Intervention de Nicole Belloubet

Réunion du 12 juillet 2017 à 14h30
Rétablissement de la confiance dans l'action publique — Article 12

Nicole Belloubet, garde des sceaux :

… et dû conduire une liste alors que j’avais à peine trente ans. En tant que tête de liste, j’ai parfaitement pu mesurer les difficultés financières qui se présentaient pour accéder et aux comptes et aux crédits.

Quoi qu’il en soit, l’ensemble des propos qui ont été tenus ici militent pour le rétablissement de la banque de la démocratie. Sans m’attarder davantage sur le constat, dressé par tous, des difficultés rencontrées par les candidats aux fonctions électives, je souhaite dire quelques mots à ce propos.

Dans le cadre des campagnes électorales, le recours à l’emprunt bancaire est en recul. Il représentait 35 % du financement des candidats à l’élection présidentielle et 25 % du financement des candidats aux élections législatives en 2012. Il représentait en outre près de 10 % du financement des candidats lors des dernières élections sénatoriales.

Face à ce constat, le Gouvernement a proposé deux mesures : d’une part, la création d’un médiateur du crédit – je maintiens le nom ! – aux candidats et aux partis politiques, et, d’autre part, la création d’une structure pérenne de financement.

Ces deux mesures nous semblent complémentaires.

Si, dans un certain nombre de cas, l’intervention du médiateur est de nature à remédier aux difficultés que rencontrent les candidats et les partis dans l'obtention des crédits, elle ne permettra pas de surmonter tous les obstacles auxquels se heurteront les candidats aux élections confrontés à un besoin immédiat de financement en vue d'une élection déterminée.

Une structure de financement des candidats apparaît donc comme une réponse indispensable pour pallier les carences du financement bancaire privé.

Pour ce qui concerne la structure de financement envisagée, nous souhaitons demander au Parlement l’habilitation de légiférer par ordonnance.

Mesdames, messieurs les sénateurs, l’habilitation que nous vous proposons de nous donner est bien entendu assez large, parce qu’elle prévoit plusieurs options. Elle comporte cependant les dispositions nécessaires pour assurer le respect de l’article 38 de la Constitution, comme l’a d’ailleurs précisé le Conseil d’État dans son avis.

L’habilitation prévoit que la structure de financement interviendra en cas de défaillance avérée du marché et, le cas échéant, après intervention du médiateur. La banque de la démocratie pourra accorder des prêts, des avances ou des garanties.

De plus, l’amendement présenté par le Gouvernement tend à resserrer le champ de l’habilitation au financement des campagnes électorales présidentielles, législatives, sénatoriales et européennes.

La banque de la démocratie pourra être un établissement doté de la personnalité morale, adossé à un établissement de crédit existant, ou bien prendre la forme d'un mécanisme de financement spécifique.

J’ai déjà eu l’occasion de le dire devant vous : une mission va être confiée en ce sens à l’inspection générale des finances et à l’inspection générale de l’administration. Ainsi pourra-t-on déterminer la forme la plus adéquate de cette structure pour qu’elle puisse atteindre au mieux les buts qui lui sont fixés. Par la même occasion, les conditions de sa mise en place pourront être établies.

Enfin, l’habilitation précise que les règles de fonctionnement de la structure devront garantir l’impartialité des décisions qui seront prises, de manière à préserver le pluralisme de la vie politique et la viabilité financière du dispositif mis en place.

Comme le précise l’étude d’impact, les décisions pourront être prises par une autorité collégiale ne recevant aucune instruction du Gouvernement non plus que d’une autre autorité, afin de préserver l’indépendance de la banque de la démocratie.

Les décisions de la banque pourront se fonder sur les perspectives raisonnables de remboursement, reposant elles-mêmes sur des critères objectifs tels que, par exemple, le patrimoine du demandeur ou l’existence de garanties et de sûretés.

Concrètement, le critère d’appréciation appliqué par la banque de la démocratie devra être la solvabilité. Ce critère permettra également d’objectiver le cadre d’intervention de la banque.

Monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, cette demande d’habilitation n’est pas la conséquence d’une quelconque impréparation du Gouvernement, comme j’ai parfois pu l’entendre et le comprendre. Au contraire, elle témoigne de la prudence dont fait preuve le Gouvernement dans la définition d’une structure qui soit la plus appropriée pour permettre le financement des campagnes électorales et pour garantir ainsi le pluralisme politique visé par l’article 4 de notre Constitution.

Au demeurant, cette habilitation n’est pas plus imprécise que bien des habilitations votées, par le passé, par le Parlement.

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