans le cadre de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 7 avril 2011, les partenaires sociaux ont confié à Pôle emploi, à l'Association pour l'emploi des cadres et aux missions locales la mise en oeuvre d'un accompagnement socioprofessionnel renforcé.

Depuis 2012, le rôle des missions locales s'est considérablement accru, l'État leur ayant confié la mise en oeuvre de différents dispositifs nationaux, en particulier des emplois d'avenir et de la garantie jeunes. L'article 46 de la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a créé un parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA), qui doit constituer l'unique cadre contractuel de l'accompagnement des jeunes. Dès lors, la garantie jeunes, généralisée depuis le 1er janvier 2017, ne constitue plus qu'un instrument parmi d'autres pouvant être mobilisé par les missions locales dans le cadre du PACEA.

Outre l'accompagnement direct assuré par les missions locales dans le cadre de dispositifs nationaux, celles-ci peuvent également être prescriptrices de contrats aidés et orienter les jeunes accueillis vers des dispositifs de la deuxième chance - écoles de la deuxième chance ou établissement pour l'insertion dans l'emploi - des formations ou un parrainage.

En 2015, les missions locales ont été en contact avec près de 1,4 million de jeunes. Entre 2007 et 2015, ce nombre a ainsi crû de près de 30 %. En moyenne, les missions locales ont donc accueilli plus de 3 000 jeunes par structure. Pour autant, comme le rappelle l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), une forte disparité peut être constatée autour de cette moyenne. La mission locale d'Autun - ville bien connue par son ancien évêque, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, dit Talleyrand - a ainsi accueilli 737 jeunes en 2015, quand celle de Paris a été en contact avec plus de 28 000 jeunes.

De manière assez logique, l'évolution du nombre de jeunes accueillis par les missions locales est étroitement corrélée à l'évolution de la situation du marché de l'emploi des 15-24 ans. Les publics ayant recours aux services des missions locales sont en moyenne faiblement qualifiés. La proportion de jeunes peu qualifiés en premier accueil s'élevait à un peu plus d'un tiers du total en 2013. Ils rencontrent en outre des difficultés en matière de logement, puisque seuls 20 % des jeunes en premier accueil disposaient d'un logement autonome, et de transport - 60 % d'entre eux n'ont aucun moyen de transport individuel motorisé.

En trente-cinq ans, les missions locales se sont donc imposées comme des acteurs incontournables et indispensables du service public de l'emploi. Il convient désormais d'en conforter le positionnement.

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