Intervention de Nicole Belloubet

Réunion du 10 juillet 2017 à 16h00
Rétablissement de la confiance dans l'action publique — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi et d'un projet de loi organique dans les textes de la commission

Nicole Belloubet :

Je vous remercie, monsieur le président, de ces mots chaleureux. C’est effectivement une première pour moi ; il est toujours à la fois impressionnant et émouvant de se trouver au Sénat, devant la représentation nationale.

Monsieur le président, monsieur le président et rapporteur de la commission des lois, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, conformément à l’engagement pris devant les Français par le Président de la République, vous êtes aujourd’hui saisis d’une réforme très attendue, je crois, par nos concitoyens, et dont l’ambition est de rétablir la confiance dans l’action publique.

Dès son entrée en fonction, mon prédécesseur, M. François Bayrou, a préparé un projet de loi organique et un projet de loi ordinaire. Ces textes ont été présentés au conseil des ministres le 14 juin dernier et ont été déposés le même jour sur le bureau de votre assemblée.

J’ai aujourd’hui l’honneur de présenter devant vous, au nom du Gouvernement, ces deux textes.

La transparence, la probité des élus, l’exemplarité de leur comportement constituent une exigence sociale, politique et éthique fondamentale. Le respect de cette exigence a toujours constitué le fondement de la confiance que les citoyens éprouvent à l’égard de leurs gouvernants comme de tous ceux qui concourent à l’exercice de l’action publique.

Est-il nécessaire de rappeler que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 proclame, en son article XV, que « la Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration » ? Ce principe de confiance est donc ancré dans notre histoire depuis longtemps et, ces dernières années, beaucoup a été fait pour mieux répondre à des exigences nouvelles.

Plusieurs textes ont été adoptés sur ces sujets. Je me contenterai de les énumérer brièvement : les lois organique et ordinaire du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique, qui ont créé la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, qui a institué un procureur de la République financier, la loi du 20 avril 2016, qui a renforcé les obligations déontologiques des fonctionnaires et, plus récemment, la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, qui a notamment créé l’Agence française anticorruption.

Avant même l’adoption de ces lois, le Parlement avait de son propre chef, il faut le souligner, agi en la matière. Dès 2009, le Sénat s’est doté, sur l’initiative du président Larcher, d’un comité de déontologie parlementaire ; il a été suivi par l’Assemblée nationale, qui a institué un déontologue en 2011. De grands progrès ont donc été accomplis au cours des dernières années, c’est absolument indiscutable.

Néanmoins, beaucoup reste encore à faire pour restaurer cette confiance, nécessaire dans une démocratie, entre les citoyens et leurs représentants.

Je souhaite le dire d’emblée et être très claire sur les intentions du Gouvernement : il n’est aucunement question ici de stigmatiser le comportement de l’ensemble des élus locaux et nationaux, dont l’engagement exemplaire doit être sans cesse rappelé. Cela dit, nul ne peut le nier, certains agissements ou certaines pratiques, qui hier étaient acceptés, ne le sont plus désormais. L’exigence éthique dans la société est aujourd’hui, plus encore qu’hier, à l’ordre du jour.

La détermination de règles claires – non de principes moraux – est d’ailleurs l’une des meilleures garanties qui puissent être apportées aux élus, car elle permet de leur donner des repères face à des situations parfois extrêmement complexes.

Je suis convaincue que le rétablissement de cette confiance permettra aux citoyens d’apprécier l’engagement des élus sous son meilleur jour et leur volonté d’agir efficacement dans le sens de l’intérêt général sans compter leur temps ni leurs efforts. Je sais cela suffisamment pour pouvoir l’affirmer ici avec force.

C’est précisément pour cela que nous avons collectivement besoin d’un choc de confiance. En vous proposant ces dispositions, nous sommes fidèles à une histoire et à un projet, celui qui faisait dire à Jean Jaurès, dans son discours à la jeunesse, à Albi, en 1903, « Dans notre France moderne, qu’est-ce donc que la République ? C’est un grand acte de confiance ». Le mot était lâché…

Par cette réforme, le Gouvernement entend apporter une réponse globale, fondatrice, en proscrivant définitivement certaines pratiques, mais également en renforçant la transparence et le pluralisme de la vie politique.

Tout en édictant de nouvelles règles qui renforcent les garanties de probité et d’intégrité des élus et la prévention des conflits d’intérêts, répondant ainsi à un objectif d’intérêt général défini par le Conseil constitutionnel en 2013, cette réforme se veut également respectueuse de la séparation des pouvoirs, à commencer par l’autonomie des assemblées.

Elle répond à quelques principes simples : sanctionner plus sévèrement ceux qui manquent à la probité et éviter les conflits d’intérêts ; mettre fin à des pratiques qui ne sont plus acceptées par les citoyens ; renforcer les contrôles sur les comptes des partis, tout en leur offrant, ainsi qu’aux candidats, un accès plus facile au financement, un moyen de garantir la réalité du pluralisme.

J’évoquais la prise de conscience collective qui nous conduit à cette réforme et je voudrais rendre hommage à votre commission des lois, de même qu’à son président-rapporteur, M. Philippe Bas, qui a montré ces derniers jours sa volonté de s’inscrire résolument dans cet esprit.

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