Intervention de Didier Marie

Commission des affaires européennes — Réunion du 6 juillet 2017 à 9h30
Élargissement — Relations entre l'union européenne et la turquie : rapport d'information de mm. jean-yves leconte et andré reichardt

Photo de Didier MarieDidier Marie :

La présentation du rapport et les interventions de nos collègues montrent que la question des relations avec la Turquie est extrêmement sensible.

Tout d'abord, il faut toujours penser au respect des droits fondamentaux des Turcs eux-mêmes, qui vivent une situation très difficile.

Ensuite, Louis Nègre vient d'évoquer l'implication de la Turquie dans la lutte contre Daesh et sa position à l'égard du conflit en Syrie et en Irak. Par ailleurs, la Turquie est membre de l'OTAN et les dérives actuelles de son gouvernement peuvent créer un certain nombre de difficultés du point de vue de l'équilibre des relations internationales.

M. Erdogan tient grâce à une croissance annuelle de 5 %. Celle-ci lui a permis d'obtenir l'appui électoral des populations rurales d'Anatolie qui ont largement bénéficié du développement économique. Il a moins d'appuis dans les populations du littoral, les résultats du référendum l'ont montré. Quant aux 5 millions de Turcs qui vivent en Europe, ils ont voté massivement en faveur du oui. Cette diaspora bénéficie, elle aussi, de la croissance économique grâce aux investissements qu'elle réalise en Turquie.

M. Erdogan a adopté une stratégie qui vise à accroître sa mainmise sur le pays par un autoritarisme toujours plus assumé. Il cherche parallèlement à desserrer la contrainte liée à la relation avec l'Union européenne en investissant massivement dans les Balkans, dans le Golfe, en Égypte et dans les anciennes républiques soviétiques.

Nous assistons donc à la mise en place d'un schéma subtil : la dérive autoritaire manifeste pour contrôler le pays ne peut s'appuyer que sur une croissance économique forte ; les relations avec l'Union européenne ne vont pas s'arranger, il faut donc desserrer l'étau en développant le marché intérieur et en allant conquérir des marchés extérieurs.

L'Union européenne et la France doivent trouver un juste équilibre entre le maintien d'un dialogue avec le gouvernement turc et l'AKP et la dénonciation de la dérive autoritaire. J'estime que nous devons être intransigeants sur nos valeurs ; encore faudrait-il que l'Union européenne les défende suffisamment et les assume pleinement en son sein, faute de quoi il lui sera difficile de donner des leçons. Cette position doit aussi se traduire dans les relations bilatérales : il n'est pas question d'alléger le dispositif d'octroi de visas dès lors que M. Erdogan veut rétablir la peine de mort et ne respecte pas les sept critères évoqués par André Reichardt, notamment la reconnaissance de Chypre.

La question kurde n'a pas été suffisamment évoquée. Elle constitue un problème interne à la Turquie, mais aussi un problème régional très important qui détermine en grande partie la position de ce pays sur la scène irako-syrienne et ne pourra trouver de solution autre que politique. Malgré l'intransigeance affichée d'Erdogan, existe-t-il un espoir de le voir trouver à terme un accord avec le HDP et les Kurdes ?

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