Je veux d'abord remercier chacune et chacun d'entre vous de la confiance et de l'amitié que vous me faites. Je vois dans l'abstention de certains de nos collègues un signe amical d'encouragement. Cette commission a connu douze présidents depuis 1958, dont Jean Lecanuet. Leur succéder est un honneur et une très lourde responsabilité. J'exercerai cette fonction avec toute mon énergie et tout mon temps - dès que j'aurai quitté mon mandat municipal en région parisienne -, et tâcherai d'être digne de votre confiance.
J'ai à cet instant une pensée pour mes prédécesseurs immédiats : Josselin de Rohan, mal avisé de nous transférer au 46 rue de Vaugirard mais dont la méthode des binômes de rapporteurs, jamais remise en cause, fait la richesse des travaux de notre commission, et Jean-Louis Carrère, qui a mené un courageux combat pour la loi de programmation militaire, et qui a mis sa responsabilité en jeu pour obtenir les crédits nécessaires à nos armées.
Quant à Jean-Pierre Raffarin, je veux le remercier doublement : à titre personnel d'une part, car il m'a tout appris et confié des responsabilités qui m'ont permis de me frotter aux exigences du bureau de cette commission, et en notre nom à tous d'autre part, car il a su mettre ses nombreuses compétences, son expérience d'ancien Premier ministre et d'homme d'État, sa pratique des relations internationales - notamment avec la Chine - à notre service. Hier soir encore, sa parole, respectée, attendue, médiatisée, s'est révélée forte pour dire au chef de l'État que la baisse des crédits de la défense n'était pas supportable. Formidable animateur de commission, il a su nous faire donner le meilleur de nous-mêmes. Les auditions de Valéry Giscard d'Estaing ou de Mahmoud Abbas resteront de grands moments, et je ne dis rien de la qualité des rapports produits en binômes, qui font autorité au-delà du Sénat sur les questions internationales. Dernier exemple en date : le rapport coécrit par Jean-Pierre Raffarin et Daniel Reiner sur les « 2% du PIB pour la défense», qui rappellera à nos dirigeants les engagements qu'ils ont pris pour nos armées. Bref, jamais notre commission n'a connu un tel rayonnement sur les plans national et international, et jamais nos rapports n'ont été aussi attendus que sous la présidence de Jean-Pierre Raffarin. À titre personnel et en notre nom à tous, je lui dis merci.
Je m'inscris totalement dans sa démarche. Nous militerons ensemble pour une diplomatie efficace, indépendante, qui accepte de parler à tous les pays. Nous veillerons à ce que la coopération et le développement international soient mis en valeur, avec générosité et solidarité, ainsi que la volonté d'évaluer nos actions - car nous sommes comptables de l'argent public dépensé à cette fin.
Comme Jean-Pierre Raffarin, je souhaite que notre commission s'engage en faveur de l'Europe, seul espace de paix et de coopération sur lequel nous pouvons compter dans un monde devenu dangereux. L'attitude des grandes puissances nous y incite. Nous continuerons notamment à suivre la crise du Brexit et à suggérer toute modification de la construction européenne que nous jugerons utile, afin que notre continent continuer à s'affirmer en matière de sécurité.
En matière de défense, nous continuerons à exiger des missions bien définies et des moyens financiers adéquats. Nous avons appris hier en effet que 850 millions d'euros de crédits étaient gelés non par loi de finances rectificative mais par décret, ce qui prive le Parlement de la possibilité de s'exprimer... Nous sommes certes solidaires des efforts financiers que doit consentir l'État, mais nous n'accepterons pas un tel écart entre les promesses de campagne et les actes. Nos armées sont fatiguées, leur matériel est usé et nous avons besoin d'un important effort d'innovation - ceux d'entre vous qui participaient au salon du Bourget l'ont sans doute constaté. Bref, ces annonces nous confortent dans notre rôle.
Un mot sur la méthode que je souhaite retenir : je m'appuierai sur le bureau de notre commission, et conserverai le système des binômes, qui a permis de former des spécialistes. Nous devons tous aspirer au niveau de compétence qui fait la réputation d'excellence de notre commission. Nous choisirons rapidement les missions sur lesquelles nous allons travailler, en fonction de l'actualité. J'entretiendrai un esprit de collégialité et resterai à tout moment à votre disposition pour le bon exercice de nos missions. Ayant un faible pour les questions d'organisation matérielle et quittant ma fonction de secrétaire du Sénat, j'aurai à coeur d'obtenir des conditions de réunion améliorées, dans une salle multimédia.
Je souhaite continuer, à la suite de Jean-Pierre Raffarin, à faire de cette commission un diamant, un élément essentiel du rayonnement du Sénat. Le départ de certains de nos collègues dans quelques mois risque d'affaiblir nos binômes, mais je ne doute pas que ces vides seront rapidement comblés. Nous voulons tous que le Sénat remplisse son rôle au coeur des institutions internationales. Jean-Pierre Raffarin, qui pour sa part a pris d'autres engagements en faveur de la paix, nous trouvera toujours à ses côtés.