Tout d'abord, le rapport précise bien que ce n'est pas la fraude qui progresse, mais sa détection. Pour donner un ordre d'idées, selon la CNAF, les fraudeurs représentent 0,36 % des bénéficiaires. Par ailleurs, compte tenu de la complexité du système déclaratif, en cas de changement de situation, la frontière est relativement ténue entre la fraude, d'une part, les omissions et erreurs, d'autre part. Il convient donc de relativiser le phénomène.
Ensuite, il faut souligner l'importance des moyens de contrôle mis en oeuvre. Selon Aude Cournée, sous-directrice en charge du contrôle à la CNAF, 35 millions de contrôles ont été effectués en 2016, un allocataire sur deux étant contrôlé chaque année, ce qui prouve le caractère « musclé » de ces contrôles.
Ce qui gêne mon groupe, c'est que l'on ne sent pas la même détermination pour combattre la fraude aux cotisations patronales, qui dépasse 16 milliards d'euros selon la Cour des comptes, soit nettement plus que la fraude aux prestations. Sans cette fraude aux cotisations, le déficit cumulé de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse serait résorbé. Or il convient de comparer l'intensité des contrôles d'un côté et de l'autre : 200 agents seulement sont chargés de contrôler le travail dissimulé sur l'ensemble du territoire national ; une entreprise en infraction sur cent est poursuivie ; enfin, le montant des amendes est dérisoire - par exemple, 437 euros pour absence de déclaration sociale préalable.
Je reçois régulièrement à ma permanence des personnes victimes d'une forme de brutalité dans la récupération des indus, les montants recouvrés allant parfois jusqu'à la moitié d'un RSA. Je croyais que le recouvrement devait permettre aux allocataires de disposer d'un minimum vital ; or plusieurs des exemples dont j'ai eu à connaître me prouvent que tel n'est pas toujours le cas. Cette brutalité devrait nous alerter.
En conclusion, la question de la fraude aux prestations ne peut pas être abordée sans envisager parallèlement celle de la fraude patronale, dans un pur souci de justice.