Intervention de Françoise Cartron

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 7 juin 2017 à 14h30

Photo de Françoise CartronFrançoise Cartron :

Je tiens à saluer le contenu de ce rapport dans lequel, comme l'a fort aimablement souligné Jean-Claude Carle, je retrouve beaucoup des éléments figurant dans celui que j'avais remis au Premier ministre. Le fait de nous retrouver sur les constats et les préconisations montre que nous avons mené nos investigations en écoutant les acteurs de terrain, en toute objectivité.

Je partage le souci de stabilité exprimé par Jean-Claude Carle. En matière d'éducation, les résultats ne peuvent s'apprécier que sur un temps long. On ne peut évaluer une réforme un an seulement après qu'elle a été mise en place. Donnons un peu de temps au temps.

Stabilité ne veut pas dire statu quo. Comme vous, je pense qu'on ne peut pas appliquer la réforme des rythmes scolaires de la même manière en maternelle et en primaire. S'agissant de la maternelle, il faut se montrer à la fois plus pragmatique et moins consommateur d'activités. Les enfants de cet âge ont besoin, comme vous l'avez dit, de repères, de stabilité.

Je me montrais plus sévère que vous sur l'éducation nationale, dont l'implication m'a semblé insuffisante dans la mise en place des rythmes scolaires. Comme l'a souligné Jacques Grosperrin, ces nouveaux rythmes n'avaient d'intérêt que s'ils permettaient une évolution des pratiques pédagogiques et de l'organisation des apprentissages. Ce n'est pas en rajoutant une matinée sans rien changer d'autre que l'on conduira une véritable « révolution ».

Les enseignants n'ont pas été suffisamment accompagnés dans cette réflexion. La mise en place d'une semaine de quatre jours et demi ne devait pas reposer sur le même emploi du temps que celui d'une semaine de quatre jours. C'est une réflexion pédagogique que nous devons absolument mener.

Les communes ont dû, dans un premier temps, trouver des intervenants qualifiés. Elles ont notamment su le faire à travers des plans de formation pour leurs personnels municipaux, ce qui est une très bonne chose. Aujourd'hui, elles ont besoin d'être accompagnées sur les contenus. La crainte d'un certain assèchement des premiers ateliers dont les enfants ont fait le tour se fait jour.

Avec la présidente de la Réunion des musées nationaux (RMN), nous avons conçu une boîte pédagogique permettant aux communes de mettre en place des ateliers tout au long de l'année autour de l'art. La première mallette, sortie voilà un mois, développe dix thématiques autour du portrait, présenté sous toutes ses formes, à partir d'oeuvres des grands musées nationaux - le portrait et le pouvoir, le portrait et le sentiment, le portrait et la caricature, l'autoportrait... Chaque thématique permet de décliner au moins douze ateliers ludiques. Cette boîte pédagogique coûte 150 euros pour une année et comprend un suivi assuré par la RMN. Il s'agit donc d'un outil très abordable, qui peut être mutualisé, et qui permet d'enrichir les contenus pédagogiques des communes les plus éloignées des centres culturels. La deuxième mallette portera sur le paysage et la troisième sur les animaux.

Je souscris totalement à vos propos sur l'évaluation. L'inspection générale de l'éducation nationale doit évaluer les conséquences de cette réforme.

Votre deuxième préconisation, qui consiste à mettre en place une méthodologie commune du calcul du coût pour les collectivités territoriales, sur laquelle tout le monde s'accorde, me paraît extrêmement importante.

Je me suis penchée sur un certain nombre de budgets communaux ; j'ai constaté que personne ne mettait la même chose derrière les chiffres. On annonce un coût pour les activités mises en place dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires qui peut concerner l'ensemble du périscolaire. On m'a ainsi expliqué qu'il n'était pas possible d'identifier le coût d'un animateur également chargé du périscolaire. J'aimerais donc connaître les vrais chiffres pour pouvoir parler des vrais coûts.

Je n'ai pu me livrer qu'à l'analyse budgétaire d'un nombre restreint de communes. Ma remarque ne peut donc valoir pour l'ensemble des communes, mais j'ai tout de même pu constater que les dépenses présentées au titre de la mise en oeuvre de la réforme des rythmes scolaires comprenaient soit des dépenses globales soit des dépenses induites par une offre nouvelle présentée comme un coût supplémentaire.

Nous devrons encore faire preuve de vigilance et exiger du Gouvernement qu'il continue d'accompagner les communes, mais au regard du vrai coût. Ainsi, les 50 euros accordés par l'État ne concernent que les enfants inscrits à l'école et non aux temps d'activités périscolaires. Dès lors, si la fréquentation du vendredi après-midi n'est que de 50 %, la commune ne touche pas 50 euros, mais 100 euros par enfant. Elle en touche même 180 en cas de majoration.

C'est la raison pour laquelle nous devons disposer d'une analyse très précise pour savoir ce que la commune perçoit et dépense réellement. Les caisses d'allocations familiales ne délivrent d'aides qu'en fonction de la présence aux ateliers, avec une contrepartie décourageante pour les maires, celle d'un pointage heure par heure. Nous devrions plutôt nous diriger vers le forfaitaire.

Je partage les propos de Jean-Claude Carle : il est indispensable de mettre en place une grille d'évaluation financière pour voir les choses le plus clairement possible.

Je ferai une dernière remarque en lien avec le calendrier scolaire annuel : l'année scolaire d'une de mes petites-filles, en seconde, est déjà terminée. Le conseil de classe a eu lieu samedi dernier et elle n'a plus cours. Comme vous l'avez souligné, il faut mener une réflexion globale intégrant l'organisation des épreuves du baccalauréat. Aujourd'hui, l'année scolaire des élèves de collège et de lycée est terminée. Ce n'est plus acceptable. Pensons aux enfants de certaines banlieues qui sont désormais au pied des immeubles...

Vincent Peillon avait tout à fait conscience de ces difficultés, mais au regard de l'émeute provoquée par l'ajout d'une matinée, le raccourcissement de la durée des vacances scolaires l'a fait reculer. Toujours est-il que je ferai partie de ceux qui soutiendront le ministre qui portera cette réforme.

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